Je n'avais plus rien lu de Kim Stanley Robinson depuis sa trilogie martienne qui commence dans le milieu de 21ème siècle et qui s'achève dans le 23ème siècle si mon souvenir est bon.
Avec 2312, on fait un bond sur le siècle suivant où l'on constate que l'être humain a continué son avancée dans la colonisation du système solaire dans tous les recoins possibles et dans des endroits improbables à la vie, qu'ils soient très proches du Soleil ou éloignés vers la ceinture de Kuiper, en passant par une base sur le sol de la perturbée Io, une des lunes de la géante Jupiter. L'imagination de l'écrivain porte loin encore, bien plus loin, dans une continuité chronologique de l'expansion de l'humanité dans l'espace.
Ce roman fait voyager depuis la cité de Terminateur (présente aussi dans Mars La Bleue je crois), roulant en permanence sur la surface nocturne de la planète Mercure, jusqu'aux contrées plutoniennes et la conquête humaine dans l'espace ne s'arrêtera pas-là, quand on apprend aussi que des astéroïdes ou des planétoïdes sont en passe d'être découpés pour en faire des futurs vaisseaux en vue d'une longue migration interstellaire. On passe par Io, Vénus et Titan, jusqu'à même planer en combinaison dans la haute atmosphère de Saturne, c'est dire, sans oublier la Terre présentant un sombre tableau politique et environnemental, ses habitants méprisant les colons spatiaux si privilégiés à leurs yeux.
Mais là, il n'est point question de tourisme car il y a une histoire impliquant le vivant et l'intelligence artificielle, cette dernière manifestée par les qubes, des ordinateurs quantiques intégrés ou non dans des corps humains, comme une deuxième conscience si on peut dire ainsi. Car on suit une 'jeune' héroïne, fougueuse et parfois agaçante malgré son âge canonique dépassant la centaine d'années, enquêtant entre des allers et retours dans le système solaire afin de découvrir ce qui se trame après une mort douteuse et un attentat d'une grande ampleur sur Terminateur. Son nom est Swan Er Hong, une femme ingénieure et artiste bisexuée, qui se verra aidée par d'autres personnages le long d'une enquête et dont elle s'éloignera plus ou moins, s'occupant d'autres projets ambitieux.
Tout n'est pas rose, car Kim Stanley Robinson décrit aussi un espace qui se balkanise et les Martiens tout comme les Saturniens établis sur les satellites naturels de la planète géante aux anneaux, forment des puissances importantes et rivales, alors que la Terre devient un enjeu pour son repeuplement de sa faune en majorité disparue il y a bien des décennies. Les Chinois, eux, semblent bien s'être accaparés de Vénus qui privilégie d'un bouclier solaire afin qu'elle se refroidisse à sa surface quand des opposants souhaitent faire accélérer la rotation de la planète.
L'histoire principale est entrecoupée d'interludes agaçantes qui cassent le rythme du récit qui balade le lecteur déjà bien suffisamment comme ça, à bord de plusieurs terrariums qui sont des astéroïdes évidés et rendus habitables, tout en disposant d'une gravité et chacun d'un environnement bien distinct des autres et propre à notre planète. Mais en tout cas, on ne pourra pas reprocher à Kim Stanley Robinson son imagination débordante et riche de précisions, ou le réalisable semble pousser encore les limites de l'impossible chez les êtres humains.