Un bon petit défouloir mélangeant les styles avec aisance et bonheur, de surcroît pas avare en humour et en délires méta. On pensera volontiers à Grow Home au niveau du système de progression, même si le gameplay est tout autre, hybride réussi entre Ratchet & Clank et Gauntlet.
Les trois personnages jouables possèdent plusieurs capacités spéciales, dont une unique à chacun, indispensable pour déverrouiller certains passages, tout l'intérêt est donc d'explorer de fond en comble cette tour mortelle et de jongler entre les protagonistes afin de récupérer tous les bonus cachés. Comme dans un film de l'époque, l'ascension de la tour est scindée en acte, et rythmée par le commentaire audio du réalisateur (!). Ce narrateur de pacotille s'avère très drôle et a le mérite de ne pas nous noyer sous un flot de paroles ininterrompu, soulignant les séquences d'action de diatribes rétrogrades/passéistes, ou au contraire relevant l'intérêt de certaines séquences un peu molles en taclant gentiment l'envers du décor au cinéma. Cet aspect-là m'a agréablement surpris, car contrairement à ce que l'on aurait pu craindre il ne s'agit pas simplement d'un gimmick, le procédé propose une véritable plus-value au style rétro/hommage du jeu, et est même l'occasion d'un twist méta plutôt rigolo dans le dernier quart, malheureusement gâché par un final trop vite expédié.
Au niveau du gameplay là aussi le jeu est réussi, en-dehors de quelques caprices de caméra heureusement plutôt rares l'action reste lisible en permanence, et il y a un côté vraiment défoulant à casser toutes sortes de monstres en papier mâché, en carton, en pâte à modeler, animés image par image. La tour titulaire est haute, très haute même, avec une architecture bien pensée mettant en valeur notre progression, et à part quelques passages en intérieur aucun temps de chargement ne vient interrompre l'action (il est même possible de se jeter du haut en chute libre pour redescendre jusqu'au point de démarrage). Histoire de nous pousser à regarder vers le bas, des ennemis apparaîtront régulièrement en-dessous de nous, l'occasion de changer de point de vue et de s'improviser un simili-Space Invaders inversé depuis le rebord ; rigolo, mais malheureusement pas exploité outre mesure, et surtout parfois brouillon quand les ennemis arrivent de partout, nous obligeant à jongler entre les points de vue.
Sans trop de surprise de la part des frangins chiliens d'ACE Team, The Deadly Tower of Monsters brille par sa direction artistique. Les flous baveux, aberrations chromatiques, animations foireuses et autre choix de couleurs douteux typique du cinéma d'exploitation sci-fi des années 1950 sont ici retranscris à la perfection, portés par des musiques parfois répétitives mais dans l'ensemble vraiment excellentes et jamais prise de tête. Le jeu regorge de références aux mondes du cinéma et du jeu vidéo, certaines plus subtiles que d'autres, mais toutes très amusantes, sans avoir besoin d'avoir passé les 60 dernières années au cinéma pour les comprendre (l'arsenal est à l'unisson, entre les fusils en forme de godemichés et les sabre lasers il y a de quoi s'amuser).
Au final, si le titre pêche, c'est surtout au niveau de sa faible durée de vie (comptez 4 heures pour monter jusqu'en haut de la tour, le double pour explorer les petits recoins cachés) et d'un challenge globalement assez facile, peut-être trop. On ne meurt pas souvent (presque jamais en fait, à moins d'être vraiment à la ramasse lors des combats), ce qui est une excellente chose pour garder un rythme soutenu, mais à l'arrivée cette fameuse tour mortelle ne nous résistera pas outre mesure. Au-delà de ce léger grief, le gameplay du titre forme un pot-pourri certes très réussi, mais jamais ni très original, ni exploité à son plein potentiel, ce qui l'empêche de tutoyer l'excellence. Un bon petit défouloir donc, bourré de petites idées bien pensées et surprenantes, suffisamment court pour ne pas se laisser piéger dans une dangereuse répétitivité, et de surcroît très bien fignolé ; The Deadly Tower of Monsters ne sera jamais plus que cela, mais vu le petit prix d'entrée demandé il serait dommage de ne pas se laisser tenter.