Élever une œuvre au rang de culte ne veut pas dire que l’œuvre en question est parfaite. Bien sûr que non. Quand Ocarina Of Time est sorti, on avait déjà vu plus beau, on avait déjà vu plus vaste, on avait déjà vu plus de PNJ... Seulement, c'est une œuvre qui a su parler à beaucoup de joueurs à travers un univers maîtrisé de bout en bout.
On pourrait comparer avec le récent Skyward Sword, qui doit, peu ou prou, compte autant de PNJ, mais qui n'offre pas la même expérience. Et c'est à mon avis dû à la cohérence de l'univers.
Et c'est là le premier point fort du jeu. Tout se tient.
De la forêt Kokiri à la Montagne du Péril en passant par le lac Hylia et le village Cocorico, chaque lieu a une histoire, un passé, un vécu et la vie qui a élu domicile en ces lieux est authentique. Le scientifique du lac, Anju, Igor, Malon, Mido, Saria... tous ont quelque chose à nous dire. Ils connaissent les lieux qui les entourent, ils ont entendu parler de choses et d'autres. L'enquête auprès des habitants est donc indispensable pour résoudre les différentes énigmes de la quête. Et quand un PNJ renvoi vers un autre ou nous oblige à parcourir tout Hyrule en un temps donné, cela renforce le sentiment d'immersion. Quand on prend la manette aujourd'hui encore et que l'on fait ses premiers pas dans le village Kokiri, on comprend que l'on arrive dans un lieu emprunt de magie et de légendes. Les lucioles qui volent, Navi qui se balade, les Kokiri qui s'affairent à différentes tâches, les pierres Sheikas énigmatiques... tout nous pousse à découvrir les lieux dans les moindre détails. Quand on découvre l'arbre Mojo, on ne peut s'empêcher de faire le tour pour voir si il n'y a pas un petit secret qui traîne derrière.
Ce sentiment d'immersion est renforcé par l'histoire qui elle même se divise en deux parties distinctes. De la même façon que pour A Link To The Past et son monde des ténèbres opposé à celui de la lumière, Ocarina Of Time nous offre un Hyrule dévasté 7 ans plus tard. Pensez bien que si on a flâné dans Hyrule avec Link enfant on va faire la même chose avec Link adulte, parfois la boule au ventre, inquiet du sort des Hyliens. Et surtout, l'impatience de découvrir des lieux inaccessibles jusque là provoque une satisfaction toute juvénile.
Ensuite, Ocarina Of Time nous séduit par son ambiance et ses musiques. Jusqu'ici, je n'avais jamais vu des thèmes musicaux si bien distribués. Chaque personnage important a le sien, chaque lieu également. Les différentes cinématiques arrivent à nous émouvoir, comme la séquence de la mort de l'arbre Mojo ou de la fuite de Zelda. Les effets sonores sont un coup de maître dans leur globalité.
La visée « Z » comme elle était appelée, nous donne une maniabilité simple et intuitive, Nintendo a fait les bons choix en supprimant le saut comme dans A Link To the Past. L'ingénieuse manette N64 est utilisé comme jamais. Tout est placé de façon évidente et la prise en main n'est pas laborieuse. Quand on prend la manette, on sait jouer. C'est d'ailleurs la force de Nintendo sur bien d'autres jeux.
Et quand on replace Ocarina Of Time dans son époque, il faut aussi voir que l'attente était terrible mais parfaite. Je ne sais pas si c'était volontaire, mais les images sortaient au compte goutte sur nos magasines, le jeu a été retardé maintes et maintes fois et depuis sept ans les fans (dont moi) attendaient un nouveau Zelda. La 3D balbutiait et l'inquiétude se mêlait à l'attente. Le coup de maître de Nintendo c'est qu'à travers la création d'un univers original, vaste, varié et crédible, ils ont réussi en plus à flatter le fan à travers de nombreux clin d'oeil (le monocle de vérité, erzats du miroir magique, les tuniques de Link, les différentes flèches et les musiques bien sûr). L'équipe Nintendo avait besoin de prouver qu'ils étaient toujours les meilleurs, on peut dire qu'ils n'ont pas loupé leur coup.
Alors, si Ocarina Of Time est revendiqué par de nombreuses personnes comme le « meilleur jeu de tous les temps », ce n'est pas par phénomène de mode, ce n'est pas par effet de masse, mais par une alchimie parfaitement orchestrée entre les attentes des joueurs de l'époque et le jeu en lui même. C'était ça qu'il nous fallait, qu'on attendait et on l'a eu.
Comme je disais en préambule, un jeu culte n'est pas exempts de défauts mais il est la représentation d'un aboutissement à un moment T. Cependant, ce qu'il y a d'assez fort, c'est que la magie opère encore aujourd'hui. Quand je lis, à droite à gauche sur ce site les gens qui découvrent tout juste Ocarina Of Time et qui n'en reviennent pas, je me dis que sa réputation n'est pas usurpée.
Je ne m'aventurerais pas à dire que si il ne devait en rester qu'un ce serait celui-là, mais il est un indéniable monument du jeu vidéo par bien des aspects. Il laisse une empreinte de légende éternelle et accomplie. On assiste à la naissance d'un monde et si nous ne faisons rien, ce monde sera détruit. Alors Nintendo utilise toutes les ficelles pour nous accrocher à cet univers pour que le joueur n'ait qu'une seule envie : sauver les Hyliens des griffes de Ganon.
Si ce jeu « a su cristalliser toutes les qualités des jeux précédents pour en faire une aventure inoubliable » c'est aussi par une accroche efficace des mythes et des légendes qu'il se démarque, car en y jouant, c'est nous qui rentrons dans la légende de ce monde.
On se sent vivant en jouant à Ocarina Of Time. Nous marchons à côté de Link, nous chevauchons Epona à travers la plaine pour le plaisir, nous nageons dans le Lac Hylia à l'eau si pure et nous nous émerveillons d'un lever de soleil pixelisé dans le désert Gérudo. Entre deux parties de pêches, on peut choisir de s'attaquer une bonne fois pour toute à ce maudit temple de l'eau pour en finir avec les malédictions de ce monde. Peu de jeu vidéo m'ont offert une immersion si aboutie.