C'est en cette fin de mois de mai 2022, à l'aulne de l'été, de la période estivale, des fins de scolarité, des résultats de concours, et donc des premiers départs en vacances...que je me suis lancé, faute de nouveautés alléchantes, bien chargé en titres dits de bas de catalogue, toujours motivé pour les œuvres considérées comme majeures, avide de propositions singulières, dans ce fameux "The Witness"...sortie en 2016, création du talentueux Jonathan Blow, papa de "Braid"...qui m'avait enchanté et touché, bien qu'un peu retord...avec un peu d'appréhension, de crainte et de peur...notamment vis-à-vis des mythes et mystères entourant ce jeu conceptuel, de cette relecture de l'apprentissage, de cette réflexion sur la découverte mais furieusement engagé à en découdre avec eux, à les debiaboliser afin de m'amuser avec eux...à l'instar d'une veille du départ, seul, sans amis, loin de chez soi et de ces routines, totalement dans l'inconnu, vers une mystérieuse colonie de vacances, piffée au hasard....
C'est après un simple écran titre, un simple faisceau lumineux, que nous voilà sortant d'une simple caverne...voyez la référence...débarquant sans une once d'explication, de guidage, d'information sur un premier environnement, cloisonné de toute part, sorte d'espace lounge typique des roof-tops New-Yorkais...simpliste au niveau technique mais étonnamment dense, varié et coloré...et qui après quelques minutes d'exploration, toujours en solitaire, sans aide, se décloisonne, s'entrouvre, se révèle, se raconte, se densifie, offrant moulte ouvertures, moulte couloirs, moulte lecture...et permettant au joueur, le tout dans un seul environnement, de comprendre, de décoder, de lire, de s'amuser et de s'attacher à cette proposition visuelle, ce level-design, ce sens de l'affordance, ce goût pour le mystère...volontairement suggéré, tout en Low-poly...le tout sublimé par une direction sonore misant uniquement sur l'intra-diegetique...caressant doucement nos sens, jouant avec nôtre intelligence, troublant nôtre sensibilité, titillant nôtre curiosité, alimentant nôtre goût pour l'errance...sentiment et sensation largement renforcé par la suite, au sein de cet open-world, de cette île mystérieuse, de cette miniaturisation de notre monde, ce labyrinthe métaphorique, ce portofolio culturel, le tout avec peu, dans un seul et même lieu...m'évocant mes souvenirs d'antan, enfant au sein d'un camp de vacances...où avec trois bouts de ficelles, mais avec beaucoup d'imagination...on transformait un vulgaire local en une capsule voyageant à travers le temps et l'espace....
C'est après un simple verrou numérique, un simple écran verdâtre tactile, une simple ligne droite...avec son départ et son arrivée...nous obligeant à interagir avec, sans une once d'explication, de pédagogie, d'information, offrant donc un premier puzzle d'une simplicité enfantine, d'une interaction dès plus basique, d'une maniabilité limitée, étrange de prime abord mais finalement idéal pour digérer et appréhender les rudiments du gameplay...ouvrant sur le premier environnement, ce fameux roof-top...où plusieurs écrans, plusieurs puzzles...certains reliés, d'autres non...certains clairement disposés, d'autres plus élégamment cachés, certains sensés, d'autres plus obscures, toujours sans aide ou prise en main...à la difficulté évolutive, aux variations surprenante, aux résolutions multiples...jouant avec nôtre intelligence, nôtre observation, nôtre sens de l'analyse, nos sens, nos émotions...provoquant chez nous une immédiate envie d'en résoudre le plus, d'en découvrir davantage, d'en fantasmer d'autres, d'en espérer conclure seul...sentiment et sensation, qui croyez moi va furieusement s'intensifier au fur et à mesure de vôtre parcours, de vos diverses perenigrations...le tout en cohérence et consonance avec les différents biomes où ils sont disponibles, de manière libertaire et non-linéaire, de manière non-punitif et non-bloquant...permettant à chacun de les entreprendre comme bon nous semble, de les tenter sans s'épuiser, de les arrêter et les reprendre à l'envie...bien aidé par la liberté offerte par cet open-world et des autres propositions qu'il offre...ayant chacun thématique, vision, concept...un sentiment de variété et de générosité gratifiant, avec peu...m'évocant ces souvenirs que m'ont laissé ces longues périodes estivale, au sein d'une colonie de vacances où pour casser la monotonie, on s'imaginait, on créait chaque jour, diverses activités...pas toujours égales...mais toujours avec passion et toujours avec trois bouts de ficelles....
C'est après le démarrage quasi directe de l'application sur PC, dévoilant d'étranges voire abstraits symboles, nous conditionnant immédiatement dans un univers, un récit obscure, énigmatique et terriblement envoûtant...sans texte, sans parole, sans incarnant...misant davantage sur le visuel du décors, les sonorités environnementales, le gameplay progressif...qui paraît nous laisser comme n'être qu'un simple témoin de ceux-ci...mais qui au fur et à mesure de notre exploration minutieuse, de la résolution des biomes, de nos actions influant sur cette île...nous bascule tout d'un coup dans le rôle d'un véritable acteur...à la fois à travers des enregistrements audio, nous parlant directement autant que mettant en scène le thème lié à sa situation géographique via de célèbres citations ou de paroles plus usuelles...à travers l'architecture, les statues, les monolithes et les infrastructures égrenées ça et là, mais aussi sa géographie, laissant place à nôtre interprétation...à travers les différentes activités, alimentant nôtre imaginaire...à travers son menu et nos différentes sauvegardes, retraçant intelligemment nos réussites antérieures...une cohérence ludo-narrative misant autant sur l'intra-diegetique que l'extra-diégetique...sur la vue et l'ouïe..sur l'action et l'inaction...nous offrant différentes métaphores, réflexions, allégories...notamment la culture, la nature, la technologie, la science, la spiritualité, l'art, l'économie, la société, donc au final l'humanité, à travers ces plus belles réussites, ces moments de doute et ces terribles échecs, a l'instar du joueur que nous sommes...jouant avec nos émotions, notre intellect, nos fantasmes, nos acquis, nos connaissances, nos convictions, nos certitudes, notre goût pour l'enrichissement personnel...sentiment m'évocant ses longues soirées autour d'un feu de camps, armé de marshmallows grillant sur de frêles bâtons de bois, où l'on se racontait moulte histoire, où l'on écoutait...rêveur, attentif, curieux un organisateur clope au bec, lisant un poème, roman ou grattant une vielle guitare...
C'est après une simple semaine, de simples heures, une simple conclusion, matérialisée ici par cette montagne enneigée, trônant fièrement, énigmatique, objectif clairement défini au début de notre arrivée...sans GPS, sans pointeur, sans journal de quêtes, sans tutoriel, sans hiérarchisation narrative, sans amoncellement d'activités secondaires ou de toute surenchère malvenue...temoin privilégié retraçant nôtre parcours, notre périple, notre aventure ayant accouché de nombreux sentiments, défis et amusements, de nombreuses sensations, prises de tête et gratifications...que témoignage de tout le processus, le parcours, le périple créatif ayant accouché de ce jeu, de cette réflexion, de cette proposition singulière, sensée, vivifiante et bienveillante...m'évocant pour le coup, cette ultime journée, où le responsable d'un camp d'été récompensant les meilleurs dentre-nous, où seul devant sa valise, on se remémore nos jours précédents, où tous ensemble on célèbre une dernière fois cette amitié et ce partage créé le temps d'un éphémère séjour...avec ses hauts et ses bas, parfois simple...parfois compliqué...par moment en solitaire...par d'autres soutenu...souvent bien préparé...des fois à l'arrache...à l'instar de mon vécu au sein de cette île virtuelle, où je fus témoin de mes limites, assisté pour les dépasser et au final acteur de ma réussite et mes 500 puzzles, satisfaisant pour moi...me laissant enivré et repus de celui-ci....admiratif et aimant de la démarche de Blow...marqué et touché à jamais par ce jeux...que je considère comme un chef-d'œuvre artistique, intellectuel et ludique d'une rare finesse, d'une exceptionnelle conception, d'une singularité intemporelle, d'une métaphore universelle...bref un truc qui n'arrive pas souvent, souvent trop court, court mais fondateur, qui continuera à alimenter mes rêves...à l'instar de mes chères colonies de vacances, imparfaite mais humaine, durement, généreusement financées et organisées par le comité d'entreprise de ma tendre maman.............