Après un retour aux sources dans l'univers de la plate-forme : la course millimétrée et la rage intrinsèque due à l'accumulation d'échecs, la "team Meat" nous offre une autre course, tout aussi délicate à achever : celle du petit Isaac. Ayant échappé in extremis de celle qui l'a enfanté, le héros en tenue d'Adam, rappelant le fantasme perpétuel du joueur de pouvoir exercer ce qu'il désire dans la réalité, doit se faufiler dans le sous-sol peu accueillant de sa propre maison. L'exercice périlleux menant à la liberté vaut toutes les peines du monde, même la sienne.
Car le monde d'Isaac est ancré dans le cauchemardesque : l'obscurité, la crasse, l'urine, le sang, la putréfaction. Non, les murs ne sont pas constitués de lamelles d'oignon. Le jeune Isaac, déjà sombré dans une immense incompréhension vis-à-vis du comportement de sa mère, doit se résoudre à annihiler toute opposition par le biais de son chagrin.
Ainsi, le contrôle d'Isaac se résulte à esquiver les projectiles ennemis tout en déversant ses larmes en guise d'attaque. Si les créatures se montrent plutôt résistantes aux chocs, il existe des améliorations à chaque niveau. Systématiquement, une salle aux trésors offre un bonus, associé soit aux larmes (attaque augmentée, effet boomerang, charge, double tir), soit à la touche d'arme secondaire. Il existe notamment des pilules et des cartes de tarot, à usage unique, que le héros devra essayer avant de connaître ses effets.
La plus grande difficulté de The Binding of Isaac est nichée dans l'inconnu. Une nouvelle partie offre une organisation différente des niveaux, de monstres et d'objets à collecter. Les larmes du joueur ne tardent pas à couler après avoir affronté les premiers boss, teintés par la cruauté environnante. Les améliorations récoltées seront-elles efficaces contre les monstres ? Isaac parviendra-t-il à échapper à la mort quasi-fatidique ? Pourra-t-il pardonner la démence de sa mère ?
Les développeurs osent balancer un amoncellement de questions au joueur, défiant parfois sa connaissance basique des jeux vidéo : tous les pouvoirs ne procurent pas forcément une option efficace pour battre les boss. Il faudra du courage, de la ténacité, du masochisme pour atteindre le but (in)espéré.
Or, à la seconde où les nerfs semblent se détendre après avoir entendu le hurlement de douleur du boss final, voilà que, l'envie aidant, le joueur replonge dans les entrailles tièdes, sordides du sous-sol. D'autres niveaux ont été débloqués, la difficulté revue à la hausse, un nouveau boss final à abattre. L'incroyable nombre de fins dépasse celui de Chrono Trigger, à un seul détail près : la tristesse partagée après l'ultime chapitre.
The Binding of Isaac est un jeu angoissant, non pas à la manière d'un Silent Hill, bien que le terme "survival-horror" corresponde au titre de la Team Meat, mais celui-ci capte toutes les sensations négatives (stress, peur, colère) et les exploite jusqu'au cri du ragequit, après des heures de lutte contre ces entités démoniaques. Au prix inouï de 5€ (sans compter le petit DLC en route prochainement), vous passerez des heures devant votre écran, tentant de consoler le petit Isaac, voué à mourir, encore et encore.
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