N'y a-t'il pas une certaine facilité à choisir une héroïne de fiction amnésique ? Cela permet à l'auteur de distiller ses informations avec une grande liberté et, ce faisant, de manipuler un lecteur qui n'en peut mais. Dans son premier roman, A la première étoile, l'irlandais Andrew Meehan ne cherche pas forcément à alimenter un suspense qui nourrit habituellement les thrillers qui prennent la perte de mémoire comme donnée de départ. Son but est plutôt de nous plonger dans la conscience confuse de son personnage (Eva), loin de son Irlande natale dans un Paris où elle a atterri on ne sait de quelle manière, échouée comme un cétacé et sans repères. Pour compliquer encore la trame de son roman, Meehan donne la vision d'autres protagonistes proches de Eva, qui en savent long sur la jeune femme et les circonstances de son amnésie sans pour autant éclairer véritablement notre lanterne. Le problème majeur du livre, outre sa construction éclatée et bien trop sophistiquée, est que son héroïne ne suscite que peu de sympathie et que son sort, au fond, ne nous importe peu. La question de son identité aurait pu d'ailleurs être réglée très vite si ses "amis" lui avaient révélé d'emblée qui elle était et ce qui lui était arrivé. Dans ce cas, il n'y aurait pas eu de roman et toutes ses circonvolutions narratives un peu stériles. Chapeau en passant à la traductrice qui a eu bien du mérite à se colleter à un style alambiqué puisque Andrew Meehan semble être adepte du "pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué." Peut-être le livre mérite t-il plus de concentration pour en saisir toutes les subtilités psychologiques mais il faut bien avouer que c'est plutôt l'ennui qui guette au détour des méandres de la mémoire d'une Eva bien ... évanescente.