Les contes regorgent de jeunes filles idéalisées par des auteurs masculins qui en faisaient des êtres fragiles à sauver, à protéger et à marier. Victimes d’un autre temps, elles sont à l’image d’une époque révolue qui ne laissait que peu de place aux femmes en dehors de la maison et de la vie maritale, comme si leur existence n’avait de valeur qu’au travers des hommes. Thomas Scotto se fait la voix de ces princesses de conte qui tendent à regagner leur liberté en défendant leurs intérêts et leur libre-arbitre.
Thomas Scotto donne la parole à une jeune fille, une fille de conte, afin qu’elle puisse défendre sa cause et montrer qu’elle vaut bien plus que la vie que les auteurs de conte lui ont donné. L’écriture en vers libres joue sur les références pour appuyer la manière dont les princesses sont traitées, guère plus précieuses qu’un joli meuble. Ainsi, Aux filles du conte prend la forme d’un manifeste féministe, dénonçant la condition des femmes au travers d’une écriture poétique et d’illustrations presque abstraites qui laissent place à l’imagination.
Si le texte est déjà une réussite, j’ai également été séduite par la forme de l’ouvrage, proche du pamphlet que l’on distribuerait dans les rues, un regroupement de feuilles en papier épais simplement reliés par un fil rouge cousu et laissé libre, sans attaches. Les illustrations de Frédérique Bertrand viennent répondre au texte avec lequel elles s’harmonisent. Le tout forme un ouvrage unique à découvrir de toute urgence.
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