15 ans plus tard mon cerveau mal irrigué vient enfin de comprendre.
Comprendre pourquoi ce Zelda et pas un autre.
Comprendre pourquoi c'est un chef d'œuvre intégral.
Curieusement, c'est à la fois l'épisode du recyclage et le plus couillu de tous.
Une resucée parce qu'il reprend la direction artistique, les personnages et les items de Ocarina of Time mais avec un environnement réduit et moins de donjons. Et le premier abruti venu sautera sur l'argument pour cracher sa glaire putrescente en n'ayant strictement rien compris.
Oui, garde donc ta salive ô toi vil lama ! N'as-tu donc pas compris que la découverte de la 3D, les donjons, le gameplay des objets... tout ça a été vu en long et en large dans Ocarina of Time et donc que Majora's Mask n'en a plus rien à battre (ou presque). Il se sert de ces acquis archi solides pour aller là où son grand frère ne s'aventurait quasiment pas : vers l'écriture et les quêtes annexes ; l'un étant intimement lié à l'autre.
Préparez les tomates à partir d'ici.
Car oui ! Oui, oui ! Et encore oui ! Majora's Mask est un modèle éclatant d'écriture, de profondeur et de maturité. Et ça vous ne l'avez pas vu venir !
N'en déplaise aux couillons qui pensent qu'une intrigue se raconte à grand renfort de cut-scenes interminables et de baratins lénifiants, Majora's Mask met tout le monde à l'amende en développant l'un des univers les plus riches émotionnellement et humainement avec un minimum d'effets et d'informations.
Prenons un exemple tout con pour les deux du fonds qui froncent les sourcils la bave aux lèvres.
Voyez le maire Dotour ; cette espèce de gland totalement apathique. Là où le génie dans la caractérisation pointe, c'est dans le fait que ce légume ne réagit que lorsque les autres qui s'engueulent devant lui évoquent sa femme. Détail insignifiant mais démontrant une écriture simple et très fine. Une phrase balancée nonchalamment qui renforce l'univers et apporte une humanité réelle mieux que trouzemille cinématiques larmoyantes... Et quand ce genre de détail se multiplie par autant de personnages, l'univers est là : palpable, riche et vivant.
N'en déplaise à ces mêmes couillons qui s'évertuent à penser que le caractère adulte d'un jeu est proportionnel à ces variables : colorimétrie saturée de gris ou de noir (avec quelques giclées rouges) / cervelle collée sur les murs via marouflage incontrôlable / putes à déglinguer sans coup de semonce / "fuck" dialogues "fuck" vulgaires "fuck" / héro bodybuildé, tatoué, torturé, poseur, philosophe avec traumas persistants ...
On peut s'accorder sur le fait que les variables susdites sont absentes de Majora's Mask mais, en regardant un peu plus loin que le bout de son gland humide, l'aventure du petit elfe vert aux oreilles de lapin est bien plus noire et profonde que 99% de la production qui se veut -justement- mature.
Toujours pour les deux du fond qui viennent de bondir sur leur siège.
Ce Zelda est un jeu désespérément morbide. Chaque personnage, derrière son aspect cocasse et/ou sa sale gueule, est voué à une mort certaine ou est bouffé par des secrets/angoisses. Pendant que l'on dégèle un Goron destiné à crever sur place, un singe se fait rôtir à la broche à l'autre bout de la map. Pendant que l'on cherche à s'introduire chez une gamine (dans sa maison hein !) pour voir ce qu'elle planque à la cave, une jeune fiancée va se faire pulvériser en attendant son chéri maudit sous la lune. Le gameplay même des masques consiste en un jeu avec l'âme des morts...
Et paradoxalement c'est l'amour qui anime ces personnages. Amour que l'on porte à ses parents, ses enfants, sa moitié, ses amis, ses passions... Et au milieu de ces deux constantes essentielles de la vie, le joueur portant le superbe chant de l'apaisement. Bouleversant.
Voilà pourquoi cet épisode.
Voilà pourquoi c'est un chef d'oeuvre.
La raison en un mot :
E-M-O-T-I-O-N-(S)