Par où commencer... Comment aborder ce jeu ? Est-ce qu'on peut vraiment parler d'un jeu, d'ailleurs ? Ou bien faudrait-il inventer un nouveau mot pour le désigner ?


Bon. Comme le laissent entendre les différentes listes et critiques présentes sur mon profil, je suis un très grand fan de The Legend of Zelda. C'est ma licence préférée. La première fois que je me suis présenté face à Majora's Mask, c'était sur GameCube, sur le disque promotionnel Collector's Edition. Je ne devais pas avoir plus de 6 ans... Je vous laisse imaginer les sueurs froides que m'a infligées ce spécimen, et ce après quelques minutes de jeu seulement. Mais en tant que fan inconditionnel de la saga, j'étais destiné à rejouer un jour à Majora's Mask, et lorsque la Nintendo 64 a intégré ma modeste collection de consoles et jeux vidéo, je suis passé à l'acte et j'ai une bonne fois pour toutes terminé ce jeu.


Le coup de foudre ! Je n'ai pas vu le temps passer... En fait si, je n'ai vu que ça. Un écoulement de temps incessant. Du stress. Non, plus encore... De l'effroi. Et puis du plaisir. De l'euphorie. De l'extase. Et à nouveau de l'appréhension. De la stupéfaction. De la consternation. Mais surtout de l'incompréhension : comment est-il possible qu'un jeu vidéo me procure autant d'émotions ?


Telle est la magie de The Legend of Zelda: Majora's Mask. Seulement deux ans après la sortie de son prédécesseur, le jeu divin descend des cieux pour venir montrer la voie à l'une des plus grandes licences du jeu vidéo. Majora's Mask, c'est l'équilibre absolument parfait entre le respect des codes classiques de The Legend of Zelda et un concept innovateur diablement original. Majora's Mask, c'est à la fois l'un des opus les plus Zeldesques de la saga, et celui qui se démarque le plus. Majora's Mask, c'est un OVNI.


L'idée portée par cet OVNI est de nous plonger dans un univers apocalyptique à l'ambiance oppressante. Constamment observé par une Lune au regard luciférien, le joueur enchaîne donjons et quêtes tout en savant pertinemment qu'il n'y a pas de temps à perdre et que cette Lune un petit peu envahissante sur les bords finira par s'écraser sur sa tête. Et pour bien être forcé à s'en rappeler, il est soumis à un décompte de 72 heures : 72 heures pour agir, 72 heures pour empêcher que la Lune ne s'écrase sur Termina. Voilà l'élément clé du jeu. L'intrigue est régie par un compte à rebours, et c'est le joueur qui trinque. Si Majora's Mask n'a pas eu le succès médiatique d'un Ocarina of Time, c'est selon moi en grande partie parce que cette mécanique ne plaît pas à tout le monde : beaucoup se plaignent de ce côté stressant, et certains affirment même qu'il va à l'encontre de l'essence de The Legend of Zelda, une licence propice à l'aventure et l'exploration. Mais comprendre le génie de Majora's Mask demande de prendre du recul et opter pour un point de vue différent... En faisant cela, on se rend très vite compte que c'est véritablement cette même mécanique qui donne au jeu toute sa splendeur, tout son charme, mais surtout tout son intérêt et sa difficulté. Car oui, si ce jeu est bon c'est aussi parce qu'il est dur. Ce n'est pas juste un jeu Zelda, c'est un défi : terminer ces donjons (déjà difficiles en soi) en un temps imparti constitue une véritable épreuve. Et la difficulté n'est jamais néfaste dans un jeu vidéo lorsqu'elle est bien dosée, au contraire, et c'est le cas ici.


La deuxième élément phare de Majora's Mask, c'est son ambiance. Le décompte de temps et la difficulté qu'il génère s'associent parfaitement à cette ambiance, qui se veut perturbante, stressante, oppressante. Pendant l'entièreté du jeu, on peut observer au dessus de nous cette Lune malfaisante qui s'apprête à heurter Termina. Plus les heures passent, plus elle se rapproche et nous remplit d'effroi, exactement comme le thème de la mort qui, au fur et à mesure que l'on avance dans la quête, se fait de plus en plus omniprésent au sein du jeu, comme un signe que l'apocalypse est imminente et inévitable. La vallée Ikana, dernière région que l'on parcourt avant d'aller défier le boss final, est le point d'orgue de Majora's Mask, et le résume à elle seule : une région morte, sur laquelle se dressent quelques ruines, habitées par les défunts du Royaume. Les momies, les fantômes, les corbeaux et les squelettes réalisent leur plus belle danse macabre au milieu d'un véritable cimetière géant. Et ça ne s'arrête pas là : en plus de chercher à oppresser le joueur et lui rappeler constamment que ses jours sont comptés, Majora's Mask cherche aussi à le déranger, et n'hésite pas à lui faire vivre des scènes particulièrement perturbantes. Entre autres : le jeune Link devenant fou, l'esprit harcelé par des Mojos ; un père de famille à moitié momifié dans une armoire, tentant de nous attaquer ; un vieil astronome ressemblant trait pour trait à Merlin l'enchanteur, nous prêtant son microscope au sommet d'un observatoire complètement psychédélique ; les hurlements stridents et incessants d'un enfant Goron, si insupportable que vous serez obligés de quitter la pièce pour ne pas devenir dingues ; des donjons qui se retournent, et vous mettent le ciel sous les pieds... Toutes ces situations fantasques et loufoques déstabilisent une fois de plus le joueur, tout en contribuant au côté atypique du jeu.


Cependant, attention à ne pas s'y méprendre : Majora's Mask n'est pas seulement un jeu atypique. Il s'agit aussi d'un excellent Zelda, fidèle à la licence, avec un gameplay riche nous offrant même la possibilité de contrôler un Mojo, un Goron et un Zora. Les donjons sont sublimes, la bande-son est exceptionnelle (peu surprenant pour un jeu Zelda, me direz-vous, mais celle-ci est particulièrement sensationnelle), et la durée de vie est tout simplement excellente. Cette dernière doit notamment son excellence à une magnifique quête annexe, la meilleure de la licence et de loin, tournant également autour du décompte de temps. Vous y découvrirez Anju et Kafei, deux des personnages les plus attachants que The Legend Of Zelda puisse nous offrir. Et d'ailleurs, en parlant de personnages, je vous mets au défi de trouver plus intrigant, fascinant et singulier que le célèbre vendeur de masques, ce personnage complètement barge et auteur du fameux "you've met with a terrible fate, haven't you ?", repris et décliné massivement sur Internet...


Voilà Majora's Mask. J'en ai dit beaucoup, et d'un autre côté j'ai l'impression d'avoir oublié une montagne d'éléments. Ce jeu est fou, vraiment. Je suis absolument incapable de lui trouver le moindre défaut. C'est le jeu parfait, peut-être le seul qui obtiendra un 10/10 de ma part. J'aimerais d'ailleurs trouver un adjectif pour le qualifier, mais il y en a trop. Écrasant, ébouriffant, surprenant, exorbitant, effarant, renversant, extravagant, stupéfiant ? Je ne sais pas... Mais ce dont je suis convaincu, c'est que ce jeu est le meilleur auquel j'ai joué dans ma vie, et c'est aussi sans aucun doute le meilleur Zelda jamais créé.

Raymus
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le 14 oct. 2021

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