Petite note personnelle : en avril 2002, j'ai pris le train de Bucarest à Chisinau, capitale de la Moldavie. J'avais envie de découvrir ce pays mystérieux, indépendant depuis l'éclatement de l'URSS et cousin de la Roumanie, avec laquelle il forma une grande nation, dans le passé. Dans ce train, un homme d'affaires espagnol (sic) me fit un long exposé sur le caractère schizophrène du pays partagé entre russophones et roumanophones. Je n'ai passé que quelques jours à Chisinau et à la campagne mais j'avoue y avoir trouvé un peuple sympathique et doué d'un humour à toutes épreuves. Notamment celles des privations puisque la Moldavie a détrôné l'Albanie pour le titre peu enviable de pays le plus pauvre d'Europe.
Mille et une façons de quitter la Moldavie, le titre du roman de Vladimir Lortchenkov est explicite (louées soient Mirobole Editions pour cette traduction). L'auteur nous trace le portrait haut en couleurs d'un petit village déshérité dont les habitants n'ont qu'un espoir : quitter au plus vite ce pays de misère et rejoindre l'Italie. S'ensuit une série d'aventures invraisemblables et donquichottesques qui tiennent de la satire et de la fable (parfois morbide) avec une auto-dérision permanente qui n'épargne même pas le président de la république qui préférerait ouvrir une pizzeria chez nos cousins latins plutôt que de poursuivre son mandat. Mille et une trouvailles parsèment le récit le teintant de burlesque, de grotesque, de poésie et de surréalisme. Un tracteur peut devenir objet volant ou sous-marin, une fois bricolé, et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Lortchenkov est une sorte de Paasilinna qui aurait abusé de l'eau de vie locale et qui s'autorise tous les délires. Une tragi-comédie pleine de bruit et de fureur, très drôle et pertinente à la fois (la Moldavie pourrait rejoindre la Communauté européenne en 2019). On s'amuse beaucoup à la lecture de Lortchenkov. Voici un peuple qui dans le dénuement n'oublie pas d'espérer et de rire de ses propres malheurs.

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le 9 févr. 2017

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