Il y a plus qu'un air de famille entre Sukkwan Island et Désolations, les deux romans de David Vann, le dernier en date étant largement meilleur que le premier, dont la complaisance morbide n'a visiblement pas refroidi une critique dans l'ensemble élogieuse. Désolations commence plutôt bien, avec de longues descriptions d'une nature belle et farouche, celle d'Alaska, et des allers et retours entre plusieurs couples qui ont en commun de battre de l'aile. En particulier celui d'Irene et Gary, ce dernier persistant dans son idée de construire une cabane dans une île déserte, au grand dam de son épouse. Peu à peu, tout se dérègle, et un climat malsain commence à apparaître, que la plume de David Vann prend plaisir à contempler. Il y a chez cet auteur un pessimisme intrinsèque quant à notre condition d'être humain voué à ne s'épanouir que dans la solitude, ce qui peut se concevoir, mais surtout un goût pour enfoncer ses personnages dans la médiocrité (ils sont presque tous sans exception lâches et égoïstes), qui est déprimant au possible. Par bonheur, il ne ressort pas de sa manche un coup de théâtre sordide comme dans Sukkwan Island, il se contente de nous amener sans espoir de retour vers un dénouement qui ne pourra être que tragique. Plus fouillé du point de vue psychologique et moins manipulateur que son premier roman, Désolations laisse cependant une impression désagréable.