Un livre comme un combat de boxe
En achetant le livre, Youssouf Djibaba m’a dit « Je ne voulais pas parler d’une cité particulière bien qu’il y en ait une qui m’ait inspiré, c’est pour ça que je l’ai appelé la cité Carter ». C’était alors le début d’un voyage au cœur des cités marseillaises, construites autour du cœur de la ville, là où il y avait de la place pour dresser de grandes barres d’immeubles prêtes à toucher le ciel.
C’est l’histoire d’une bande de gosses qui trainent au milieu des trafics en tous genres, s’y font happer parfois et les fuient souvent. Brinquebalés entre les bancs d’une école qui ne s’intéresse pas à eux, soutenus par les travailleurs sociaux et les grands du quartier qui ont choisi une autre voix et agissent comme un filet pour les empêcher de tomber. Attirés pour certains par les représentants d’une religion devenue unique raison de vivre dans cet espace emmuré qu’on ne croit jamais pouvoir quitter. C’est l’histoire des soirées en ville, des filles qu’on rencontre et qu’on drague, de celles qu’on accueille dans la bande et qui finisse par en sortir, par la grande porte, laissant des cœurs meurtris. C’est l’histoire des prisons, des lettres qu’on envoie, et des familles abandonnées sur lesquelles on demande aux potes de veiller. Encore, c’est l’histoire de gamins jamais chez eux, dans les faits comme dans la métaphore ; trainant en bas des blocs plutôt que dans leurs chambres, se sentant nulle part chez eux – ni en France ni au bled – étrangers du monde. C’est l’histoire d’une violence mais c’est avant tout le regard qu’un homme pose sur sa vie, sur ses origines et sur sa ville.
Comme des rois contient la maladresse des premiers romans, les longueurs en moins. Tout y est très direct, les blessures, les morts, les heurts, l’espoir. Chaque évènement tient dans une dizaine de pages qui suffisent à nous bouleverser. C’est un livre comme un ring de boxe, ou chaque round met son héros à terre, et qui nous pousse à vouloir le voir se relever. Dans d’autres termes, parce que c’est un roman de la noirceur, c’est aussi un livre pensé comme une rixe contre son héros, qui nous tient en alerte jusqu’à la dernière ligne.
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