Cinéphilie obsessionnelle — 2019
Longs métrages uniquement. Revus : 2. Cinéma : 8.
↑↑ "L'Expédition du Kon-Tiki", de Thor Heyerdahl (1950) ↑↑
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Mois après mois, pour le meilleur et pour le pire des découvertes :
Janvier ...
Liste de 592 films
créee il y a presque 6 ans · modifiée il y a presque 5 ans
Black Mirror: Bandersnatch (2018)
1 h 30 min. Sortie : 28 décembre 2018. Drame, Science-fiction, Thriller
Film de David Slade
Morrinson a mis 6/10.
Annotation :
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[ Revu ]
De très loin l'objet cinématographique le plus hybride que j'aie pu voir de toute ma vie. Sans doute pas à la hauteur de l'expérience vendue par Netflix, qui cherche décidément à se diversifier et à innover de manière très active, pas de l'ordre de la révolution, mais un moment ludique agréable.
Je reste convaincu que ce concept présente deux écueils importants.
1. Son originalité, qui ne résistera pas à la répétition. Une fois le principe éventé, il n'y aura plus autant d'intérêt de parcourir une narration de la sorte à l'occasion d'un autre "film" (guillemets de rigueur). L'opportunité qui nous est donnée de reparcourir des segments que nous n'avons pas parcourus lors de notre premier chemin n'est pas particulièrement passionnante, juste de quoi assouvir un reliquat de curiosité.
2. Le caractère anti-immersif des séquences de choix, qui ne sont pas aussi fluides et incorporées au récit que ce qu'on souhaiterait. Ces 10 secondes de latence font penser à ces jeux-vidéo qui s'aventurent sur les chemins du cinéma. Même remarque donc : chacun des deux médias à ses particularités, et certaines excursions ne sont pas bonnes à prendre.
La dimension interactive n'apporte au final pas grand chose de plus du point de vue des enjeux caractéristiques de la série. C'est plus une sorte de mise en abyme qu'autre chose, avec notamment ces passages où le protagoniste attend les instructions de notre part. Il n'y a pas non plus beaucoup de chemins parallèles, il y a avant tout une trame principale avec quelques sentiers auxiliaires sur de courtes distances. L'ensemble est parfois un peu confus, tous les segments et choix ne sont pas aussi passionnants, et le potentiel critique est largement en-dessous des meilleurs épisodes de la série. L'aspect ludique, encore une fois, nuit au potentiel dramatique : on est plus attaché à la forme qu'au fond, et on se disperse vite sans apprécier tous les détails de la trame narrative en cours.
Peut-être qu'il sera possible, sous un format amélioré, de questionner plus profondément ce qui n'est laissé qu'à l'état de pistes ici, sur le thème du libre arbitre. Beaucoup de clins d'œil aussi, sur la production d'un jeu, le poids des critiques institutionnelles, les références paranoïaques à des complots gouvernementaux. Des choix abscons, des choix cruciaux. J'ai la sensation qu'un labyrinthe de choix binaires (https://imgur.com/Eoe1lo7) cache un contenu très simple.
Prête à tout (1995)
To Die For
1 h 46 min. Sortie : 6 décembre 1995 (France). Policier, Comédie, Drame
Film de Gus Van Sant
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Autant je cautionne, à distance raisonnable, la partie de la filmographie de Gus Van Sant tournée vers un académisme de film d'auteur gentillet (le fameux label "cinéma indépendant" à caractère progressiste), autant cette incursion dans l'œuvre commerciale et dans le cinéma de commande me laisse froid, voire m'agace sérieusement par moments. Ironiquement, c'est ce film qui révèlera Nicole Kidman et qui sortira le réalisateur de l'ombre aux yeux du monde.
Le film transpire le conventionnel et la critique de supermarché en matière de comédie noire sur l'arrivisme. Le fond de la diatribe est bien évidemment intéressant et légitime, un regard décalé sur ce rêve américain qu'on nous sert à toutes les sauces, mais le ton m'est insupportable. La forme me paraît vraiment inappropriée. Kidman en fait des tonnes dans son rôle de femme fatale prête à tout pour grimper l'échelle sociale, et tout le gratin de l'arrière plan (Matt Dillon, Joaquin Phoenix, Casey Affleck, etc.) en fait que vivoter tant bien que mal. L'apparition de David Cronenberg, in extremis, aussi inutile soit-elle, est la seule véritable surprise. Sans doute que cet aspect "film de studio" a ruiné toute potentielle adhésion de ma part, tout est trop artificiel et prémâché à mon goût.
Bon, Nicole Kidman dans la peau d'une hystérique psychotique, tueuse vaguement nymphomane, ne laisse pas tout à fait indifférent, mais rien qui ne sauve le film. Il suit sans sourciller la ligne qu'il se fixe d'entrée de jeu et qu'il explicite très clairement, en faisant de l'essentiel du film un flashback : le portrait d'une femme prête à détruire tous les obstacles sur le chemin de son ascension professionnelle. Le trait est certes sarcastique à l'extrême, il n'en reste pas moins lourd. Et ce serait un brin forcé d'y voir les débuts du réalisateur en matière de destinée d'adolescents paumés.
Kin : Le Commencement (2018)
Kin
1 h 43 min. Sortie : 29 août 2018 (France). Action, Science-fiction, Thriller
Film de Josh Baker et Jonathan Baker
Morrinson a mis 1/10.
Annotation :
Quand Hollywood se lance pour la énième fois dans une tentative de recyclage à grande échelle, on sent venir le coup de très très loin. Ambiance rétro soignée, quelques arguments SF, des effets spéciaux au début discrets et réussis : d'une base attrayante; le film évoluera vers ce qui se faire de pire en matière de prétendant blockbuster. La trame sociale sous-jacente est à pleurer, avec la situation familiale compliquée comme il faut, le bad guy méchant à souhait (un grand moment de cabotinage pour James Franco, c'est drôle), et une part de mystère à travers ces deux zigotos en combinaisons aussi indestructibles que fauchées qui traversent le film uniquement pour le clore sur une révélation finale censée amorcer le début d'une saga. Échec total : c'est ridicule, éculé, ça se veut émouvant là où ça se vautre dans les clichés insupportables (la femme issue de la boîte de strip-tease qui décide de suivre le gamin et son frère, on roit rêver), et ça caresse son spectateur de moins de 13 ou 16 ans dans le sens du poil. Sans parler de l'incohérence et de l'inconsistance permanentes quant à l'utilisation de l'arme surpuissante en question. Il s'agit d'une adaptation de court-métrage, et ça se sent. Il aurait fallu s'en tenir à la première version.
Sale temps à l'hôtel El Royale (2018)
Bad Times at the El Royale
2 h 22 min. Sortie : 7 novembre 2018 (France). Policier, Thriller
Film de Drew Goddard
Morrinson a mis 2/10.
Annotation :
La boulimie est un vilain défaut au cinéma, et Drew Goddard n'a clairement pas su fixer la bonne limite à de nombreux endroits dans son film. "Bad Times at the El Royale" foisonne de petits trucs, d'idées (bonnes ou mauvaises) de mise en scène par-ci par-là, de références à l'époque dépeinte (la find es 60s). Mais en l'absence de restriction, l'entreprise vire très vite à la répétition de tics et à l'insupportable. Pris individuellement, chaque petit bout n'est pas forcément mauvais (j'ai même fini par rire de la chemise parfaitement ouverte de Chris Hemsworth du début à la fin, avec son torse "parfait" savamment mis en avant). Mais la profusion de ces "trucs", dans tous les sens et à tous moments, m'a écœuré. Cerise sur le gâteau, la séquence finale est interminable : elle m'a achevé.
Aucune parcimonie dans quoi que ce soit, en réalité : même les morceaux de Soul caractéristiques de l'époque finissent par avoir ce désagréable fumet du systématique. Le film déborde de maladresse (la structure en flashbacks par exemple, finit par être lourde et bavarde, et l'épisode "traumatisme du Vietnam" est d'un poussif éliminatoire), et difficile d'apprécier sereinement le boulot dans ces conditions. J'aurais envie d'être plus tolérant, mais plus j'y pense et plus le mélange des genres (comédie, série B, polar, violence pop à la Tarantino et récit cynique à la Coen) me dépasse. Comme si Goddard avait voulu nous en mettre plein les mirettes en étalant son petit talent un peu trop fort. J'ai plus l'impression de voir un petit théâtre de marionnettes sans vie qu'une intrigue prenante avec ses métaphores, ses concepts (Charles Manson revisité, la lutte pour les droits civiques en filigrane pas subtil, la guerre froide et la paranoïa des écoutes, ça part vraiment dans tous les sens), et tous ces artifices normalement dissimulés sous les coutures. "Tout ça pour ça", inévitablement, à la fin, alors que le film n'en finit pas de s'alourdir en pirouettes diverses, alors que le début était plutôt accrocheur.
Les Compagnons de la nouba (1933)
Sons of the Desert
1 h 08 min. Sortie : 29 décembre 1933 (États-Unis). Comédie
Film de William A. Seiter
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Je pense arrêter là le massacre que constituent ces (re-)visionnages des comédies de Laurel & Hardy. Que ce soit en muet ou en parlant, que ce soit dans les années 20 ou les années 30, le résultat est le même : le courant comique ne passe résolument pas.
Au terme de ce voyage, un constat assez triste se dégage : la comédie telle qu'elle est définie dans le cinéma muet supporte assez mal un passage vers le cinéma parlant quand aucune adaptation majeure n'est opérée. Déjà que du côté du muet, Laurel & Hardy ne m'ont jamais fait sincèrement rire... J'ai vraiment le sentiment qu'ils ont raté le coche, et se sont étalés dans l'escalier qui les menaient au parlant. D'autres ont tout simplement cessé leurs activités lorsque le parlant est arrivé, ceci dit, si l'on devait relativiser.
Quand on est habitué à (et amateur de) la navigation sur les flots délicieux de la comédie muette pratiquée par Buster Keaton (le roi de la cascade poétique), Roscoe Arbuckle (le roi du potache psychotrope) ou encore Charles Bowers (le roi de l'animation-bricolage), on ne peut que constater la pauvreté thématique et graphique des gags du duo. Sans compter le fait qu'ils souffrent d'une redondance incroyable — sans doute amplifiée dans le cas où l'on n'accroche pas. Un peu comme Chaplin, en pire.
Dans ces circonstances, quel calvaire que de suivre un long métrage... Toutes les vannes paraissent tellement vagues, nulles et peu inspirées, c'est effarant. On se fout de leur histoire de croisière bourgeoise entre hommes maquillée en séjour de repos, le comique de situation autour du matriarcat ne fonctionne vraiment pas. On est censé rire devant Laurel qui mange une pomme en cire ou Hardy qui se prend des assiettes sur la tête. En 1933 ! Même la chute, sur les vertus de la franchise, est ratée. Les rapports hommes / femmes, même pour l'époque, ne contiennent rien d'intéressant tels qu'ils sont dépeints ici. La gestion de la tension liée aux mensonges qui enflent est très mauvaise, il y a de nombreuses longueurs assommantes.
Clairement, le burlesque et l'exubérant ne sont pas communicatifs de la même manière pour tout le monde, au vu de la renommée (et de la présence dans les circuits scolaires ou éducatifs) de ce genre de production.
La Mouche (1986)
The Fly
1 h 36 min. Sortie : 21 janvier 1987 (France). Drame, Épouvante-Horreur, Science-fiction
Film de David Cronenberg
Morrinson a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
[ Revu ]
Un revisionnage qui fait l'effet d'une petite bombe, sans doute plus de 15 ans après la dernière fois. Avec un peu de recul, c'est drôle de constater à quel point ce film est à la fois le plus "facile", direct, explicite de Cronenberg, dans ses délires organiques de mutation des corps, mais aussi le plus monstrueux, abominable, horrible. Un des plus conventionnels dans la façon de mettre en scène, presque académique, le plus pur dans la relation amoureuse, et le plus viscéral dans la boucherie des corps mutilés. Tout Cronenberg - première période, autobiographique - est condensée dans ce petit bout de pellicule.
La transformation progressive de Jeff Goldblum (excellent) est aussi limpide (voire "théorique") que touchante, du goût de la liberté du "corps amélioré" (le concept du surhomme de Nietzsche n'est pas loin, sans doute) et de ses vertiges, puis de la toute-puissance (sexuelle, notamment), et de la dégénérescence, de la décomposition, de la chute littérale des organes conservés comme des reliques dans l'armoire à pharmacie. Il y a aussi une progression dans la contamination, d'abord physique, puis mentale.
Il y a sans doute beaucoup d'angoisses personnelles là-dedans, je ne serais pas surpris d'apprendre que Cronenberg a fait des cauchemars de cet acabit à un moment de sa vie. Il travaille ces rêves dégueulasses comme de la matière organique, comme un potier, pour un résultat horrifico-fantastique touchant. Pas renversant, mais très touchant, et qui invite à la magnanimité. Les thèmes sous-jacents seraient la peur de la vieillesse, le couple face à la maladie (cancer ? sida ?). Pourquoi pas. L'irréversibilité de la dégénérescence est un concept qui se suffit à lui-même, à mes yeux, et qui recèle un potentiel dramatique suffisamment fort pour ne pas être explicité plus avant. Et aujourd'hui, 30 ans après, en plus de témoigner les peurs de cette époque, les visions de l'horreur nous parviennent avec uen intelligibilité incroyable. Le babouin décomposé en tas de chair dégoulinant, puis la fusion homme-mouche qui le conduit à péter le bras d'un quidam, puis les ongles qui se décollent, puis l'avortement d'une larve géante, puis la giclée digestive qui fait fondre mains et pieds comme de l'acide. Mis à part la combinaison en caoutchouc horriblement moche de Goldblum, c'est d'une puissance gore incroyable.
Ivan the Idiot (2002)
Ivan-Durak
1 h 30 min. Sortie : 2002 (Russie).
Film de Alexander Doulerain et Sergey Koryagin
Morrinson a mis 1/10.
Annotation :
La définition, selon mes goûts, selon ma capacité à comprendre un univers très farfelu et entrer en empathie, du film inregardable. Tout juste serais-je capable de le décrire comme une sorte de trame de dessin-animé cyberpunk filmé en amateur sous LSD. Le film se revendique apparemment comme un conte de fées cyberpunk... pourquoi pas. Ce qui est sûr, c'est que c'est bizarre bien au-delà de toutes les limites que j'aie pu me fixer auparavant. Ça peut être drôle, sans doute, mais c'est tellement à l'arrache que ça devient vite insupportable à suivre et à tenter de comprendre. Et ce n'est pas le petit schéma récurrent, montrant qui est dans quel monde et interagit avec qui, qui aidera à quoi que ce soit en termes d'intelligibilité... Peut-être que la méconnaissance de cette partie du folklore russe ne joue pas en ma faveur, mais quand on me signale qu'il y a des références à Rambo, à Godard, aux Marx brothers, je reste interdit. On peut vaguement y voir une relation ténue à des films comme Matrix ou eXistenZ, le film ayant été pensé bien avant ceux-là d'après leurs auteurs, mais ça n'aide en rien à mieux comprendre. Et en l'absence absolue de thématique sensible, si l'ambiance ne dégage rien de satisfaisant (euphémisme), on reste totalement paumé devant ce film-concept qui restera enfermé dans son mystère.
Treno popolare (1933)
1 h 03 min. Sortie : novembre 1933 (Italie). Comédie dramatique
Film de Raffaello Matarazzo
Morrinson a mis 6/10 et a écrit une critique.
Annotation :
Un voyage aux origines du néo-réalisme italien : en 1933, Raffaello Matarazzo réalisait clairement un film qui peut être considéré (parmi d'autres, sans doute) comme précurseur de tout un courant cinématographique.
"Treno Popolare" se décompose en trois temps (plutôt que les deux annoncés par des encarts), très inégaux en durée. Une première partie, assez courte, située dans le train éponyme, présente une série de petit groupes de personnes vivant à Rome et en route pour un weekend à la campagne. Une deuxième partie, la plus longue, occupant la majeure partie du film, dans un village excentré où tous les personnages vaquent à leurs occupations, et se concentrant plus particulièrement sur un triangle amoureux (matrice d'une bonne partie de la comédie de mœurs italienne). Enfin, un dernier temps très court, dans le train du retour, donne un aperçu de la reconfiguration des relations, des couples, des amitiés, à l'issue d'une escapade mouvementée.
La dimension réaliste tient principalement au fait que l'essentiel du film est tourné en décors naturels, à une époque où le cadre du studio était encore la référence. Le film, à l'occasion d'un pique-nique dominical, raconte avec une élégance remarquable (accentuée par la musique de Nino Rota) pour l'époque les déambulations de deux collègues, un homme un peu austère et une femme plutôt attrayante, et leur rencontre avec un homme fort avenant qui induira beaucoup de conflits. Très classique dans la comédie de mœurs, les quiproquos et autres facéties amoureuses restent distrayants.
La particularité du film, presque invisible, réside dans le fait que ces "trains populaires" avaient été institués par le régime fasciste, au début des années 30. Le but était de faire voyager les classes populaires en offrant des réductions importantes sur les billets de train. Mais aucune référence à cela dans la fiction : le registre reste cantonné à la comédie, avec quelques accès de mélancolie et de lyrisme bucolique. On pense à certains film allemands comme celui réalisé par Helmut Käutner à la fin de la Seconde Guerre mondiale, "Sous les ponts", totalement étranger au conflit en cours.
La Compagnie des loups (1984)
The Company of Wolves
1 h 35 min. Sortie : 23 janvier 1985 (France). Fantastique, Épouvante-Horreur, Drame
Film de Neil Jordan
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Comme un parfum de mauvais téléfilm diffusé sur M6 dans les années 90 en d'après-midi. Avec certes un gros budget alloué aux décors, mais c'est tout. Et encore : on relève assez vite une certaine redondance, comme si la forêt se limitait à trois chemins et aux mêmes éléments décoratifs.
Sans doute que ma relative aversion pour ce genre fantastique ayant trait aux légendes et aux contes nourrit mon rejet du film. La grand-mère qui raconte des histoires à sa fille, le thème de l'imagination débordante encapsulée dans un rêve dans le film... Cela me fait ni chaud ni froid. Le Petit Chaperon rouge par-ci, et d'autres par-là, cette illustration assez naïve n'est pas pour moi. Il y a pourtant beaucoup de bonnes idées de mise en scène, notamment, mais elles sont invariablement nuancées à la baisse par autant de mauvais choix esthétiques, comme ces transformations de loup-garou bien ratées comme il faut (avec l'option peluche qui revient plusieurs fois). On a souvent vanté les aspects de cauchemar sensuel, mais à titre personnel je n'ai rien ressenti de la sorte, aucun charme, aucun érotisme dans cette soupe qui aborde clairement le désir masculin sous forme de petit précis psychanalytique.
L'introduction dans le subconscient d'une ado n'est pas une mauvaise idée en soi, mais la retranscription de ses troubles de la sorte m'agace plus qu'autre chose. Et la justification d'un certain côté négligé du scénario par le fait qu'on se trouve dans un rêve me paraît vraiment très paresseuse. C'est parfois décousu, peu cohérent, somme toute assez attendu (mis à part le positionnement de l'ado à la fin, qui envoie chier les enseignements superstitieux la grand-mère grosso modo) et au final très peu engageant.
Mandy (2018)
2 h 01 min. Sortie : 6 février 2019 (France). Action, Fantastique, Épouvante-Horreur
Film de Panos Cosmatos
Morrinson a mis 4/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
Waouw, le dernier délire aussi régressif, d'une telle intensité, datait d'il y a bien longtemps. La première partie est particulièrement horrible, engluée dans ses effets esthétiques putassiers et ses monologues pseudo-romantiques interminables, mais cela a pour effet de donner à la suite des événements une puissance cathartique assez incroyable. "Mandy", enfin, lâche les chevaux : une grosse série B qui tache, un gros revenge movie de bourrin psychédélique.Et autant dire que Nicolas Cage en exterminateur sous psychotropes, ça n'a pas de prix.
Le scénario est évidemment grotesque, les effets visuels sont évidemment obscènes. Les clichés sont omniprésents, tout comme les "petits trucs" pour se donner un style en carton (à l'image, au hasard, de la corne d'Abraxas ou que sais-je).
Mais à partir du moment où Cage pète les plombs, on peut profiter du spectacle. Cage dans sa salle de bain, totalement ridicule, qui descend une bouteille de vodka en poussant des borborygmes étranges et en cautérisant ses plaies comme un guerrier (en slip). Cage et sa démarche épique, balourde, déglinguée, le tête peinte en rouge du sang de ses ennemis trucidés. Cage et ses 20 lignes de dialogues, ses hurlements incessants, ses grognements sans cesse diversifiés. Cage qui forge sa hache lui même, rutilante, brillant de mille feux, acéré comme la lame d'un rasoir. Le scénario a beau n'avoir ni queue ni tête, on suit Cage dans son périple, avec une tronçonneuse, avec une hache, avec ses mains, dans un état de sidération.
C'est sans fin : des guerriers sadomasos sanguinaires sortis d'Hellraiser, de la cocaïne sniffée par kilos, du LSD ingéré par décalitres, une secte ridicule avec sa fantasmagorie et ses trips mystiques, etc. C'est démentiel, débile, en transe, gore. Et jouissif, de manière très surprenante.
Conan (2011)
Conan the Barbarian
1 h 53 min. Sortie : 17 août 2011. Action, Aventure, Fantasy
Film de Marcus Nispel
Morrinson a mis 2/10.
Annotation :
En me lançant dans ce remake en toute connaissance de cause, j'avais négligé ou sous-estimé une composante essentielle du visionnage : le comique involontaire. Bien sûr, en bonne séance masochiste, je ne m'attendais à rien d'autre que ce déferlement de grand n'importe quoi et d'images de synthèse pour illustrer cela (à commencer, dès la 3ème ou 4ème minute, par un plan de l'intérieur du ventre de la mère enceinte, avec le fœtus dérangé par une lame qui transperce son placenta). C'est osé, à un point que ça en devient ridiculement comique. Un carnage, dans tous les sens du terme, et la version de Milius est vite repoussée au loin, loin des possibles comparaisons. On se demande ce que vient faire Ron Perlman dans cette histoire, on constate la bêtise du personnage de Jason Momoa (celui de Schwarzy peut reposer tranquillement, même si je n'ai jamais été un grand amateur), et on reste un peu pétrifié devant l'inanité de l'action, de la violence, du sang virtuel, de la transformation subite de Conan de brute épaisse en amoureux transi. Mais le visionnage ne fut pas aussi pénible que ce à quoi je m'attendais.
Les Incorruptibles (1987)
The Untouchables
1 h 59 min. Sortie : 21 octobre 1987 (France). Policier, Drame, Historique
Film de Brian De Palma
Morrinson a mis 6/10.
Annotation :
[ Revu ]
L'empreinte que ce film a laissé dans ma cinéphilie naissance à l'adolescente m'empêche d'apprécier ce film à sa juste valeur, il n'y a aucun doute là-dessus. Découvert indépendamment de toute cette mélasse subjective, gageons que j'aurais pu montrer beaucoup moins compatissant.
De Palma enchaîne les grossièretés avec une régularité qui me fait penser qu'elles sont parfaitement volontaires. Dans les "références", comme la scène à la gare censée rappeler celle d'Eisenstein dans "Le Cuirassé Potemkine", qui est pas loin d'être insupportable tant elle commence mal (interminable cette femme qui monte 3 marches d'escalier avec sa poussette et ses valises). D'autres références sont plus "douces" et pas désagréables, comme la séquence western à la frontière canadienne et la séquence giallo.au domicile de Sean Connery. On est prié de ne pas rigoler devant la longueur de son agonie avec 15 balles dans le buffet et 3 hectolitres de sang déversés sur le tapis.
Des ralentis en trop, des romances ratées, des archétypes à foison : plus que du ridicule involontaire et non-maîtrisé, j'y vois des choix artistiques tout à fait conscients, mais qui ne m'émeuvent pas, voire pas du tout. Robert De Niro cabotine de manière hallucinante, et Ennio Morricone fait peu ou prou la même chose au niveau de la musique.
Au final, ce qui dérange le plus dans ce film, c'est son caractère très lisse, dépourvu d'aspérités, à la recherche d'une élégance qu'il ne trouve pas ou du moins uniquement de manière stérile et inutile. La peinture de la prohibition n'est pas particulièrement perspicace, la question du bien et du mal (et du mal dans le bien) est abordée de manière balourde. Un résultat bien plus banal que les souvenirs que j'en conservais...
Meurtre (1930)
Murder!
1 h 42 min. Sortie : 6 octobre 1976 (France). Policier, Thriller
Film de Alfred Hitchcock
Morrinson a mis 6/10 et a écrit une critique.
Annotation :
"Murder!", c'est un peu "12 Angry Men" avant l'heure, et dans lequel le 13ème juré aurait eu la possibilité de mener sa petite enquête en dehors de la salle de délibération. À la place de James Stewart, Herbert Marshall, traînant toujours la même classe que celle qu'il dégageait dans "Trouble in Paradise" / Haute Pègre chez Lubitsch.
Je mets de côté tous les aspects du film qui en font un objet assez rigide, aux articulations qui craquent : c'est un peu trop théâtral à mon goût (dans les scènes où l'on n'est pas au théâtre du moins !), un peu trop statique (même pour un film du tout début des années 30). Tout cela nuit un peu à l'intérêt et l'immersion. Par contre, la mise en abyme de la mise en scène me paraît très judicieusement intégrée au scénario, et à plusieurs reprises on se demande à quel niveau on se place : dans le film, ou bien dans une pièce de théâtre dans le film ? Même chose en ce qui concerne la dernière pièce de théâtre, dans laquelle le protagoniste entend faire jouer la personne qu'il suspecte d'avoir commis le crime, afin de le pousser aux aveux, ou encore la toute dernière séquence, mise en abyme parfaitement explicite. C'est un aspect qui en soi me parle beaucoup plus que ce qui fait la particularité de ce film pour le commun des critiques, à savoir une des premières évocations de l'homosexualité au cinéma britannique. À noter que cela ne sera jamais abordé frontalement, seulement de manière implicite : ce qui sera l'objet d'un secret porte plutôt sur le fait qu'un personnage s'avère être métis.
Les mécaniques du film policier sont par contre assez peu engageantes, à commencer par la première description de la scène de meurtre : tout paraît figé dans le marbre, la passivité de la principale suspecte est incompréhensible, la structure paraît vraiment bâclée. À côté de ça, la technique pure de mise en scène est très classique mais tout aussi solide, quelques mouvements de caméra pour donner de l'air, quelques jeux d'ombre pour susciter l'effroi : on retient notamment l'ombre de la potence qui grandit sur le mur, signifiant l'imminence de l'exécution de l'accusée jugée coupable. À d'autres moments, Hitchcock se fait presque bouffon (au sens comique) sans qu'on n'en comprenne la raison avec certitude : ce tapis dans lequel s'enfonce un régisseur, comme s'il s'agissait d'un matelas gonflable (illustration satirique des rapports de classe ?), est plutôt surprenant.
Short Circuit (1986)
1 h 38 min. Sortie : 1986 (France). Comédie, Science-fiction
Film de John Badham
Morrinson a mis 6/10.
Annotation :
[ Revu ]
Revoir "Short Circuit" me fait l'effet d'une plongée intense en enfance, à l'époque où je regardais ce film en boucle en VHS (usée jusqu'à ce qu'elle ne fonctionne plus), suite à la diffusion (unique) du film à la télé. La VO a accentué ou simplement suscité deux choses assez désagréable : la voix du robot est insupportable, un mélange d'enfantin et de neuneu, et les interventions du sidekick du protagoniste (humain), sous les traits de Fisher Stevens grimé en Indien, jamais drôles, limite insultantes. Mais ceci mis de côté, la quantité de madeleines de Proust que recèle ce film est astronomique.
Que ce soit le design du robot, ses chenilles, ses sourcils, ses trois (!) mains, son laser, tout cela fait écho à quelque chose qui était resté sagement enfoui dans les tréfonds de ma mémoire. Tout le casting à ses côtés est complètement à la ramasse, surjouant leur rôle, engoncés dans des stéréotypes de chercheurs / chefs / militaires. C'est une horreur. Mais bizarrement, j'ai su en faire abstraction et me concentrer sur le délire du robot et de son "intelligence artificielle" née d'un coup de foudre au sens propre. C'est assez drôle de voir ce qu'on appelait alors intelligence artificielle, d'ailleurs, comparé à sa définition contemporaine. Mais on y croit à ce robot soudain conscient de sa condition et effrayé par les brutes sanguinaires à ses trousses : évidemment, le film est un pamphlet antimilitariste primaire, il ne faut pas chercher de sens profond dans cette œuvre pour enfants, mais ça reste assez drôle de faire d'un tas de métal un être doué de plus de sensibilité que les hommes armés de M-16.
Je n'avais pas fait le rapprochement avec E.T., mais il y a un peu de ça dans le design du robot, et dans sa découverte du monde des humains. Quelques références à l'autre films de Badham "Saturday Night Fever", à John Wayne, et d'autres éléments cinématographiques qui m'avaient bien sûr totalement échappés enfant. Je m'attendais à une destruction méthodique de bons souvenirs, mais absorbé par une subjectivité mélancolique, ce fut à ma grande surprise un agréable moment, pas du tout reproductible d'une personne à l'autre.
The John Akii Bua Story: An African Tragedy (2008)
1 h 30 min. Sortie : 10 août 2008 (Royaume-Uni).
Documentaire de Daniel Gordon
Morrinson a mis 5/10.
Annotation :
Un docu intéressant, dans le cadre de son sujet, qui fait autant le portrait d'un homme, John Akii Bua, premier athlète africain à remporter une médaille d'or aux jeux olympique dans sa discipline (course de 800m), que le portrait de son pays, l’Ouganda, dans les années 70-80, sous la dictature meurtrière de Idi Amin.
Sur un sujet qui ne me passionne pas, les sports olympiques en général, le film produit par la BBC parvient à tisser des liens intéressants avec l'histoire. Tout ce qui a trait à sa victoire à Munich en 1972, le fait qu'il soit le premier athlète de l'histoire a effectuer un tour d'honneur drapeau en mains et que ce devint une tradition, bof bof. Mais le fait qu'il rentra chez lui sans la gloire et la prospérité habituelles pour un tel champion, à cause de la dictature en cours et des rivalités entre tribus (malgré son appartenance à l'ethnie lango, persécutée par le gouvernement, il fut protégé par sa renommée nationale), constitue un récit intéressant. Il fuit ensuite pour le Kenya, avant d'être rapatrié en Allemagne par la marque de ses chaussures.en attendant la fin de la dictature. Il avait consigné dans une dizaine de carnets, au crayon gris, en anglais, son autobiographie.
La Voix de la Lune (1990)
La voce della luna
2 h 02 min. Sortie : 18 mai 1990 (France). Comédie, Drame
Film de Federico Fellini
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Une conjonction conséquente de traits cinématographiques qui me sont particulièrement désagréables. Le doublage catastrophique du cinéma italien jusque dans les années 90, l'excentricité de Roberto Begnini, la profusion de grotesque, la fuite en avant continue de la narration, la rapidité indigeste de l'action... Un festival. Je ne connais pas bien Fellini, mais même si j'imagine que cet ultime film n'est pas à l'image du reste de sa filmographie, ça me freine pas mal dans mon envie de la parcourir.
C'est sans doute ma limite en terme de grotesque baroque qui m'empêche d'apprécier ce film autrement qu'en le subissant de bout en bout. Et ce pendant deux longues heures. Le film est construit (ou plutôt déconstruit) comme un rêve, chaque séquence chasse la précédente sans souci de continuité, et Fellini se laisse aller à une illustration appuyée de tout et n'importe quoi, sans aucune trace de suggestion. Putassier à mes sens. Le film se veut clairement poétique, avec la lune qui parlerait à un rêveur, entre autres, mais elle ne m'atteint jamais, c'est inintelligible. L'enfance, les rêves, le sexe... Les thématiques abordées sont légion mais rigoureusement aucune ne me touche. Quelques passages un tant soit peu drôles, comme celui de l'acte sexuel sur un canapé avec la métaphore du train qui s'excite et de la vapeur qui s'en échappe (et encore).
Gesticulation de personnages, dialogues abscons, série d'anecdotes loufoques, le tout sans suite logique. Je veux bien ne pas tout rationaliser, mais dans ces conditions, je ne sens que la cacophonie. D'ailleurs, la lune dira que "s'il y avait un peu plus de silence, on comprendrait peut-être quelque chose"...
Mandingo (1975)
2 h 07 min. Sortie : 17 septembre 1975 (France). Drame, Historique, Romance
Film de Richard Fleischer
Morrinson a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.
Annotation :
Voilà un bien joli pavé dans la marre. Avec toutes les horreurs académiques qui fleurissent régulièrement sur le thème de la ségrégation et de sa dénonciation beaucoup trop consensuelle, misérabiliste ou manichéenne pour produire le moindre effet, il est bon de se plonger dans le film de Richard Fleischer, qui parvenait au milieu des années 70 à aborder le sujet de manière aussi franche qu'insaisissable. "Mandingo" est vraiment le produit d'une époque où l'on osait choquer tout autant que déplaire, sans doute parce que cela faisait partie des arguments commerciaux admissibles dans les cahiers des charges.
"Mandingo" est dur, violent, sale, et s'il s'agit évidemment d'une critique de l'esclavage (comment imaginer autre chose...), il ne se limite pas à une dénonciation conventionnelle des sévices et des rapports de domination classiques qui régissaient la cohabitation entre propriétaires aristocrates blancs et esclaves noirs. Fleischer souhaitait réaliser une fresque historique dans le même registre que "Autant en emporte le vent", mais la version originale de 3h45 fut coupée par la production (Dino De Laurentiis aux manettes), réduite à un peu plus de deux heures et enrichies en séquences érotiques histoire de ratisser large.
Mais le résultat reste étonnant, l'antithèse du film de Victor Fleming, notamment dans le ton de la dénonciation de la ségrégation, qui joue plus sur la description de la toile de fond des relations hommes / femmes et Noirs / Blancs, avec tous les antagonismes imaginables, que sur l'opposition attendue entre gentils et méchants. Des éclats de violence surprenants, aussi, notamment dans certains combats de Noirs filmés comme des combats de coqs, à mort, et jusqu'au sang (dont s'inspirera très clairement Tarantino dans "Django Unchained". Une violence brutale, qui complète le portrait très diversifié de la perversion (morale, physique, sexuelle) des esclavagistes.
Suite https://www.senscritique.com/liste/Top_films_1975/373570
À l'est de Shanghaï (1931)
Rich and Strange
1 h 23 min. Sortie : 9 septembre 1976 (France). Comédie, Drame
Film de Alfred Hitchcock
Morrinson a mis 4/10.
Annotation :
Hitchcock du côté de la comédie de mœurs ne joue visiblement pas dans sa catégorie de prédilection... La mise en scène est comme figée, raide, plate, alors qu'il avait déjà fait preuve d'un peu plus de talent un an auparavant dans "Blackmail". Aucun des différents temps du récit n'est vraiment réussi. La situation initiale, dépeignant l'homme enfermé dans son quotidien morne et semé d'embûches, est illustré très platement, avec quelques petits gags issus du cinéma muet peu engageants (un parapluie qui ne s'ouvre pas jusqu'à la fin, une fois la pluie terminée, par exemple). La résolution temporaire du problème du couple, soucieux de prendre du bon temps mais confronté à un manque d'argent, est résolu par un deus ex machina qui arrive 2 minutes après qu'il soit formulé de manière explicite, à la faveur d'une lettre remise par le facteur, annonçant un héritage anticipé qui tombe un peu trop à point. Puis vient le temps de la croisière à travers Paris puis le monde, où le couple va se défaire, lui épris pour une fausse princesse là uniquement pour le dépouiller, elle séduite par le capitaine. Il finiront par être déçus chacun de leur côté avant de revenir ensemble, et de retrouver leur maison londonienne, le confort de leur home sweet home et le rythme de leurs disputes.
On a connu Hitchcock plus inspiré et plus percutant, tant dans la mise en scène que dans la propos, ici assez moralisateur. L'argent ne fait pas le bonheur, on peut trouver le bonheur devant sa porte, etc. : c'est un scoop. Les romances sont bien pâles, les aventures dénuées de piquant, la confrontation avec des étrangers peuplée de stéréotypes racistes (les Chinois sont de vrais sauvages). Les tentations d'adultères respectives ne sont pas source de questionnements moraux passionnants, le récit manque cruellement de romanesque, l'humour est bien fade, et les personnages sont bien falots. Si l'on ajoute à cela un cinéma parlant encore englué dans les codes du muet (nombreux encarts, interprétations outrées), le portrait de la petite bourgeoisie qui se veut satirique et cocasse reste vraiment bien ennuyant.
Jeremiah Johnson (1972)
1 h 50 min. Sortie : 15 septembre 1972 (France). Western
Film de Sydney Pollack
Morrinson a mis 9/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.
Annotation :
[ Revu ]
L'histoire vraie de John Johnson (aussi connu sous les jolis noms de Johnson le mangeur-de-foie ou le tueur de Corbeaux), un trappeur américain qui choisit de vivre une grande partie de sa vie dans des montagnes enneigées peu chaleureuses, partagées avec plusieurs tribus d'Indiens, est une légende en soi. La page WIkipedia qui lui est consacrée (https://fr.wikipedia.org/wiki/Johnson_le_mangeur-de-foie) donne une idée assez intéressante du personnage, et montre que la version qu'en tire Sydney Pollack dans "Jeremiah Johnson", à quelques détails près (à commencer par son prénom), est sans doute très peu éloignée de la réalité.
Je me rends compte, en revoyant cette épopée, que j'avais oublié à point "Jeremiah Johnson" est beau. Non pas forcément le personnage, interprété par un Robert Redford au sommet de sa beauté, cheveux dorés aux reflets parfaits, regard magnifique, classe incroyable quelle que soit la longueur (ou même l'absence) de sa barbe, quelle que soit la quantité de peaux qu'il arbore. Non pas uniquement les paysages, grandioses, capturés dans tout le lyrisme onirique des chaînes montagneuses de l'Utah, avec leurs forêts, leurs rivières, leurs immensités immaculées, leurs versants enneigés sur lesquels le soleil vient se lever et se coucher. Mais aussi, et peut-être surtout, les motivations du personnage, ou plutôt l'absence de motivations explicites qui seraient affichées continuellement tout au long du film.
On comprend bien les raisons qui ont initié ce voyage à la rencontre de la nature et de la solitude : la fuite loin de la guerre avec le Mexique, la fuite du monde civilisé, sans doute pour des raisons peu solides à l'origine, et avec une forme d'idéalisme un peu naïf qui sera rudement éprouvé lors de ses premiers contacts avec la vie dans les bois et dans le froid. La confrontation avec cet environnement hostile qu'il ne connaît pas bien, malgré les conseils et les enseignements des personnages bienveillants qui croiseront sa route (Bear Claw le vieux sage, Del Gue le trappeur) et le guideront dans sa quête initiatique, se fera dans un premier temps dans la douleur et dans l'échec.
Suite https://www.senscritique.com/liste/Top_films_1972/373610
Pauline à la plage (1983)
1 h 34 min. Sortie : 23 mars 1983. Comédie, Drame, Romance
Film de Éric Rohmer
Morrinson a mis 6/10.
Annotation :
En dépit de toute mon aversion pour une grande partie du style de Rohmer (à travers les âges), "Pauline à la plage" a fini par me cueillir. Il y a peut-être un petit effet "syndrome de Stockholm", où on se repait d'une mot d'esprit bien placé au milieu d'un ensemble pour le moins indigeste, mais peu importe au final. La plus grande surprise étant clairement, et de loin, la capacité à rendre Arielle Dombasle (méconnaissable ici, les ravages de la chirurgie esthétique...) pas antipathique et tout à fait à sa place dans son rôle de bimbo qui n'est là (dans le film) que pour susciter le désir des hommes. On ne compte plus les scènes où elle s'expose en maillot cul face à la caméra, soigneusement de biais pour bien apprécier ses formes, ou seins nu à la sortie du lit. Mais je n'ai pas eu l'impression qu'il s'agissait d'un film de vieux lubrique pour autant : j'y ai trouvé pas mal de sens, et puis le cul fait partie de la vie.
Le propos du film, si tant est qu'on puisse le résumer, se révèle bien plus complexe que ce que le marivaudage initial laisse penser. Le mensonge qui articule toute la narration, au centre du film, permettra de dévoiler bien plus que la vérité (avec tous ses secrets) les véritables pensées et aspirations des personnages. Le rapport qu'ils entretiennent à la passion sera beaucoup plus clair, comme s'il était magiquement révélé, dans toutes les déclinaisons des postures amoureuses (coup de foudre, amour secret, libertinage, désir profond, fidélité et libertinage, etc.). De manière très surprenante, c'est à travers la voix (et la voie) de Pauline que Rohmer s'impose : c'est l'adolescente (elle est censée avoir 14 ans) qui s'oppose à tous les mensonges et autres faux-semblants des adultes, avec son idéal de sincérité en bandoulière, qui ne tolère même pas les soumissions temporaires (son petit ami en fera les frais). C'est elle la plus mature et la plus courageuse de tous, au final.
Les personnages sont un peu caricaturaux, statiques : la naïve un peu ridicule, le queutard dénué de scrupule et de conscience, l'amoureux transi jaloux jusqu'au bout des ongles. Ce n'est pas si dérangeant, et ils s'accommodent assez bien des dialogues verbeux et un peu théoriques. Bizarrement, les mécanismes apparents ne m'ont pas dérangé, et la comédie cruelle et immorale flirtant avec les émotions est passée sans difficulté. Ressenti aussi surprenant qu'agréable, mais gageons que cela ne change en rien mon scepticisme envers Rohmer, de manière générale.
Moonwalk One (2014)
1 h 36 min. Sortie : 30 juillet 2014 (France).
Documentaire de Theo Kamecke
Morrinson a mis 7/10 et a écrit une critique.
Annotation :
"Moonwalk One", un film à ranger dans l'immense tiroir des œuvres bicéphales. D'un côté, toute une liturgie mystico-philosophique sur le thème de la conquête spatiale, et de l'autre, une quantité impressionnante de détails issus de la préparation de la mission Apollo 11. On peut faire le choix, non sans difficulté, de laisser de côté la première partie pour apprécier pleinement la seconde.
Mais quelque part, "Moonwalk One" est aussi intéressant de par sa valeur de témoignage, celui de l'état d'esprit d'une époque (fin 60s / début 70s) pour laquelle les premiers pas sur la lune étaient porteurs d'une pléthore d'espoirs et de rêves technologiques. La comparaison à "2001" de Kubrick, sorti un an avant le succès de la mission, paraît quelque peu inutile, que ce soit pour l'élever (œuvre compagnon) ou au contraire le rabaisser ("2001" du pauvre) : au-delà de quelques éléments un peu fantasques, comme la présence mystique du monument mégalithique de Stonehenge, Theo Kamecke filme l'épopée lunaire au plus près de l'action, du trio de spationautes aux couturières qui ont réalisé les combinaisons, du design de l'étage de propulsion à la foule réunie dans des camping cars près du site de Cap Canaveral. Avec en prime une petite séquence explicative, schémas à l'appui, sur les différentes étapes du projet (décollage, orbites, etc.). En ce sens, "Moonwalk One" se rapproche beaucoup plus du récent "First Man", pour sa dimension presque intimiste et son approche anti-spectaculaire du spectaculaire.
Le film documente autant l'exploit technique, à travers une profusion d'images captées entre autres dans le vif de l'action, que le contexte de création, de manière involontaire, avec le petit côté désuet des envolées mystiques et de questions amphigouriques assénées inlassablement (les possibilités qu'offrent les échantillons récupérés sur la lune, l'inconnu dans lequel l'humanité s'engouffre, le bond technologique et les responsabilités qui en découlent, etc.). Quand le film tente de décrire son propre contexte historique, en faisant un rapide tour du monde et des sentiments des hommes à cette époque, il prête à sourire. C'est un complètement amusant à l'euphorie collective, bien réelle, qu'avait suscité l'événement. Mais ce caractère didactique raté, très naïf, s'associe étonnamment bien à la poésie graphique recherchée dans de nombreuses séquences, à commencer par le décollage de la fusée et l'éjection de ses différents compartiments une fois lancée, parfois au ralenti.
Hitchcock / Truffaut (2015)
1 h 20 min. Sortie : 19 mai 2015 (France). Cinéma
Documentaire de Kent Jones
Morrinson a mis 5/10.
Annotation :
Un documentaire assez ennuyant, de par sa forme peu adaptée à son sujet. Il est question de se baser sur le célèbre livre d'entretiens entre Hitchcock et Truffaut, considéré comme beaucoup comme une référence universelle (ce dont je doute un peu), et d'y adjoindre quelques commentaires épars de réalisateurs contemporains (Fincher, Scorsese, Anderson, Gray, Bogdanovich, Assayas, Kurosawa K., Linklater, Schrader) pour dresser le portrait du "maître du suspense".
Mais cette édification ne m'a jamais beaucoup parlé, toutes ces dénominations fort avantageuses m'ont toujours paru exagérées. Et j'espère (j'en suis convaincu) qu'il y a dans le livre si célèbre bien plus que ces quelques analyses maigrichonnes : on évoque deux ou trois thèmes qui traversent l'œuvre de Hitchcock, on décortique quelques passages de deux ou trois films parmi les plus connus (Vertigo / Psycho / The Birds), et basta. Les commentaires des différents intervenants sont à la fois succincts et attendus, voire béats, par moments, "c'était le maître du suspens", "il maîtrisait tous les détails", "il écrivait avec sa caméra", et blablabla. Jamais le docu ne prend le temps de creuser en profondeur. Et aucun travail de filiation, pour rechercher ce qui persiste aujourd'hui de son cinéma. Tout le laïus sur cinéma de divertissement / cinéma d'auteur est vraiment bateau et traité de manière très rapide, en évoquant vite fait les Cahiers du cinéma. On nous vend un exercice de maïeutique révolutionnaire, alors que le résultat est plus proche de la contemplation superficielle béate. Même s'il y a des détails intéressants à picorer un peu partout, évidemment.
L'Année du Dragon (1985)
Year of the Dragon
2 h 14 min. Sortie : 13 novembre 1985 (France). Policier, Drame
Film de Michael Cimino
Morrinson a mis 7/10.
Annotation :
[ Revu ]
En observant Mickey Rourke déambuler dans les rues de Chinatown à New York, on se croirait à plusieurs reprises dans un film de guerre (par temps de paix). Sur une trame de thriller, Cimino met plutôt en scène la croisade d'un flic obsédé par des valeurs respectables (le respect de l'autre, de la communauté, la lutte contre les trafics et les oppressions) alors qu'il agit la plupart du temps comme le premier des connards. Raciste, machiste, etc. Comme un Don Quichotte perdu dans ses contre-temps.
L'idée est tentante d'établir plusieurs parallèles avec la vie personnelle de Cimino, qui sort de l'échec monumental de La Porte du Paradis, après avoir ruiné le studio de production United Artist. La blessure se lit un peu partout, dans l'écriture du personnage, dans les diatribes (sur les médias par exemple). J.-B. Thoret abuse toujours un peu de l'interprétation, mais il y a sans doute de nombreuses pistes valables, à commencer par le questionnement de l'histoire, ou des histoires (chinoise et polonaise, réunies sous la bannière américaine).
L'atmosphère graphique est très séduisante, et la reconstitution des quartiers chinois en studio est excellente. Ces ambiances brumeuses, ces arrières-cuisines, ces restaurants, tout cela fonctionne.bien hormis quelques séquences grossières (les fusillades, l'appartement de la journaliste qui ressemble un peu trop à un musée). J'ai un peu de mal à comprendre pourquoi ce film a été taxé de racisme à l'époque, tant les messages implicites sur la cohésion des minorités abondent. Les tentatives de romantisme, par contre, tombent souvent à l'eau.
La part d'ombre du rêve américain, la folie que peut susciter le refus obstiné de la compromission, l'échec de l'intégration sous le vernis national rassurant : beaucoup de thèmes intéressant derrière l'image d'ange exterminateur borné et ambigu de Mickey Rourke aka Stanley White.
Et le pansement sur le pif de Joey rappelle celui de Nicholson dans Chinatown.
La Reine des cartes (1949)
The Queen of Spades
1 h 35 min. Sortie : 3 mars 1950 (France). Drame, Épouvante-Horreur
Film de Thorold Dickinson
Morrinson a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.
Annotation :
Il y a dans "The Queen of Spades" comme un parfum fantastique annonciateur de l'ambiance si particulière que Jack Clayton est parvenu à tisser dans "Les Innocents", qui sortira douze ans plus tard. L'histoire diffère sensiblement, l'écrin esthétique est ici marqué du sceau des années 40 / 50 plutôt que de celui des années 60, mais les points communs abondent. Le charme des récits horrifiques britanniques, à la lisière du fantastique, empreints d'une certaine poésie, opère ici pleinement.
L'histoire est tirée d'une œuvre de l'écrivain russe Alexandre Pouchkine, et prend la forme d'un conte situé au début du 19ème siècle, à Saint-Pétersbourg. On suit les déambulations du soldat allemand d'origine modeste Herman Suvorin, dévoré par l'ambition, désireux d'accéder au niveau de richesse de ces jeunes princes russes qui jouent au Faro et parient de grandes sommes d'argents chaque soir. Une ambition qui trouve écho dans son idole, Bonaparte. Pour arriver à ses fins, il déploiera un cynisme sans limite : conquérir le cœur d'une jeune servante, afin d'accéder à l'entourage d'une vieille comtesse aussi riche que mystérieuse. Elle détiendrait le secret des trois cartes gagnantes au Faro, après avoir peu ou pro vendu son âme au diable.
Thorold Dickinson parvient à développer une atmosphère fantastique remarquable, romantique pendant un moment, flirtant constamment avec l'occulte, le surnaturel, et le conte mystérieux. La photographie particulièrement soignée est un terreau de choix pour constituer un univers très attrayant, au sein duquel le protagoniste évolue vers son objectif, à mesure qu'il s'enfonce dans la folie. Le film met relativement longtemps à démarrer, mais le crescendo de tension qu'il a soigneusement confectionné finit par délivrer tout sa puissance dans la dernière partie. Son obsession pour le secret de la comtesse, son désir violent de grimper l'échelle sociale et d'accéder à ses rêves quelles que soient les damnations résultantes, se font de plus en plus pesants et menaçants. Une trajectoire macabre qui file tout droit vers la tragédie.
Real Life (1979)
1 h 39 min. Sortie : 23 mars 1979 (États-Unis). Comédie
Film de Albert Brooks
Morrinson a mis 6/10 et a écrit une critique.
Annotation :
"Real Life" n'est sans doute pas le premier film satirique à critiquer les dérives de la télé, mais dans le registre de la comédie déboulonnant la téléréalité avant l'heure, il pourrait bien faire office de jalon temporel. Albert Brooks, devant et derrière la caméra, se met en scène dans ce qui est présenté comme une immersion au plus près d'une famille américaine "typique", suivant l'essentiel de leur vie en pleine violation de leur intimité. En 1979, cet OFNI entendait aborder sous un angle comico-critique une expérience qui avait déjà été tentée, en 1973, dans la série américaine "An American Family" (et dans laquelle Baudrillard y avait vu "la dissolution de la télévision dans la vie et la dissolution de la vie dans la télévision").
Le principal ressort comique du film, usé jusqu'à la corde, c'est le paradoxe constant (et poussif) entre d'un côté les prétentions du projet, vendu aux participants comme un documentaire immersif parfaitement réaliste et naturel, respectant les volontés de la famille (choisie au terme d'une batterie de tests), et de l'autre sa réalisation, avec son torrent de pragmatisme télévisuel, qui voit Albert Brooks constamment interférer avec le cours naturel des choses. Il fait le portrait d'un réalisateur éminemment narcissique, toujours prêt à se mettre en scène, très (passif) agressif et intrusif dans sa façon d'inviter les différents intervenants à se comporter de telle ou telle manière, à les contrôler dans leurs mouvements.
Le film ne joue pas uniquement sur ces aspects-là, en jouant régulièrement sur le fait que la famille ne renvoie pas toujours l'image qu'elle souhaiterait renvoyer : le père de famille qui est gêné que femme et enfants ne se comportent pas convenablement à table (pas comme d'habitude, bien sûr !), la fille qui veut faire la star devant la caméra, la femme qui flirte avec le réalisateur, etc. Tout le dispositif de mise en scène est révélé au début du film, en racontant avec une exagération très appuyée la technologie "très scientifique" (avec des psychologues pour le suivi de la famille) mise en œuvre pour capter les moindres faits et gestes de la famille, avec capteurs de température déclenchant automatiquement certaines caméras, et d'autres caméras "à la pointe de la technologie" ressemblant à un R2D2 que les caméraman portent sur leurs têtes.
La satire est souvent poussive dans le burlesque et le parodique, mais on peut difficilement lui nier ce côté prophétique en matière de voyeurisme télévisuel.
Conte d'été (1996)
1 h 53 min. Sortie : 5 juin 1996. Comédie dramatique, Romance
Film de Éric Rohmer
Morrinson a mis 5/10.
Annotation :
Le temps d'adaptation au style, qui peut potentiellement être infini en fonction du degré d'incompatibilité et d’hermétisme, gâche une bonne partie du visionnage, au sens où les premières séquences sont particulièrement pénibles à suivre. L'interprétation absolument pas naturelle des différents acteurs, cette sale manie de réciter leur texte de cette bien étrange façon, l'impression de raconter à voix haute leur état d'esprit qui ferait partie des descriptions pour le lecteur dans une pièce de théâtre... Les points dur sont bien nombreux.
Pourtant, à ma grande surprise, à partir d'un moment, le vernis craque, et l'artificialité totale du dispositif finit par passer au second plan.
Le film prend beaucoup de temps pour décrire la personnalité (apparente) de Melvil Poupaud, un matheux bohème piégé dans l'incertitude de ses sentiments. Trois filles l'attirent, pour des raisons bien différentes, de manière successive ou simultanée. La simple et sincère Margot ? La sensuelle mais retorse Solène ? La petite amie sur le retour Léna ? Son cœur n'en finit pas de chavirer, on dirait. Petit à petit, un champ des possibles se dessine, toujours dans le vague, dissimulant toujours plus de faux-semblants. La séductrice n'est pas dépourvue de principes, l'amante idéale n'est pas si détachée, la petite copine n'est pas si désintéressée que ça. L'idée, bien sûr, est de dépeindre un marivaudage particulier, centré sur les paroles.
Et des paroles, qu'est-ce qu'on s'en prend ! Et dans quel style ! J'avoue ne jamais être parvenu à l'apprécier, même à la fin, même si j'ai réussi à en faire abstraction et passer au-delà pour accéder aux émotions, amour, désir, mélancolie, etc. Mais que de patience demandée, pour si peu de résultats... C'est frustrant, d'autant que les efforts sont colossaux pour supporter ce jeu aussi robotique qui vire à la caricature et n'en sortira jamais. Le film est bien plus subtil que son apparence extérieure, de loin, mais quelle épreuve !
Sans doute que l'identification au protagoniste est facilitée, dans un certain sens : un matheux discret et rêveur, souvent paumé, aux émotions passant du tout au tout en l'espace de quelques jours...
Errementari (2018)
Errementari : El Herero y el Diablo
1 h 38 min. Sortie : 2 mars 2018 (Espagne). Épouvante-Horreur, Fantastique
Film de Paul Urkijo Alijo
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Décidément, je n'ai pas beaucoup d'atomes crochus avec le fantastique ibérique. Si l'on ajoute au grotesque visuel du type "De La Iglesia" des aspects liés au conte du type "Del Toro", le cocktail m'est particulièrement indigeste. D'autant que si l'histoire, dans la forme, est plutôt originale, avec un forgeron au passé trouble, le fond reste pavé de briques connues. Une petite fille triste dont les parents sont morts, elle est la risée de ses camarades qui la martyrisent, et elle se vengera, d'une façon ou d'une autre. Un personnage inquiétant, qui suscite de nombreuses croyances, mais qui s'avérera plus bienveillant que ce que tout le monde croyait. La légende peut se tromper. Ce sont des schémas qui, au-delà de leur caractère éventé, ne mobilise aucune empathie chez moi. Seul vrai intérêt à mes yeux : introduire la Première Guerre carliste, dont je n'avais rien (ou si peu) entendu parler auparavant. Les ambiances sont également bien travaillées, il faut le reconnaître, comme les alentours de la demeure du forgeron. Mais l'enfer, par exemple, est affreusement moche — et le film se termine là-dessus, ce qui est fâcheux. Des idées par-ci par-là, mais rien de bien construit (le démon qui change sans arrêt de tempérament par exemple, ça finit par m'exaspérer autant que les stéréotypes du début sur la maltraitance de la gamine). Je sens quelques originalités de forme, mais ce n'est clairement pas pour moi.
Honneur et Gloire (1969)
Cest a slava
1 h 27 min. Sortie : 24 janvier 1969 (Tchéquie). Historique
Film de Hynek Bocan
Morrinson a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.
Annotation :
Impossible de ne pas associer le film de Hynek Bocan au beaucoup plus célèbre "Marketa Lazarová" de František Vláčil, tant la proximité thématique est évidente. Même si le budget était vraisemblablement moins conséquent, et même si plusieurs siècles séparent l'action des deux œuvres tchécoslovaques (13ème siècle pour le premier et 17ème ici), même si le Moyen Âge et la lutte entre christianisme et paganisme sont remplacés par la guerre de Trente Ans et les conflits entre protestantisme et catholicisme, leurs colonnes vertébrales contiennent de nombreux points communs. À commencer par le chaos et la fange.
La guerre de Trente Ans est une série de conflits européens qui dura de 1618 à 1648, initiée par la révolte des sujets tchèques protestants et nourrie par la répression du Saint-Empire catholique (la maison de Habsbourg) qui suivit, désireux d’étendre son hégémonie et de convertir les hérétiques. C'est dans ce contexte particulier, à la frontière historique entre féodalité et absolutisme, que "Cest a slava" met en scène un ancien noble protestant en 1947, Václav Rynda, à la fin de la guerre, triste héritier du sort de son père qui s'était converti au catholicisme pour sauver sa famille. Il a perdu la guerre, il a perdu son honneur et sa fortune, et il est contraint de survivre dans les ruines d'un château, seul vestige d'une vague gloire passée.
Le film vaut le détour pour le portrait qu'il fait de cette révolte qui a échoué, de ce pays dévasté par les conflits et de la pauvreté qui gangrène l'espace. Václav Rynda, en renonçant à sa religion, a gardé la vie sauve mais erre sur ses maigres terres en triste sire, en survivant, en maître d'une poignée de paysans en haillons. C'est une vision incroyablement impitoyable de ce moment historique, qui est présenté en introduction de la plus implacable des manières, avec des corps suspendus au-dessus d'un bûcher et des croix en feu. La laideur de ces temps est à l'état pur, brute et brutale. On retrouve d'ailleurs le même habillage sonore que "Marketa Lazarová" (à défaut d'en retrouver la photographie extraordinaire, même si "Cest a slava" se défend assez bien), fait de chants folkloriques glaçants et de musiques doucement angoissantes.
Suite : https://www.senscritique.com/liste/Top_films_1969/374012
Notre dernière valse (1989)
Dansen med Regitze
1 h 42 min. Sortie : 1989 (France). Drame
Film de Caspar Rostrup
Morrinson a mis 2/10.
Annotation :
Indigestion de valeurs incompatibles avec ma définition du bon goût : académisme des sentiments, envergure intellectuelle d'un téléfilm, surplus de pathos en guise de twist final, et cerise sur le gâteau, il fut nommé à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère. Cette partie émergée du cinéma danois, qui est connue internationalement (je me remémore "Le Festin de Babette", encore passable, mais surtout l'éprouvant "Pelle le conquérant"), fait partie de ce que j'aime le moins.
C'est l'histoire de Karl Age et son épouse Regitze au crépuscule de leur vie. Sans qu'on en connaisse la raison au début, ils décident d'inviter tous leurs amis pour un repas festif chez eux. Le film déroule alors une succession ininterrompue de flashbacks visant à raconter qui est qui, comment ils se sont rencontrés, quels sont leurs antécédents, etc. Tous ces flashbacks sont soit amorcés soit terminés par un gros plans au temps présent du récit, sur la tête déconfite de Karl Age en pleine méditation mélancolique. Le genre de mélancolie qu'on assène comme on gave les oies, sans nuance et avec brutalité.
Il se rappelle ainsi son enfance, la Seconde Guerre mondiale, les moments heureux et les moments durs, les crises à travers lesquelles ils sont passés... Pour finalement terminer sur la raison de cet événement : son épouse est atteinte d'un cancer incurable et mourra dans les 6 mois. Paf. Voilà tout ce qui sous-tend le film. Une rétention d'information dégueulasse, artificielle, uniquement la pour titiller une larmichette. Et bien sûr, elle ne veut rien changer à son comportement, pour que moments heureux et moments tristes cohabitent de la plus sentimentalo-sentimentaliste des manières. Beurk.
La fiancée polonaise (1999)
De Poolse Bruid
1 h 30 min. Sortie : 14 avril 1999 (France). Comédie dramatique
Film de Karim Traidia
Morrinson a mis 3/10.
Annotation :
Romance ennuyante entre une jeune polonaise et un fermier hollandais. Elle s'est échappée on ne sait comment des maquereaux mafieux qui la forçaient à se prostituer, et elle trouve refuge chez cet homme mutique qui l'accepte telle quelle. Il est rustre et solitaire, mais généreux. Il la soigne, puis l'héberge et en échange elle l'aide à faire la femme de ménage (grosso modo). Elle ne parle pas plus de trois mots de néerlandais, mais ils communiquent tant bien que mal, et elle apprend petit à petit. Peu à peu, ô grande surprise, une relation naît entre les deux.
Pas mal des grosses ficelles habituelles dans le registre de la comédie dramatique télévisuelle sont utilisées ici, avec l'archétype de méchant qui vient menacer le fermier sur ses terres en réclamant la femme. Hormis ces péripéties peu engageantes, la description de leur quotidien est d'un ennui mortel, la vie dans cette ferme isolée ne contient rien d'intéressant cinématographiquement. Elle apprend comment dire "vous voulez du thé" en néerlandais, il lui achète une robe, elle lui fait une recette polonaise, il la protège des méchants, elle s'en va chercher sa fille en Pologne et il la retrouve quelque temps après. Point final.
Trop de retenue, trop d'implicite, même s'il faut reconnaître une certaine pudeur et une certaine générosité.