Tacoma est le second jeu du studio Fullbright, connu pour avoir fait jaser les "true gamer" dans Gone Home, une expérience contemplative atypique qui ne laissa personne de marbre. Après quatre longues années, les voilà de nouveau sur le devant de la scène avec Tacoma, jeu reprenant la philosophie de ce que l'on appelle maladroitement les "walking simulator".
Nous voici donc plongé au cœur de la station spatiale Tacoma, en 2088. On suivra les péripéties des 6 membres de l'équipage disparu depuis 12h, et du leur fidèle compagnon Odin, intelligence artificielle en charge du vaisseau. Si le jeu ressemble vraisemblablement à son petit frère Gone Home, l'équipe Steve Gaynor a parfait la formule. La narration environnementale, parfois maladroite dans le jeu précédent, est ici plus discrète et intelligente. Les fioritures de Gone Home laisse place à des lieux plus épurés et crédibles qui détaillent la singularité de chacun des membres de Tacoma. L'exploration est une mécanique de gameplay efficace qui laisse le joueur découvrir, ou pas, la profondeur des différents protagonistes. Le fait de pouvoir revenir en arrière et observer des situations avec un point de vue différent rend le jeu vivant et crédible. Dans cette recherche au réalisme, notons l'excellent jeu d'acteur. Tout semble plus naturel et plus fluide; on ressent le savoir faire et l’expérience de Fullbright.
Malgré tout, le jeu n'est pas aussi marquant qu'un Gone Home. Si l'écriture et la narration sont sans aucun doute parmi les points forts du jeu, encore faut il avoir quelque chose d'intéressant à raconter. Je me demande encore qu'est ce qui passionne tant Steve Gaynor et sa bande dans cette histoire. Pourtant, les thèmes abordés sont nombreux et intéressants: dérive du capitalisme financiarisé, libre arbitre de la machine, pertinence du mouvement syndical... Mais toutes ces thématiques sont à chaque fois à peine effleuré, jamais suffisamment interrogé dans leur profondeur pour que le joueur soit enclin à poursuivre la réflexion. Malheureusement, ce défaut se retrouve aussi dans la construction des enjeux autour des personnages; le botaniste est mû par l'amour qu'il porte à son conjoint et son fils, attendant désespérément son retour sur terre. Mais cela, sans nous laisser complètement indifférent, ne parvient à provoquer ni peur, ni pitié chez le joueur. Et ceci est vrai dans la construction de quasiment tous les personnages. Car, si il est agréable d'apprendre à connaitre au fil de l'aventure le caractère de chacun, cela n'est pas suffisant pour construire de véritables enjeux. Cela conduit à une aventure agréable mais trop plate, sans moments de fulgurances. Une histoire banale raconté par le prisme original de quelques mécaniques propres au medium vidéoludique.
Alors que je me vois encore souriant devant la naïve mais sincère histoire d'amour conter dans Gone Home, je constate que je viens de finir Tacoma, le twist final sonnant creux. Durant les 3h d'aventure, j'ai aimé sillonné ce vaisseau mais rien n'a été assez surprenant ou émouvant pour me dire que j'étais face à un grand jeu qui, contrairement à son petit frère Gone Hone, ne restera pas dans un coin de ma mémoire.