Hans Hellmut Kirst s’engage dans artillerie en 1932. Il gravit tous les échelons pour terminer le conflit avec les épaulettes de lieutenant. Il sert en Pologne, France et Russie. Retiré du front en 1944, il est affecté comme formateur et officier-instructeur en national-socialisme à l’école de la Flak d’Altenstadt. Dénoncé pour nazisme à la capitulation, il est emprisonné neuf mois, mais sort blanchi.


Son ouvrage 08/15 est le premier succès littéraire de l’Allemagne vaincue. 08/15 est la désignation réglementaire de la mitrailleuse Maxim. Le roman s’attache à décrire l’armée, les soldats et la vie de caserne, un sujet qu’il maîtrise : n’est-il pas demeuré treize ans sous les drapeaux ? Son livre paraîtra suffisamment autobiographique pour être publié dans la collection J’ai lu leur aventure.


Tiendrions-nous le Vigny prussien ? Le comte Alfred a servi quinze ans, mais sans combattre. Né en 1797, il était trop jeune pour défendre la monarchie ou l’Empire. Servitude et grandeur militaires (1835) est le récit mélancolique, romantique et admirablement écrit de souvenirs de veillées. Il a su faire parler ses anciens. Vigny croit à la beauté du service, à la valeur de courage et au désintéressement du soldat. La prose de Kirst est sèche. Il ne regrette rien. Il n’idéalise pas ses jeunes années et ne perçoit aucune vertu dans la conscription. Au contraire, il brosse le portrait, à charge, d’une société militaire bornée, de cadres imbus de leur toute-puissance et avilis par la servilité de leur subordonnées. Il s’opposera de toutes ses forces à la remilitarisation de la RFA.


Avec une extraordinaire ironie, Kirst décrit le sadisme de certains, la lâcheté ou la cécité des autres. Il peint avec jouissance les manœuvres du sergent Lindenberg, de l’armurier, du cuisinier ou de l’adjudant-chef Schulz, le plus bel archétype de « peau de vache » de la littérature. Ne s’est-il par juré de mâter ses recrues, d’en faire de « véritables » soldats ? Nous suivons le jeune Asch. Intelligent, il a tôt pris la mesure de ses supérieurs et appris, avec son camarade de 421, l’imperturbable Kowalski, à se faire oublier et, si nécessaire, respecter. Schultz perçoit en lui une graine de sergent. Le naïf Vierlein tente de bien faire, mais, le malchanceux accumule les bourdes, se mue en bouc émissaire des gradés de la batterie et est acculé au suicide.


Asch intervient en dénonçant les petites malversations des sous-officiers. Schulz refuse de croire à la révolte de son ancien protégé : c’est donc qu’il est fou. Le médecin militaire est convoqué. Le scandale gagne en puissance et nécessitera l’intervention du chef de corps, le pragmatique commandant Louchke, dit « La patate ». La comédie serait plaisante, si le contexte n’était point aussi sombre : le régiment se prépare à la guerre.


La suite.


2019

SBoisse
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le 3 juin 2016

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Step de Boisse

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