Commençons par ce qui revient le plus autour du jeu, la comparaison à Portal. Celle-ci est à mes yeux caduque : le seul point commun, c’est qu’on enchaîne des salles avec puzzles sur un fond thématique d’IA. Ici pas de notions de physique dans les énigmes, pas de sentiment de casser le jeu en sortant des laboratoires, et pas la même ambition narrative. C’est juste un jeu de réflexion qui a une structure de progression similaire.
Le bébé de Croteam est une succession de chambres à énigmes, réparties par paquet de 4-5 dans des hubs instanciés. Il s’agira le plus souvent d’ouvrir des portails permettant de récupérer des blocs de Tetris, en connectant des rayons colorés ou en activant des boutons au sol. La difficulté est progressive, notamment via l’ajout pas à pas de nouveaux objets, multipliant les combinaisons possibles et donc les pistes de réflexion au fur et à mesure que l’on progresse. Sur la trentaine d’heures nécessaire à en voir le bout, on aura souvent peu de mal à comprendre ce qui est attendu de nous, mais il arrive parfois que l’on bute et que l’on passe une demi-heure à tâter. La difficulté est bien dosée, et le sentiment de réussite lorsque vient le moment Eurêka est plaisant. Une réussite en tous points. Du moins, sur les énigmes permettant de finir le jeu en ligne droite. Car lorsque vient l’heure de collecter toutes les étoiles, c’est une autre paire de manches. Certaines sont assez simples, mais d’autres demandent d’avoir une vision plus large, notamment lorsqu’il s’agit d’envisager le hub comme un terrain de jeu propre. J’avoue avoir sorti la solution pour certaines d’entre elles où je ne savais même pas où l’étoile pouvait se trouver. Mention spéciale à cette étoile demandant de trouver un texte qu’il faudra convertir de votre côté depuis une table ASCII sans que l’on puisse sans douter à part en ayant des connaissances informatiques plus poussées que le tout venant : great !
Outre une voix omnipotente intervenant de façon parcellaire au cours de nos pérégrinations, la narration se fait principalement via des ordinateurs que l’on trouve dans les différents hubs du jeu. J’ai majoritairement lu en diagonale, les moniteurs nous lâchant des énormes pavés textuels, mais j’ai parfois pris le temps de tout lire, notamment sur ces petites trouvailles telles que l’insertion d’un test de personnalité ou d’un jeu d’aventure textuel. Globalement, on est sur des questionnements philosophiques habilement amenés, brassant tant la définition de conscience et de personne, que des sujets comme la moralité ou le libre arbitre. Des thèmes classiques dans ce champ d’étude, mais abordés avec une pointe d’humour et un didactisme bienveillant. On est loin du snobisme volontairement alambiqué pour rien d’un The Witness.
A côté de ça, la DA est assez austère, avec quelques changements de biomes sans différences fondamentales dans leur structure. The Talos Principle n’est pas très beau, même pour 2014, le moteur Serious Engine ressemble à du Source, déjà daté à l’époque. Les musiques sont discrètes mais reposantes et de plutôt bonne facture.
En somme, le jeu est un très bon puzzle-game qui ravira les joueurs de tous bords et qui se dote d’un fond bien amené. Il a une identité singulière qui fait de lui un cador du genre, et à l’heure où j’écris ces lignes, la suite très attendue vient de sortir (sous Unreal 5), après 9 années. J’espère que celle-ci se révélera toute aussi bonne, car c’est certain que je m’y attellerai un jour.