Découvert par un complet hasard au cours d’un des nombreux évènements Steam mettant en avant une liste de démo jouable de jeux à sortir long comme… eh bien long comme une liste de jeux sortant sur Steam, The Sundew c’était montré le temps d’une courte démo d’une vingtaine de minutes mettant en avant la première scène du jeu. Suffisant en tout cas pour valoir un clic rapide et sans hésitation sur le bouton « Wishlist » de la page magasin du jeu. Quelques mois plus tard, et sur toute sa longueur, The Sundew vient-il confirmer ses promesses ?
The Sundew est le premier jeu du studio 2054, studio composé… d’une seule personne, Agnès Vuillaume (sous le pseudo de Clemenc), où vous contrôlez Anna, une cyber-policière évoluant dans un Japon Cyberpunk à la Blade Runner. Un univers qui restera on ne peut plus classique pour tous les amateurs du genre, sans vraiment apporter du neuf à la formule, ce qui en soit n’est pas vraiment un souci, mais est à savoir. Le “Dark future” est là, et Anna est une « super cop » augmentée, pleine d’implants cybernétiques et dotée d’une force suffisante pour malmener plusieurs gardes robots humanoïdes quand il s’agit de se plier à la « visite médicale » un peu invasive imposée par son employeur.
Vous l’aurez compris, The Sundew est donc la dernière entrée dans la catégorie Point & Click (P&C) néo-rétro, un genre incarné par des studios comme l’inévitable Wadjet Eye Game (Blackwell, Technobabylon…), les britanniques de Cloak and Dagger Games (Football Game ou le futur INCANTAMENTUM) ou encore Clifftop Games (Kathy Rain), qui avaient participé au « retour » du P&C après la énième mort annoncé du genre.
Le jeu débute avec Anna se réveillant chez elle, au côté de sa dernière conquête de la veille, par un appel urgent de sa chef passablement irritée. Elle doit se rendre au centre de police dès que possible. Un dimanche matin en plus, ce n’est pas une vie ! C’est néanmoins l’occasion d’apprécier la sublime vista sur la ville futuriste observée depuis son balcon. Parlons d’ailleurs de l’aspect visuel, The Sundew est résolument rétro dans son habillage, prenant plus une esthétique peut être plus daté que pixel art chiadé comme on peut en trouver dans les dernières productions Wadjet Eye Games par exemple. A ce niveau c’est plutôt réussi, rien ne vient gâcher la vue sans non plus venir flatter la rétine, à l’exception de quelques tableaux vraiment réussis (comme la vista du début). Ça reste souvent basique, mais jamais dérangeant et dans l’ensemble très agréable (pour peux que l’on adhère au style évidemment). On pourra peut-être lui reprocher le visage d’Anna qui semble un peu disgracieux.
Au niveau des puzzles, The Sundew fait le très bon choix de s’inscrire dans ces jeux qui arrivent à créer des énigmes accessibles, dans lesquelles on est rarement bloqué longtemps, tout en nous donnant la sensation d’avoir dû réfléchir un minimum et d’avoir réussi à surmonter la difficulté. Un numéro d’équilibriste très compliqué à maîtriser (les Blackwell sont souvent un modèle la dessus) et qui ici est plutôt réussi. On progresse à un bon rythme, sans rarement être frustré par une énigme où sur les choses à faire (mention spéciale à l’avant dernière zone du jeu, probablement la plus grande). Très bonne idée du jeu d’ailleurs d’intégrer à l’interface cybernétique d’Anna un résumé de ce qu’il s’est passé jusque-là sous forme de journal personnel, ainsi qu’une « Todo list » afin de toujours avoir en tête ses objectifs et sa progression. C’est souvent un défaut récurrent des P&C, définir les objectifs à long et court termes, et les garder à l’esprit du joueur. Autre très bonne idée, si comme c’est le cas dans tous les P&C moderne on peut afficher les zones interactives à l’écran, ici on n’affiche pas la totalité des zones à la fois, mais elles sont séparées par type avec un bouton pour afficher les objets avec lesquels on peut interagir, un pour les zones de sortie d’écran, un pour les dialogues...
Mais si The Sundew évite certains « tropes » du genre, il n’évite pas cependant celui des énigmes à scripts déclencheurs illogiques. Je parle de ces passages où il vous semble avoir tout fait correctement, mais qu’un événement ne se produit pas, simplement parce que le script déclencheur de son apparition prévu par le jeu est lié à une action très spécifique. Un exemple (spoiler léger d'une énigme du début du jeu),
dans la première zone du jeu (passé la démo), on vous donne de l’équipement à confier à l’agent s’occupant de l’accueil du centre de police, ainsi que des fléchettes à faire remplir de tranquillisant au préalable. Logiquement on pourrait vouloir d’abord remplir les fléchettes avant de rendre tout l’équipement d’un coup. Sauf que le script faisant apparaître un personnage nécessaire pour remplir ses fléchettes ne se déclenche que si… l’on donne une partie de l’équipement (et également qu’un autre objectif soit atteint).
Ce qui a pu bloquer pas mal de personnes si on en croit le forum Steam. Quoiqu’il en soit, ce genre d’erreur reste ici assez rare, et pour la plupart le jeu fait l’effort d’indiquer ce qu’il faut faire pour déclencher la suite des évènements. Finalement, le jeu propose également une chasse au collectible complètement facultative et sans impact sur le scénario, mais plutôt amusante (il s’agit notamment de trouver des “space invader” cachés dans le décor).
Si l’histoire reste classique et plutôt satisfaisante, avec son lot de twists habituels, le ton de l’écriture risque de parfois surprendre, en étant souvent assez léger malgré les évènements et un univers qui ne s’y porte pas forcément. On trouve également quelques références et clins d’œil à notre monde (bonjour Call Of Booty 6), mais ça reste fort heureusement souvent restreint à des dialogues plus secondaires. On regrettera une fin un peu rapide, et un manque d’infos sur ce qui est arrivé à certains personnages. Le jeu possède 3 fins différentes qui sont cependant plus proches de ce qu’on appelle la fin à boutons, où c’est surtout le choix final qui décidera de la fin obtenue (à une subtilité près). On notera cependant que le jeu à une VF native, et donc de qualité. C’est assez rare pour être noté. Pas de soucis donc pour les personnes n’ayant pas un niveau d’Anglais suffisant.
Conclusion :
Sans atteindre les sommets des nouveaux classiques de la « nouvelle » vague des jeux Point & Click néo-rétro tel qu’un Technobabylon avant lui, The Sundew reste une entrée plus qu’honorable dans cette petite famille. C’est d’autant plus méritant pour un premier essai porté par une développeuse seule. On regrettera certes quelques erreurs de jeunesse, notamment au niveau des déclencheurs de scripts à certains moments, mais le jeu garde une progression fluide grâce à un bon dosage de la difficulté de ces énigmes et du rythme de sa narration. Son plus gros défaut restera finalement de n’être pas aussi mémorable qu’on l’aurait voulu. Il fait presque tout bien, mais sans jamais vraiment se démarquer. Il n’en reste pas moins un titre très agréable, et on aurait bien aimé un peu de rab au 4-5 heures nécessaires à terminer l’aventure (comme en apprendre plus sur le sort de personnages rencontrés au cours de l’aventure). Mais au final, si on en demande plus, ne serait-ce pas là un bon indicateur de la qualité du titre ?