Après un Death Come True sympathique bien que pas exempt de défauts, le jeune studio nippon Too Kyo Games rempile aujourd’hui avec World’s End Club. Anciennement connu sous le nom de Death March Club, le titre a finalement été publié fragmenté sur Apple Arcade, puisque seule sa première moitié était jusqu’à maintenant disponible. Avec la sortie d’une version Switch, l’œuvre est désormais complète, l’occasion d’enfin voir dans sa totalité le résultat du travail conjoint de Kotaro Uchikoshi et Kazutaka Kodaka, papas respectifs de, entre autres, Zero Escape et Danganronpa. Des noms réputés, un palmarès reconnu, est-ce suffisant pour garantir une œuvre qualitative ?
Saw à la cool
World’s End Club se déroule au Japon, en 1995. En route pour ce qui ressemblait à une paisible excursion scolaire à Kamakura (qui, rappelons-le, est une bien belle ville), le bus du Club des Battants se retrouve soufflé par une puissante explosion, laissant la douzaine d’ados inconsciente. Ils se réveillent alors dans d’étranges cuves, emprisonnés dans un parc d’attraction désaffecté par une étrange mascotte-clown répondant au nom de Pielope. Cette dernière, légèrement psychopathe sur les bords, les soumet à un jeu d’élimination. Pour espérer survivre, ils doivent évincer leurs amis. Autant dire que le lien indéfectible qui unissait les Battants jusque-là va prendre rapidement beaucoup de plomb dans l’aile. Mais les apparences sont parfois trompeuses et ce petit jeu morbide prend rapidement fin, laissant le groupe découvrir qu’ils se trouvent désormais à 1200 kilomètres de chez eux et, accessoirement, que le monde tel qu’ils le connaissent n’existe plus.
L’apocalypse, version tour operator
Véritable pied de nez aux habitués des productions Uchikoshi et Kodaka, le jeu d’élimination qui sert de prémisses à World’s End Club ne constitue pas le cœur du jeu. C’en est même le contrepied, tant le cocktail habituel à base de mascotte creepy, huis clos, paranoïa et meurtres en série s’efface rapidement. En lieu et place se trouve donc un road trip d’un groupe d’amis soudés et bienveillants, bien plus léger tout post-apocalyptique soit-il. L’objectif du Club des Battants est simple : parcourir le Japon d’Ouest en Est afin de rallier la capitale tout en essayant de trouver d’éventuels survivants dans les villes traversées, non sans y faire un peu de tourisme et discuter de spécialités culinaires locales. Le titre se structure ainsi autour de leur périple, présenté sous la forme d’une frise chronologique linéaire, elle-même segmentée en chapitres de trois types différents. On se retrouve donc avec un cloisonnement entre action et narration, avec d’un côté, les séquences de plateforme estampillées “Act” et de l’autre, un développement du récit regroupé dans les phases “Feux de camp” et “Scénario”.
Le club des douze
Pensé comme un hybride entre jeu de plateforme et Visual Novel, le côté action de World’s End Club prend donc logiquement la forme d’un plateformer. Les phases d’action sont bâties sur le même schéma tout au long du jeu. Au fil de l’aventure, les membres du Club de Battants vont chacun développer une capacité spéciale qui est alors exploitée durant des séquences linéaires en 2.5D. Le joueur y incarne majoritairement Reycho, le leader officieux du groupe, mais est régulièrement amené à changer de protagoniste selon les situations. Avec une telle brochette de personnages, on aurait pu espérer un level design astucieux, faisant la part belle aux énigmes exploitant les capacités de chacun des membres du groupe, voire même proposant certaines situations où il aurait été question de les utiliser de concert. Malheureusement, l’ensemble semble manquer cruellement de moyens et ces phases s’avèrent extrêmement dirigistes, ne laissant jamais la main au joueur quant au personnage incarné. Pire, une grande majorité des pouvoirs ne se résume finalement qu’à divers moyens de frapper les quelques ennemis qui se présentent sur la route du joueur et les autres se révèlent cruellement sous-exploités et/ou mis en œuvre de façon maladroite. En découle une redondance prononcée, renforcée par une latence des contrôles assez pénalisante qui ne manquera pas de provoquer son lot de Game Overs.
“PEGI 16 ? Pourquoi PEGI 16 ?”
Si côté plateforme pure, le constat s’avère mitigé, World’s End Club est aussi un Visual Novel, et peut donc espérer compenser ses lacunes ludiques par son écriture. La partie narrative constitue ainsi le plus gros du titre et se présente sous la forme de feux de camps et de cinématiques. Les premiers permettent au casting de gagner en épaisseur au travers de quelques courts dialogues aussi légers que facultatifs, tandis que les seconds sont focalisés sur le développement du scénario et la prise de décision. Les gamins n’étant que rarement d’accord quant à la meilleure façon de rejoindre la capitale, le groupe se sépare ponctuellement, laissant ainsi au joueur le choix de l’itinéraire qu’il souhaite suivre. L’âge du casting est toutefois à double tranchant. Si on apprécie une caractérisation des personnages un peu moins mono-dimensionnelle qu’à l’accoutumée (sauf toi, Mowchan, toi on te juge), on soupire souvent face aux gags qui tombent (trop) souvent à plat, aux motivations puériles, surtout compte tenu du contexte, et aux retournements de situation propulsés au pouvoir de l’amitié. Plonger dans l’océan afin d’éviter la noyade à bord d’un navire en train de sombrer au cœur d’une tempête, avec un camarade inconscient à transporter ? Aucune raison que ça finisse mal.
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