Critique de X2 par Kamuishirow
Oui effectivement, pas de relief.
Par
le 29 juil. 2013
1 j'aime
1
Non mais regardez moi ça ! Regardez moi ce gâchis construit dans un bel écrin. C'est quoi ce shoot mal branlé, fait par des types qui, visiblement, n'ont pas saisi ce qu'était un shoot sur console. Ouaip, désolé de rentrer dans le vif comme ça, mais les attentes entre un joueur console et un joueur micro concernant les shoot'em up ne sont visiblement pas les mêmes. Je vous préviens tout de suite cette critique risque de donner des boutons aux fanboy agressifs de l'Amiga.
Project X2, ou X2 No Relief ou X2 tout court est la suite directe de Project X shoot célèbre publié sur Amiga en 1992 et quasi inconnu de la scène console. Véritable révolution sur Amiga, aux cotés de Xenon 2 et Battle Squadron, ce shoot s'est construit sa réputation sur l'absence de shooter de qualité "console" sur cette plate-forme. Non pas que l'Amiga manquait de shoot, au contraire même. Mais la grande majorité d'entre eux manque cruellement d'inspiration. Leur réalisation est plate et sans effort, rien ne les démarque des shooter trépidants du monde de l'arcade et des consoles. C'est dans ce contexte qu'est arrivé Project X tel un messie apportant enfin qualité et surtout un gameplay digne de ce nom. Ce jeu restera longtemps comme la référence en terme de shooter sur Amiga sans toutefois atteindre la qualité des productions console. Fort de ce succès le développeur Team 17 rempila pour sa suite en 1996.
Pour cette séquelle Team 17, que l'on connais surtout pour sa série Worms, "laisse tomber" sa plate-forme de prédilection, l'Amiga, pour développer cette suite exclusivement pour la nouvelle arrivée de Sony : la Playstation. Commercialisé indépendamment par Ocean et dans la plus grande indifférence, sans aucun support de la part de Sony, Project X2 fut l'un des premiers titres de la console. A la différence des jeux "officiels" estampillés "Playstation" le jeu était packagé dans un boîtier double CD anonyme à la façon du Mega-CD. Peu couvert dans la presse de l'époque, absent des catalogues officiels de Sony et n'étant pas un jeu à vendre en priorité, car indépendant, Project X2 passa plutôt inaperçue. Surtout face à un Raiden Project qui offrait enfin une conversion parfaite de l'arcade. Résultat : le titre fit un bide total dans la plus grande ignorance. Toutefois les raisons de cet échec ne proviennent pas uniquement de la mauvaise exposition du jeu mais aussi du syndrome "micro" qui transpire de ce titre.
En effet, Project X2 avait tout pour plaire. Première constatation, le jeu dispose d'une excellente réalisation mettant en avant les capacités techniques de la PSX en matière de 2D. Il est l'un des titres les mieux réalisé de son époque. Il démontre que malgré l'avènement de la 3D, Sony n' a pas délaissé la partie 2D de sa console. Project X2 fait parti de ces jeux qui en ont mit plein les mirettes aux joueurs fraîchement sortis de l'ère "16 bits" et dépucelés aux graphismes ultra colorés, aux effets de blending à gogo et à une pluie de sprite à l'animation chiadée. X2 est une véritable démo technique de ce que sais faire la console. Zoom, rotation, distorsions, scrollings sur plusieurs plans tous aussi colorés les uns que les autres. C'est fluide, bien animé et ça ne ralentit jamais. Le petit plus, une introduction spectaculaire de 3 minutes d'une qualité top jamais vue à l'époque. X2 a été l'un des porte-étendard d'une des spécialités qui on fait le succès de la PSX : la décompression vidéo (avec Krazy Ivan). L'ouverture du jeu offre une synthèse rythmée qui met tout de suite l'eau à la bouche. Bien que l'on ne comprenne pas trop ce qu'il s'y passe, on constate avec plaisir que Team 17 n'a pas chaumé sur la qualité de mise en scène audio et vidéo. On sent bien que derrière ce jeu il y a une équipe provenant du monde micro, que ces origines les ont naturellement poussées à exploiter au mieux les capacités offertes par la PSX. Ils en auraient fait de même pour tout autre support. La Saturn, d’ailleurs, fut en lice pour accueillir une version du jeu. Mais celle-ci fut annulée suite à l'échec commercial de Project X2. Les causes de cet échec ? Également les origines micro des développeurs qui ont conçu un gameplay et un design austère et dépassé.
Avant Project X, des séries comme Aleste, Parodius, Thunder Force, Silpheed, Axelay, Gunhead, Sprigan, Gradius et autres R-Type ont su renouveler le genre en y apportant un gameplay rythmé, équilibré et juste. Pour certains autres, une mise scène extraordinaire ou un rythme de jeu trépidant. Tous n'ont pas été des étalons technique tel que Project X, mais chacun d'eux a apporté ce qu'il faut pour être un jeu plaisant. Même Super R-Type sur SNES, malgré son ignoble difficulté, se trouve être meilleur que Project X2 alors que 5 ans les séparent. Project X2 accumule les défauts du monde micro, époque famélique sur ces supports américains ou il suffisait de commercialiser un jeu, même très moyen, pour qu'il se vende. Certains vont hurler, me maudire, me fustiger mais en 1992 Project X sur Amiga n'a fait sa réputation que parce qu'il était le moins mauvais des shoot sur ce support.
Project X sort en 1992. Mais en 1990 la Megadrive accueillait déjà Thunder Force 3, en 1991 la SNES avait Gradius et R-Type puis Parodius en 1992, Super Star Soldier ou Star Parodia en 90 et 92 sur PC-Engine, enfin R-Type sur Master System... Sur Amiga beaucoup de shoot également mais très peu de concurrence technique. N'importe quel jeu un peu plus peaufiné que la moyenne remportait systématiquement un succès. Par exemple, Shadow Of The Beast a gagné sa réputation sur micro et non pas sur console. Parce qu'il a été mieux réalisé que la moyenne de l'époque sur ces supports. Résultat, il est devenu une référence au niveau de sa représentation graphique et sonore alors que sur console il fut noyé dans une masse de jeux au moins aussi bons voir souvent meilleurs. Les types de la Team 17 ont réalisé Project X2 en pensant que ce qui avait fait le succès de l'épisode Amiga ferait aussi celui de sa suite sur PSX. Mais non, déjà nous n'étions plus sur micro et l'époque kitsch de la SF fantaisie était déjà bien révolue. Ça va vous êtes encore vivant, pas trop énervé ? Alors continuons.
Comment un jeu aussi bien réalisé que Project X2 peut-il être aussi médiocre ? c'est simple, nous avons avec X2 un jeu ultra léché avec un design futuriste digne des illustrations scifi des années 80/90. Beaucoup de décors basés sur des univers fictif fait de beaux ciels coloré avec de jolis dégradés incrustés de soleils étincelants. Ce style SF un peu surréaliste et hors du temps que l'on pouvait trouvé à foison dans les pays occidentaux. Il ne s'agit pas là de représentation nippone, mais bel et bien d'une vision occidentale de la pop culture SF avec des ciels trop étoilés beaucoup plus vrai que nature, des tuyaux et des fils très organique, des donzelles robots aux cyber mensurations parfaites. Autant de choses issues du monde micro qui en 1996 étaient déjà bien kitsch et dont Project X2 est constitué... et qu'Avatar a en partie (le meilleur en fait) remit au goût du jour. Que cela plaise ou pas, le jeu n'en reste pas moins joli et bien animé. C'est surtout ce gameplay issu d'un autre âge qui plombe quasiment tout l'intérêt du jeu.
Généralement, les critères d'un bon shoot'em up sont le système d'armement, la visibilité et la difficulté. Sans parler des bases de tout bon jeu vidéo c'est a dire un gameplay intelligent et une jouabilité qui offre une bonne prise en main. Bah pour Project X2 rien de tout ça n'est respecté. Le système d'armement, en plus d'être assez obscure, est inefficace. Vous ramassez des sphères changeantes indiquant quelle arme vous allez avoir ou faire évoluer si vous l'avez déjà. Le soucis, c'est qu'a chaque nouveau niveau vous obtenez une nouvelle arme rendant la précédente obsolète et que vous n'aviez de toute façon pas eu le temps d'améliorer à son max. A peine plus efficace que la précédente (autant choisir la précédente), elle ne vous sera pas d'une grande utilité puisque les ennemis seront plus résistants dans le prochain niveau. Dès lors, il n'y a rien de gratifiant à évoluer puisque l'armement reste trop faible face à des sprite ennemis plus résistants qu'un bunker. Mais là où la blague devient de mauvais goût, c'est dans le dernier niveau. A votre maximum de puissance vous vous retrouvez encore à galérer sur ces sprite qui, décidément ne crèvent pas. Mais il y a pire, normalement le but d'un shoot est d'anticiper les attaques pour, je ne sais pas moi, admirer le décor ou se placer pour la prochaine vague. Dans X2, ça ne marche pas comme ça. Les vagues ennemies arrivent à l'infinie, s'acharner à nettoyer la zone ne sert a rien. On se retrouve donc a faire des ronds de jambes avec les sprite parce qu'il est inutile de les détruire. Tant que vous ne serez pas sortie de la zone de ce sprite il reviendra sans cesse même si vous lui mettez sa raclée, il faut donc attendre que ça passe. Cela autant avec les vagues classiques de sprite, qu'avec les ennemis seuls mais plus imposant.
On se retrouve donc dans une situation ubuesque où vous devez éliminer des aliens arrivant à l'infinie avec un armement faiblard censé évoluer mais qui se retrouve amoindri à chaque nouvelle arme. Résultat, aucun avantage de faire évoluer l'armement, aucun avantage à détruire les vaisseaux puisqu'il reviendront. Coté carotte Project X2 c'est zéro. Le jeu est réputé difficile, certes, mais c’est une façon polie de dire qu'il est simplement mal foutu. La difficulté dans un jeu c'est un élément propre qui se dose et qui ne doit surtout pas provenir de défauts de conception dans le gameplay ou la jouabilité. Qui à dit Castlevania 1... Mais comme si ce n'était pas assez il y a encore d'autres « petits détails » qui viennent finir d’achever ce jeu pourtant prometteur. La visibilité, là c'est le pompon on ne distingue rien. Ça tire de partout sans que l'on puisse reconnaître de façon claire les tirs ennemis, les votre et le décor dans lequel se fondent des sprite qui, « heureux » hasard, sont de la même couleur. Dans la joie de toute cette débauche graphique on ne sais plus qui est qui et on se scratche allègrement sans trop savoir pourquoi. Et si je vous dis que l'on peut jouer a deux simultanément, c'est celui qui aura les yeux les plus explosés qui ira sans doute le plus loin, ou pas. Pour terminer, toute petite cerise sur ce gâteau certes réussi esthétiquement mais avec un goût de chiotte. La fin, le superbe final inversement proportionnel à l'introduction du jeu.
Figurez-vous qu'après avoir perdu un peu de votre vue, exploité un système d'armement qui ne sert à rien et détruit pour rien des vagues increvable d'aliens qui reviennent à l'infini vous aurez le droit à une fin consternante de vide. Les types se sont cassé la tête à faire une intro spectaculaire pour l'époque et ont bâclé la fin. Nous, on s'est cassé le cul à subir les affreux défauts qui taches de ce jeu et on a le droit à ça ? C'est à dire rien ! Quand je pense que les concepteurs du jeu se vantaient eux mêmes d'un véritable challenge au niveau de la difficulté, et la récompense alors ? Le jeu on l'a acheté, joué et rien. Bravo, cumuler autant d'erreurs jusqu'à la fin c’est une prouesse ! Heureusement j'ai gardé le meilleur pour... la fin.
La musique, un shoot se doit d'avoir une très bonne bande son. Eh bien pour Project X c’est une totale réussite. Autant techniquement que musicalement. L'inspiration Amiga est là mais avec les capacités audio du processeur sonore de la PSX. Les musiques de Bjorn sont composées à l'ancienne au trackeur, reproduites en temps réel par la console, pas de piste audio, pas de streaming. Les sonorités sont fantastiques, là je pense à la BO du niveau 2 avec ses lead cristallins, mais ce constat se fait sur l'ensemble du jeu. Les compositions sont claires et très loin des sonorités d'un mauvais synthé bon marché. Le style musical est évidement très électro, ce qui colle parfaitement à l'ambiance et aux décors du jeu. C'est plutôt cohérent contrairement au reste. A mon sens, c'est même l'un des jeu qui exploite le mieux le hardware audio de la console. Et pour notre plus grand bonheur, à défaut d'avoir perdu la vue à jouer, il restera le sound test du jeu qui contient toutes les BGM.
Au final Project X2 est l'archétype du jeu vidéo à l'occidentale. Une superbe réalisation technique digne des meilleures démos de l'Amiga. Mais le monde des démomaker Amiga n'est pas celui des consoles. Réaliser une démo pour montrer de quoi l'on est capable en matière de programmation, de composition n'est pas réaliser un jeu. Le public du monde des consoles recherche avant tout le jeu avant de savoir si sa machine est capable de faire une Bouncing Ball. En 1992 Project X a bénéficié du manque de shoot de qualité sur Amiga, son gameplay pouvait donc être moindre. Mais 4 ans après, qui plus est sur consoles, ça ne pouvait plus fonctionner. Pondre une belle réalisation technique ne suffit pas à faire passer la pilule d'un gameplay raté et poussif rendant le jeu extrêmement pénible à jouer. De plus, l'enrobage typique des univers futuristes propres à la scène micro-informatique des année 80 n'est pas forcément ce qu'il y a de plus judicieux en matière de design pour un shoot console. Project X2 est sans doute l'un des jeux les plus représentatif de cette différence culturelle entre les technophiles de la micro-informatique des année 80/90 et les joueurs console. Ces premiers cherchant à exploiter techniquement leur machine par rapport aux gamers console qui recherchaient avant tout un gameplay arcade. Project X2 a été conçu et vendu à l'occidentale par des personnes n'aillant qu'une vague idée des éléments qui constituent un bon shooter. Parfois, et c'est d'autant plus vrai aujourd'hui, il faut reconnaître que certaines cultures ont une meilleure maîtrise d'un domaine. Pour celui des Shoot Them Up il est incontestable que les japonais restent les maîtres en la matière. Il ne manquait à Project X2 qu'un gameplay calibré par des ténors tels que Treasur, Thecno Soft, Sega ou Konami. Si cette critique est aussi longue pour un jeu aussi médiocre c'est aussi qu'il fut le précurseur de la débauche technologique et artistique de cette génération ou le gameplay est passé au second plan alors qu'il est la pierre angulaire du jeu vidéo.
Les anciens joueurs, notamment ceux ayant connu les jeux sur micro ne seront sans doute pas d'accord avec cet avis. Mais je conseil à ceux ayant démarrés leur carrière de gamer avec les 32 bit ou plus tard de tenter Project X et X2. Vous comprendrez pourquoi cette suite cristallise tout les éléments de cette époque à la culture révolue qu'a été celle des demomakers, de la technique qui faisait vendre les jeux et de cette SF fantaisie à mis chemin entre Tolkien et Lucas tant prisée des « geek » (plutôt nerd) de l’époque. Vous voyez, c'est fou comme un jeu raté peu traîner autant d'histoire derrière lui.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les jeux où il y a une forte chance de casser sa manette (ou son clavier)
Créée
le 14 févr. 2013
Critique lue 2.9K fois
3 j'aime
2 commentaires
D'autres avis sur X2
Oui effectivement, pas de relief.
Par
le 29 juil. 2013
1 j'aime
1
Du même critique
Choisissez un compagnon de visionnage, donnez-lui simplement le synopsis puis lancez le film. Attendez une heure et dite lui que c’est un documentaire, que toutes les images sont issues de situations...
Par
le 26 sept. 2022
17 j'aime
14
Décevant ! C'est le qualificatif pour le long métrage adapté de la fabuleuse série Akira. Ce film retrace les premières heures de l'histoire offerte par les livres. Mais en aucun cas il ne reflète la...
Par
le 29 juin 2012
16 j'aime
16
L'une des plus grosses mandale technique et ludique de ces 20 dernières années. F-Zero GX est l'un des très rarissimes titres à réussir un doublé entre maitrise de la technique et du gameplay. D'un,...
Par
le 29 oct. 2012
15 j'aime
4