Augustin Mal n’est pas un assassin.

Mais il est peut-être pire.

Et quand l’étrangeté de sa personne est enfin acceptée, que le personnage nous est enfin familier et amical la cruelle conséquence de ses actes et de sa personnalité ne peut que serrer le coeur. Car nous avons apprécié un être amoral, enfermé dans ses conceptions de la vie, inconscient des désirs et des attentes des autres.

Ses relations avec les autres sont calculées, il interprète tout son point de vue, tout va dans son sens. Son intégration dans un groupe de parole est glaçant. Son rapport avec les femmes est désastreux, mais pas selon lui. Sa vision de la féminité est absolue, sans équivoques ou contre-argumentations. Celles qui ne se soumettent pas à ses désirs ne l’ont pas compris, ou ne sont que d’affreuses créatures qui ne méritent pas l’attention des hommes.

Il est difficile de lui coller des étiquettes, le roman nous livre sa pensée, biaisée par une personnalité forte, parfois enfantine dans son obstination, toujours compatissante sur son comportement, tout au plus victime des autres. C’est notre lecture qui en détermine les traits de cette personnalité, c’est notre attention qui révèle à quel point son comportement surprend et dérange.

Julie Douard est romancière, dramaturge et professeur de philosophie. Cette créature de fiction qui s’écarte de la morale commune sans en avoir conscience, inconscient de son rapport dangereux aux autres, est une étrange leçon philosophique, inquiétante. Mais ce texte est aussi psychologique, creusant dans la pensée d’un homme, pour mieux comprendre toute la boue qui s’y cache. Et cet Augustin ne pourrait-il pas s’appeler Augustin Mâle, un exemple de personnalité masculine narcissique et perverse ?

Le texte est court mais les phrases sont évocatrices, toute la narration à la première personne se fait au bénéfice de son personnage clé. Il inquiète mais nous amuse aussi, par son décalage constant avec la réalité, par son aplomb incroyable, mais aussi ses quelques failles. Avant que la conclusion nous rappelle sa dangerosité.

Voici une lecture qui nous attrape par le cou, et nous regarde droit dans les yeux. Le lecteur doit soutenir le regard d’Augustin Mal. Julie Douard a crée un monstre.

SimplySmackkk
6
Écrit par

Créée

le 25 oct. 2022

Critique lue 81 fois

8 j'aime

3 commentaires

SimplySmackkk

Écrit par

Critique lue 81 fois

8
3

D'autres avis sur Augustin Mal n'est pas un assassin

Augustin Mal n'est pas un assassin
boop62
7

Humour décalé mais inquiétant personnage...

Inquiétant mais honnête : "Il ne faudrait pas que la sympathie que j'inspire vous empêche de voir en moi le malade qui vous ressemble. Mon cas n'est pas moins grave que le vôtre et ne croyez pas que...

le 24 juil. 2020

Du même critique

Calmos
SimplySmackkk
8

Calmos x Bertrand Blier

La Culture est belle car tentaculaire. Elle nous permet de rebondir d’oeuvre en oeuvre. Il y a des liens partout. On peut découvrir un cinéaste en partant d’autre chose qu’un film. Je ne connaissais...

le 2 avr. 2020

53 j'aime

13

Scott Pilgrim
SimplySmackkk
8

We are Sex Bob-Omb and we are here to make you think about death and get sad and stuff!

Le film adaptant le comic-book culte de Brian aura pris son temps avant d'arriver en France, quatre mois après sa sortie aux Etats-Unis tandis que le Blu-Ray est déjà sur les rayons. Pourquoi tant de...

le 5 janv. 2011

44 j'aime

12

The King's Man - Première Mission
SimplySmackkk
7

Kingsman : Le Commencement, retour heureux

En 2015, adaptant le comic-book de Mark Millar, Matthew Vaughn signe avec le premier KingsMan: Services secrets une belle réussite, mêlant une certaine élégance anglaise infusée dans un film aux...

le 30 déc. 2021

39 j'aime

12