Critique 100% sans spoïl


Pour ceux qui ne le connaissent pas, Fumeto Ueda est un créateur japonais qui propose des œuvres différentes de tout ce qui se fait dans le jeu vidéo. Ses jeux ont tendance à marquer les esprits et font appel à des concepts rarement rencontrés dans le jeu vidéo : protection d’un personnage plus faible dans ICO ou solitude face au gigantisme dans Shadow of the Colossus. En une phrase, le jeu entier est résumé, car tout le gameplay et tout l’univers tournent autour de ce concept. Oubliez les dialogues, les personnages à foison, les quêtes secondaires, les explosions, oubliez tout cela lorsque vous vous lancez dans un jeu de Fumito Ueda. Vous êtes soit tout seul, soit à 2, vous n’aurez aucun dialogue ou presque et le silence et la solitude seront vos meilleurs amis, dans ces univers épurés mais ô combien marquant.


The Last Guardian pourrait être une suite à ICO, tellement il lui ressemble, mais un ICO 2 dans lequel on aurait insufflé un peu de Shadow of the Colossus. Si vous avez aimé les deux précédentes œuvres du créateur, vous ne serez pas dépaysé (trop peu ?). Est-ce que vous l'aimerez ? Il y a de fortes chances, si vous arrivez à passer outre un certains nombre de défauts généralement d'ordre technique.


Le cœur de The Last Guardian, c’est la relation entre un jeune garçon (vous, le joueur) et une énorme créature, un animal répondant au doux nom de Trico. Ces deux être ne se connaissent pas, mais vont devoir avancer ensemble en se faisant confiance. Cet aspect du jeu, qui est le plus important, puisqu’au centre du gameplay et de l’histoire, est extrêmement réussi. On se prend rapidement d’amitié pour cet animal, terriblement attachant. De son côté, la grande bebête aussi se prend d'affection pour le garçon. Cette relation reste tout au long du jeu très réaliste, sans que jamais les développeurs n'en fassent trop. On va pouvoir caresser Trico, lui grimper dessus et lui donner des ordres qu'il ne suivra pas toujours bien, comme un animal sauvage en train d'être apprivoisé. Il n'obéit donc pas au doigt et à l'oeil, ce qui peut parfois être (très) agaçant, mais c'était aussi la meilleure manière de le rendre réaliste. Trico est un véritable animal. Un animal comme je n'en ai jamais vu dans un jeu vidéo. Ses réactions et ses animations sont criantes de vérité et permettent aux pixels de prendre vie comme jamais.
Les animations de Trico ne sont pas les seules à être extrêmement réussies : le petit garçon que l'on contrôle est très bien animé lui aussi, de quoi faire oublier le côté rigide que peut avoir un jeu vidéo et transcender le genre. Du moins, c'est que qui aurait du se passer si le gameplay n'avait pas autant de problèmes.


Le gameplay que suivra le joueur tout au long du jeu est plutôt basique : déplacement du personnage, sauts, interaction avec des objets (ainsi que les interaction avec Trico, moins classique en revanche). Tous ces mouvements sans exception sont rendu compliqués voire désagréables à cause d'un gameplay manquant cruellement de précision. On se surprend à sauter une fois sur 2 à côté de notre objectif, à courir de travers, à grimper à l'envers, la tête en bas, sur Trico ou encore galérer rien que pouvoir decendre de la bête. Ces actions sont pourtant effectuées en toutes circonstances tout au long du jeu et l'habitude après plusieurs heures n'y change absolument rien. Ces défauts sont tellement présents qu'on ne peut pas oublier qu'on est dans un jeu vidéo mal développé, ce qui, forcément, casse l'immersion et le plaisir qu'on est censé ressentir.
Le gameplay est également assez répétitif et on sera souvent confronté à des situations similaires tout au long de l'aventure. C'est un défaut souvent mentionné, mais je ne m'attarderai pas dessus, car si je me souviens bien, c'était déjà ce que j'avais ressenti avec ICO et Shadow of the Colossus. C'est donc du Ueda typique.


Comme d’habitude avec Fumito Ueda, l’univers dépeint ici est intriguant et reste très mystérieux une bonne partie de l’aventure. L’un des principaux intérêts réside d’ailleurs dans la compréhension et la découverte de ce monde. On est loin des classiques, des sempiternels poncifs qui reviennent à chaque fois qu’on fait appel un univers imaginaire à tendance médiéval. En revanche, je regrette sa trop grande proximité avec ses autres oeuvres, notamment ICO. C'est clair, on est dans un jeu de Ueda, mais ç'en est même trop clair. De plus, les environnements se ressemblent tous beaucoup, ce qui peut ennuyer un peu à la longue.


Visuelement, le jeu oscille entre la beauté de certains panoramas, avec sa palette de couleurs pastelles hyper saturées, et la laideur de quelques textures qui accusent 7 ou 8 ans de retard. La direction artistique réussie arrive au final à rattraper la faiblesse technique. TLG n'est pas moche du tout, il n'est pas beau non plus, mais il possède une patte graphique bien à lui qui le rend aisément reconnaissable. Leur moteur n'a, en revanche, pas l'air très au point tant il galère à afficher le jeu de manière fluide. Il faut le signaler, même s'il serait stupide de s'arrêter à ce détail tant il est peu gênant.


Ce qui est gênant, par contre, c'est la caméra. Les problème de caméra constituent le second grand souci de TLG. Ca ne gâche pas l'expérience de jeu comme peuvent le faire les errement de gamaplay, mais ça m'a souvent posé problème. C'est simple, la caméra est très mauvaise et ne se place que rarement dans le bon angle. Au mieux, elle sera correcte, au pire, elle vous empêchera de voir ce que vous faîtes, ce qui peut avoir des conséquences fâcheuses.


Malgré ses défauts, on sort de The Last Guardian avec un souvenir vivace. Le jeu est marquant, et rempli donc son office, même s'il reste inférieur à SotC et peut-être aussi à ICO, notamment à cause de son gameplay tellement agaçant qu'il fini par casser l'immersion.

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le 12 avr. 2017

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roifingolfin

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