Vous aimez les tortues mutantes ? Moui c'est bien ce que je pensais, à part dans un nanar d'horreur je ne vois où caser ce concept fumeux. Encore moins quand ces tortues mutantes sont des ninjas qui mangent des pizzas, on se demande bien quel est le rapport avec la choucroute...
Pourtant cette licence, typiquement amerloque, avait l'odeur commerciale et la qualité douteuse d'une série Hanna-Barbera. Mais étrangement, ses déclinaisons vidéo ludique ce sont révélées bien meilleures. Ainsi, tout une vague de jeux basés sur cet univers improbable a déferlée sur consoles, arcade et portables.
Faisant partie de la toute première fournée de jeux du désormais célèbre Gameboy, TMHT : Fall of the Foot Clan a été un succès en plus d'être un jeu particulièrement bien foutu pour une première. TMHT : Fall of the Foot Clan est commercialisé en 1990 peu après l'épisode NES qui, malgré d'incroyables défauts, fut un carton en occident. Konami, l'acquéreur de la franchise, allait exploiter le filon jusqu'a plus soif avec plus ou moins de réussite selon les épisodes et les plateformes.
Cette première version sur Gameboy classique est une réussite. Pour comprendre pourquoi, il faut se placer dans le contexte de l'époque. Le Gameboy est une machine monochrome ayant un écran avec une intolérable rémanence. Un scrolling trop rapide, des sprites trop nombreux ou trop grands et c'était le drame visuel. Avec ces traînées de partout, même le meilleur des jeux risquait d'être ruiné à cause d'un affichage plutôt déficient. Toutefois, Konami a bien fait son travail avec ce jeu. On reproche souvent à ce titre d'être trop facile, extrêmement basique dans son déroulement, et il se boucle en plus ou moins 20 min.
C'est vrai, TMHT : Fall of the Foot Clan est une sorte de beat'em up simplifié ou vous devez, la plupart du temps, avancer en vous contentant d'appuyer sur un bouton pour dégager les importuns. Il y a quelques phases de "plateforme" mais rien de transcendant. Le jeu est d'une extrême simplicité, mais il y a une raison à cela : le support, le Gameboy. Du fait de son aspect portable, de son écran, Konami a fait le choix de concevoir un jeu lisible et accessible.
En effet, ce TMHT est réalisé de façon à ce que le joueur puisse constamment avoir une lisibilité correcte. Le sprite principal est quasiment toujours au centre de l'écran. Comme il ne bouge pas il reste visible et permet au joueur de ne pas être gêné par la rémanence. Le jeu disposant de sprite de très grosse taille, ce qui accentue d'autant plus cet effet. Dans le dernier niveau par exemple vous devez éviter des sortes de motos gigantesques qui laissent derrière elles une traînée de pixels qui couvrent tout l'écran. Heureusement qu'il suffit de sauter pour les éviter, sinon ce serait un calvaire. Cette simplicité de jeu est typique d'un titre conçu pour une console portable. Vous pouvez jouer même en vous faisant bousculer dans les transports en communs avec une faible lumière. C'est sans doute comme cela que Konami a pensé son titre et j'ai envi de dire que c'est le bon choix. Contrairement à Castlevania Adventure par exemple, le titre est été pensé comme un jeu console fixe ce qui le rend difficile à jouer sur une portable. Les reproches de facilité et simplicité de TMHT : Fall of the Foot Clan proviennent du fait que le titre n'a pas été rejoué sur sa machine d'origine mais plutôt sur des GBA et dérivés ayant un écran plus lisible. Effectivement, dans ce cas le jeu est extrêmement simple. Bien que Konami est pensé à nos yeux, le jeu dispose quand même d'une réalisation solide pour une première foi.
Les sprites sont de tailles très correctes, assez bien dessinés et correctement animés. Les scrollings, en revanche, sont un poil saccadés mais disposent de timides parallaxes, ce qui n'est pas mal. Le jeu à une action soutenue et dans certains niveaux il vous faudra essuyer une pluie de sbires du Foot Clan venant de tous les cotés. Même avec tout ces sprites de bonne taille l'animation ne souffre pas trop. Techniquement le jeu est bien réalisé, et sa mise en scène a fait l'objet d'un effort en entrecoupant les niveaux d'artworks de nos chères tortues et de bonus stage venant casser la monotonie... Mais le point le plus réussi reste la bande son. Konami et Sunsoft étaient particulièrement doués en matière de musiques sur les 8 et 16 bits et ce TMHT ne fait pas exception à cette règle.
On peut penser ce que l'on veut des thèmes des Tortue Ninja, mais il faut bien avouer que là ils s'adaptent fabuleusement au processeur sonore du Gameboy. Konami a utilisé la machine juste comme il le fallait. Les musiques sont composées de modulation dont seul le Gameboy a le secret. Il y a dans les BGM du jeu tout une panoplie de sonorités jazzy et très électro qui donnent aux musiques un rythme entraînant, elles s'écoutent très facilement malgré leur trop courte durée. Certains sons utilisés sont des modulations aux enveloppes caractéristiques du support. On découvre en fin de compte des musiques avec une basse très électro, granuleuse et des petites sonorités jazzy très sympathiques. Mention spéciale au thème du staff roll de fin qui résume à lui tout seul le talent de Konami et les capacités audio singulières du Gameboy.
TMHT : Fall of the Foot Clan n'est pas le jeu du siècle, mais il reste et de très loin, bien devant l'épisode NES. Autant en terme de réalisation que de plaisir de jeu. Bien que très simple dans son déroulement et dans sa difficulté, le jeu saura rester accessible aux plus jeunes et faire découvrir les joies du beat'em up version pizza et reptile mutant. Si en plus on nous sert cela sur une très bonne bande son, on ne va pas chipoté sur la simplicité d'un jeu dont on parle encore plus de 20 ans après sa commercialisation.