Pour le même prix, offrez-vous plutôt l'intégrale de Jean Roucas
De toute part on assiste à des critiques dithyrambiques à propos de TSP. Et durant la première demi-heure on en vient à croire qu'elles sont justifiées.
En effet, les sourires ne se font pas prier. Le concept fait mouche d'emblée lorsque l'on assiste à la narration édulcorée de chaque action ou choix que l'on réalise. La ficelle de l'humour résidant sur la façon dont se démène ce narrateur omniscient pour tenter de conserver une trame de récit cohérente quand à contrario le joueur, lui, cherche par tous les moyens à le piéger en adoptant des comportements improbables. Et lorsque la rupture du duo est consommée, on se délectera allègrement des sarcasmes et autres jets d'amertume ou de cynisme dudit narrateur.
L'idée est extrêmement séduisante. Et passé le prologue on se retrouve parfaitement conditionné et prêt à vivre une expérience loufoque exceptionnelle !
A moins que.... non ? Vous êtes sérieux ? Vous voulez dire que ce petit prologue correspond à la totalité du jeu ?
Voici là probablement la plus mauvaise blague du jeu: il se termine au moment même où l'on s'attend à le commencer !
La ligne droite n'excède pas 5 minutes. Bien entendu tout l'intérêt est de recommencer ce maigre parcours de nombreuses fois, avec l'objectif de traquer la moindre permissivité de choix différent, et ce en vue de déclencher une nouvelle boutade narrative jusqu'alors inconnue.
Et sur cet aspect effectivement l'affaire est bien gérée car presque rien n'a été laissé au hasard et il est quasi impossible de piéger le jeu.
D'accord, mais y a t-il pour autant matière à crier au génie lorsqu'on s'est contenté d'étudier et de cloisonner toutes les possibilités d'une zone d'exploration aussi ridiculement petite et linéaire? A la limite on aurait pu souligner l'effort pour un titre qui se présenterait modestement sous le format d'un petit jeu flash gratuit. Mais c'est pourtant loin d'être le cas. En effet le jeu n'est pas gratuit ; et il n'appartient pas non plus à la première tranche des jeux indépendants qui s'acquièrent à 2 euros. Non, TSP pousse la plaisanterie (et la prétention) de se monnayer à 12 euros !
Alors dans la mesure où le contenu technique et matériel est totalement inexistant (et ce n'est d'ailleurs pas le problème), on trouve au final la note de la blagounette un peu salée.
Certes, ceux qui se se prendront au jeu de traquer « la petite phrase narrative cachée » pourront prolonger l'expérience sur une durée de 3-4 heures au grand maximum, mais est-ce une carotte suffisante pour pousser jusque là ?
Par conséquent comment comprendre un tel engouement de la part des joueurs et de la presse ?
Par l'idée que le jeu met en scène les stéréotypes des comportements des joueurs chevronnés. Wouaaaahou ! Et après ? Parce qu'il est supposé solliciter un peu plus la méta-réflexion qu'un zombie-shooter lambda, il conviendrait par conséquent de le sanctionner du Prix Nobel ? Dans ce cas vivement l'adaptation vidéoludique du Cogito, ergo sum de Descartes pour un succès assuré.
Parce qu'enfin excusez-moi mais TSP n'a pas inventé l'eau chaude. Les jeux indépendants qui surfent sur la mode de la parodie, de la critique ou de l'auto-dérision commencent à s'amonceler!
Et sauf à imaginer que le prix du titre fait intégralement partie du concept sur lequel repose l'efficacité de la thérapie (visant, dans un second lieu, à souligner la stupidité du consommateur à manquer d'exigences sur le contenu des produits), il n'est objectivement pas possible d'y trouver la moindre légitimité. De toutes façons, même l'exploitation d'un tel vice n'aurait rien de novateur, car rappelons qu'en 1986 Takeshi Kitano avait déjà choisi de se moquer des joueurs en exprimant ouvertement sa haine des jeux vidéos sur sa conception d'un jeu NES.
En résumé, on ne peut guère recommander autrement TSP qu'à travers une offre promo Steam à -75 % (et c'est encore trop), histoire d'avoir matière à tuer une heure ou deux au bureau entre deux parties de Solitaire.
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