C'est une chose étrange à la fin que le monde par Plume

Il m'a fallu du temps pour vraiment me laisser convaincre par ce roman, et ce n'est qu'une fois passé le premier quart que j'ai vraiment commencé à profiter pleinement de cette lecture...

Ormesson qu'on ne présente plus est un vrai régal ne serait-ce que pour l'élégance et le justesse de sa plume.
Il s'attèle pourtant là à une tâche difficile qui m'a quelque peu déroutée dans ses premières pages. Ormesson s'attaque à Dieu, la philosophie et la science : tout ce que l'homme a mis à son service dans sa grande et inachevée tentative pour comprendre le sens de la vie. Pas évident donc.

La plus grande difficulté selon moi est celle du ton et l'auteur a fait le choix d'une double-casquette qui tantôt lui donne autorité tantôt le protège des possibles dérives et accusations religieuses (parce qu'on le sait, dès qu'on s'attaque à Dieu on s'expose aux pierres...) : celle du grand-père plein d'expérience qui fait un bilan de sa vie et celle du prof.
Le récit façon "vieillard plein de sagesse" (je caricature un peu mais je l'ai vraiment ressenti comme çà par moment) a un côté émouvant et c'est dans cette partie qu'on ressent toute l'humanité de ce grand homme, sa bienveillance.
Celui façon prof est à la fois plus agaçant et aussi la plus intéressante (oui c'est étrange hein ?). Le ton professoral digne d'un maître de conférence un peu hautain instaure une distance parfois désagréable pour ne pas dire déplacée en début de roman puisque l'auteur y expose des faits scientifiques connus (on a donc un peu le sentiment de se faire prendre pour un inculte). Puis chemin faisant on s'y fait et c'est finalement par cette voie là que l'on aura les faits les plus intéressants le tout vulgarisé et retraduit pour le commun des mortels.

Cette double voix s'avère finalement assez riche et crée un équilibre dans le roman. Le plaisir est croissant et laisse suggérer une fin à la fois espérée et redoutée : on sait bien que Ormesson n'a pas la réponse à toutes ces questions que chacun se pose, mais quelle sera sa propre conclusion ?
J'ai regretté qu'il n'assume pas véritablement l'ensemble de ses réflexions (pourtant par moment assez prononcées) et qu'il préfère un dernier bilan plus guimauve qui n'apporte qu'un peu de sentimentalisme aux dernières pages...

Pour résumer un livre éminemment bien écrit sur un thème à la fois captivant et polémique. Ormesson s'en sort bien sur ce terrain glissant même s'il lui faut pour çà faire quelques pirouettes !
Il faudra tout de même un petit temps au lecteur pour vraiment entrer dans le roman et se faire à la dualité des tons, mais s'il pousse jusque là il sera récompensé par quelques anecdotes philosophiques et scientifiques plus qu'enrichissantes.
Plume
6
Écrit par

Créée

le 16 janv. 2012

Critique lue 307 fois

1 j'aime

Plume

Écrit par

Critique lue 307 fois

1

D'autres avis sur C'est une chose étrange à la fin que le monde

C'est une chose étrange à la fin que le monde
Bronislas
3

Critique de C'est une chose étrange à la fin que le monde par Bronislas

Premier Ormesson, et c'est une déception. À commencer par le style, absent de ces pages. C'est volontaire, sans doute, et dans un ouvrage qui revient sur les origines du monde, sur les premiers...

le 6 mars 2011

5 j'aime

3

C'est une chose étrange à la fin que le monde
spirifer
7

Parce que 42 n'est pas une réponse valable. Ou alors c'est pas la bonne question.

Un matin, Jean d'Ormesson s'est levé et s'est demandé pourquoi il était là. Pourquoi il y avait ses pantoufles par terre plutôt que le néant, pourquoi nous vivions et toute cette sorte de choses. En...

le 11 avr. 2014

4 j'aime

2

Du même critique

La Quête d'Ewilan - L'intégrale
Plume
8

Critique de La Quête d'Ewilan - L'intégrale par Plume

Camille est une jeune fille anormalement intelligente. Ses réflexions font d'elle une demoiselle étourdie, absorbée dans ses pensées. Au point qu'un jour, elle traverse sans regarder devant un...

le 3 oct. 2010

16 j'aime

Les Hauts de Hurle-Vent
Plume
9

Critique de Les Hauts de Hurle-Vent par Plume

Cette propriété balayée par les vents du haut de la lande enferme une sinistre histoire. Lockwood, nouveau locataire du voisinage va, suite à sa visite aux Hauts et à la vision d'un spectre errant,...

le 17 juin 2010

15 j'aime

2

Eleanor & Park
Plume
7

Critique de Eleanor & Park par Plume

Après avoir lu tant de bien sur ce roman je me suis finalement lancée cet été, encouragée par ma première lecture de Rowell satisfaisante il y a quelques mois. Et je dois dire que même si j'ai aimé,...

le 11 sept. 2014

14 j'aime