Une guerre civile sanglante a embrasé le Salvador entre 1979 et 1992, avec ses trop célèbres "escadrons de la mort." Les séquelles sont douloureusement présentes aujourd'hui dans un pays toujours marqué par la violence. Même s'il n'est jamais nommé dans Défriche coupe brûle, le premier roman de Claudia Hernandez, c'est bien du Salvador dont elle parle, même si son propos peut être facilement élargi à de nombreux pays d'Amérique latine. Les personnages du livre, féminins pour la plupart, n'y ont pas de nom : elles sont mère ou fille (les deux à la fois pour certaines) et représentent trois générations. Celle que l'on suit de manière préférentielle a accompagné son père dans les montagnes et a participé activement à la guerre, du côté du peuple rebelle. Elle pourrait être une héroïne de mélodrame, elle dont la première fille a été "vendue" à son corps défendant à une mère adoptive française. Sa quête pour la retrouver, à la fin du conflit, fournit parmi les plus belles pages du roman qui en compte beaucoup. Cette guerrière a eu 4 autres filles, aux aspirations différentes dont le destin nous est révélé également. Les histoires se mêlent et s'il est parfois difficile de savoir qui est qui, vu l'absence de noms et de prénoms, la puissance narrative et l'extrême densité du livre maintiennent sans faute en alerte. Oui, la guerre est finie au Salvador mais les temps restent hostiles pour toutes ces femmes magnifiées par la plume de Claudia Hernandez. A la fois étouffant et lumineux, Défriche coupe brûle révèle un talent brut de conteuse qui s'ajoute aux grands noms de la littérature latino-américaine.

Cinephile-doux
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Mes livres de 2021

Créée

le 1 avr. 2021

Critique lue 166 fois

1 j'aime

Cinephile-doux

Écrit par

Critique lue 166 fois

1

D'autres avis sur Défriche coupe brûle

Défriche coupe brûle
MaraDes_Bois
8

Histoires de femmes

Trois générations de femmes, pas de prénoms, quelques archétypes masculins (un père, un compagnon, des harceleurs) plus évoqués que présents... Ce récit en apnée commence au temps de la guérilla et...

le 14 mai 2021

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 28 mai 2022

79 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

79 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

72 j'aime

13