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Deux mille kilomètres avec une balle dans le coeur de David Agrech, semble nous promettre une intrigue riche en rebondissement : après que Daniel Ferrey, le narrateur, se soit fait tiré dessus et que son tueur se soit fait assassiner pendant son voyage de convalescence au Maroc, celui-ci se lance à la recherche de cette femme qui est resté lui parlé et lui tenir la main le temps que les urgences arrivent. Il en est certain, elle l’a sauvé. Le roman a de plus obtenu le « prix du roman d’aventures », comme nous l’indique le bandeau rouge imprimé directement sur le livre.


D’un autre côté, me direz-vous, notre homme semble quand même avoir « une balle dans le coeur ». Oui, sauf qu’on n’en parle pas beaucoup au fil du récit, sauf à la toute fin, que ça n’a pas l’air très douloureux vu comment il gambade partout dans Paris et que sa convalescence est tout de même très rapide pour quelqu’un qui a reçu trois balles.


Nous attendons donc de l’aventure, qui n’arrive pas vraiment. Nous vivons plutôt des histoires amoureuses nées des rencontres qu’a fait Daniel en recherchant sa « sauveuse » : la mannequin de l’affiche au-dessus de lui qui, peut-être, s’est incarné dans son esprit pour le soutenir ou alors la potentielle réelle jeune femme qui lui a tenu la main ce soir-là avant de disparaître. L’aventure, la vraie, nous la vivrons à la toute fin, lorsque tous les évènements s’enchaînent dans un rythme fou.


– Bon, d’accord, pas d’aventures, mais publié aux éditions du Masque, ça veut dire que c’est un roman policier, non ? Et dans un roman policier, normalement, il y a un peu d’action, non ?


– Heu… Normalement, en effet. Mais en fait, les « enquêtes » de Daniel consiste plus à envoyer une lettre à une mannequin, faire des recherches sur internet, surveiller le lieu de la tentative de son assassinat dans l’appartement d’une vieille dame ou alors, summum de la recherche d’indices, fouiner un peu dans le bureau de son beau-frère.


– Ok, pas d’aventures, pas d’action. A la rigueur, c’est dommage. Mais dans un roman policier, il y a quand même des mystères à résoudre, non ? Et, avec un peu d’effort, on peut prendre ça pour une aventure, peut-être.


– Peut-être. Ici, c’est plutôt peut-être pas. Vous avez déjà compris que le mystère de la sauveuse n’est pas des plus passionnant dans le récit qui essaye pourtant de placer celui-ci à son coeur. Mais il y a d’autres mystères, comme les affaires du beau-frère Victor un peu louche derrière sa générosité ou le passé de Clara (seconde petite ami de Daniel). Bien sûr, tout sera relié plus ou moins logiquement et plus ou moins habilement. On peut remarquer en effet la piètre qualité des énigmes qui sont posés à Daniel et à nous lecteurs, ainsi que son talent vraiment médiocre d’enquêteur : mis à part les secrets bien gardés de Victor que nous découvrons comme le narrateur à la fin du récit et uniquement en partie, les autres intrigues (identité de la sauveuse et fuite d’Anja) laissent transparaître les solutions au mystère très tôt, bien trop tôt. Elles semblent seulement invisible à Daniel, qui ne découvre les réponses qu’avec du recul ou lorsque on les lui sert sur un plateau.


– Bon, d’accord, il n ‘y a pas une once d’aventures dans la vie de Daniel, que nous suivons pourtant au pas à pas. Mais il n’y a pas d’autres personnages, je ne sais pas, moi, qui, par exemple, parle d’un passé plein d’aventures dans un dialogue ?


– Ah oui, exact, il y a ça. Anja, la première petite amie du narrateur, va ainsi nous parler de sa vie difficile sur un bâteau de pêche en Ecosse quelques années auparavant. Mais bon, nous n’avons même pas droit aux tempêtes, aux risques de naufrage ou à Moby Dick (bon, ok, je pousse un peu loin dans l’aventure, mais vous ne croyez pas que ce serait le minimum de nous parler d’une baleine sur quelques pages pour donner un peu d’aventure au livre ?), juste la difficulté de travailler deux mois comme premier job sur un bateau de pêche, et la manière pour le personnage de surmonter ces obstacles. Clara, la deuxième petite amie de Daniel, a, elle, une vie plus mouvementée et plus complexe, mais qui ne nous est révélé qu’à la fin du récit. Ce n’est qu’à ce moment là que surgit vraiment l’aventure : dans le passé de Clara, mais aussi dans le présent, quand Daniel va essayer d’aider Clara a sortir d’une situation très dure.


– Bon, et bien, alors, il y a quand même quelques surprises ?


– Oui, quelques-une, notamment à la fin, qui se montre très riche en rebondissements, en éléments de résolution et en révélations finales, même si certaines sont devinées par le lecteur au milieu du livre. Autrement, oui, les personnages nous réservent parfois des surprises, notamment Clara pendant toute son apparition dans le récit et Anja lors de sa sortie que nous pourrions qualifier de… théâtrale. Je ne vous en dis pas plus, vous arriverez peut-être à assimiler les quelques surprises que je vous annonce comme des éléments d’aventure et à apprécier Deux Mille Kilomètres avec une Balle dans le Coeur.


– En conclusion ?


– Deux mille kilomètres avec une balle dans le coeur se lit vite, avec facilité et plaisir, mais il faut avouer que nos attentes ne sont pas comblées, nous sommes déçus par les mystères si peu mystérieux et l’aventure pas aussi présente que promis… Dommage.

circonstancielle
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Créée

le 13 févr. 2021

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