Improbable.


C'est le mot qui me vient à l'esprit.


J'ai pourtant laissé décanter le livre quelques jours avant d'écrire (grand prix de littérature policière 2017 quand même), mais au bout du compte, je ne sais toujours pas quoi en penser.


Sara Lövestam explique, en postface, qu'elle ne souhaitait pas initialement écrire un roman policier.


Cela se voit, et laisse le sentiment diffus d'une lecture bancale.


Car soyons honnête, lorsque Pocket marque le roman de l'estampille "thriller", on est un poil dans l’esbroufe.


Parce qu'un thriller suppose qu'une intrigue se mette en place, puis surtout qu'une tension naisse de la lecture...


En l’occurrence l'intrigue est bien posée dès les premières pages, ce qui est plutôt un bon point: Pernilla a perdu sa fille et fait appel à Kouplan qui se présente comme détective privé.


Jusque là rien de révolutionnaire.


Et puis, et puis... plus rien. 50, 100, 150 pages: Kouplan erre dans la rue, Kouplan va voir Pernilla, Pernilla fait à manger à Kouplan, Kouplan retourne dans la rue et Pernilla lui refait à manger... C'est long 150 pages...


C'est d'autant plus long lorsque chaque situation est tellement improbable qu'elle contraint presque à relire les pages précédentes pour vérifier qu'on n'a pas loupé un passage.


Kouplan, le personnage central, déjà.


Le type est un réfugié iranien au passé mystérieux, sans papiers, et, pour survivre dans l'attente de pouvoir présenter un nouveau dossier d'immigration (le premier a été rejeté), il se dit que ce serait vraiment une très bonne idée de devenir enquêteur privé...


Brillant. Enquêteur privé quand on ne peut officiellement s'adresser à aucune administration parce qu'on risque l'expulsion, c'est un peu comme un vegan qui déciderait de devenir boucher...


Rappelons que Pernilla a par ailleurs perdu sa fille, pas son chien hein, SA FILLE, depuis 4 jours quand elle fait appel à lui et qu'elle refuse d'alerter la police, ce qui devrait interpeller Kouplan dès le départ, mais comme il a pas mal besoin d'argent, on va dire qu'on passe sur ce détail.


L'enquête, ensuite: et ben Pernilla se rappelle de rien mais y'a un mec qui dit à Kouplan qu'il a peut être vu un homme, une semaine plus tôt, avec une petite fille, et aussi y'a un copain à Kouplan qui lui dit qu'il connait des gens qui connaissent d’autres gens qui connaissent un type qui bosse pour un mec qui fait la prostitution infantile...


Et là, devinez quoi; c'est le même type han la chance!


Vraiment, on n'y croit pas une seconde.


Par ailleurs, j'ai pas pour réputation d'être particulièrement intuitive, au demeurant je cherche rarement, même dans un polar, à connaitre la fin de l'histoire avant la fin de l'histoire, mais là, en gros, j'avais saisi l'embrouille au premier tiers du livre, en priant pour être surprise, en vain, comme souvent avec les prières.


Il faut ajouter à cela un style assez peu fluide, saccadé, un peu chaotique pour tout dire, qui, sans être indigeste, ne rend pas le récit plus sympathique.


En revanche la surprise naît de ce que l'auteure semble tout d'un coup reprendre le contrôle de son livre (ou se réveiller) dans les 80 (allez, arrondissons à 100) dernières pages.


Là, enfin, alors que le lecteur n'est pas loin d'être près du fond du gouffre, le récit prend vie, les personnages s'animent, deviennent chair, deviennent Hommes.


Là, enfin, se révèle l'empathie de l'auteur, se réveille l'humanité du lecteur.


Je n’ai donc pas été particulièrement convaincue par ce roman.


J'ai pour autant envie de laisser le bénéfice du doute à l'auteur dans la mesure où Chacun sa vérité est le premier tome d'une tétralogie, ce qui pourrait notamment expliquer la lenteur du récit dans la mise en place des personnages qui pourraient bien s'étoffer de belle manière.


Sans enthousiasme débordant, mais avec une certaine curiosité, affaire à suivre, donc...

Chatlala
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le 5 févr. 2018

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Chatlala

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