Karl Marx et Adam Smith sont dans un bateau, le joueur se jette à l'eau
Bourré de fausse complexité (genre je noie le joueur sous des nuées de chiffres dont les trois quarts sont inutiles, tout en en omettant d'autres qui, eux, aideraient pourtant bien), de biais non explicitement assumés dans son approche des mécanismes économico-politico-socio-culturels, de choix de game design à la fois abscons et aberrants (par exemple le mécanisme de production d'unités militaires), et j'en passe, Victoria II, qui se voudrait la simulation géopolitique ultime sur l'une des périodes, de ce point de vue, les plus intéressantes de l'histoire de l'humanité, est surtout une ode surréaliste à la frustration.
Obligeant, quasiment pour tout, à n'utiliser que de moyens extrêmement indirects pour tenter d'influencer le cours des événements, il met le joueur dans un rôle de spectateur presque impuissant, de façon souvent totalement absurde, tout en lui agitant en permanence sous le nez des promesses qu'il ne tient pas. Et le laissant rêver à ce que pourrait vraiment être un jeu digne de ce nom, qui maintiendrait une telle ambition et un tel niveau de détail, sur cette période passionnante.
Si l'on rajoute à tout ça, entre autres, une stabilité toute relative, une interface passablement indigeste, et des tutoriels qu'on ne peut même pas terminer à cause des changements, non signalés, effectués par les patchs ultérieurs, le principal intérêt du jeu provient surtout du souffle historique qu'il sait malgré tout, par moments, faire un peu ressentir, notamment grâce aux mini-bios des grands économistes, philosophes, etc., qu'il distille à l'occasion. Cher payé pour une version vaguement ludique, pour les masochistes, de Wikipedia...