Il faudra quand même que j'en parle à mon psy. Pourquoi est-ce que je suis attirée par les hommes torturés ?
Prenez Don Draper de Mad Men : alors que la plupart n'y voient qu'un homme menteur, manipulateur, infidèle, (auto)destructeur, bref un "salopard" comme dit ma sœur, je n'y vois qu'un homme blessé et paumé que j'ai envie de prendre dans mes bras pour le rassurer.
Prenez David Vann : traumatisé dès le début de sa vie, il exorcise ses maux par une écriture (j'ai évité l'odieux "maux/mots", vous l'aurez remarqué) bourrée de souffrance et de chaos dont je suis devenue accro.
Prenez..., non, là, ça devient trop personnel.
David Vann donc. "Désolations", son deuxième roman, après le choc "Sukkwan Island".
Il dissèque ici les relations de plusieurs couples, le plus important étant celui formé par Irène et Gary, mariés depuis trente ans, et en crise. Leur fille, Rhoda qui attend désespérément que Jim, qu'elle idéalise, lui demande sa main.
Et deux autres couples, plus anodins, celui du fils, Mark, et de son épouse, et un autre de jeunes voyageurs.
Alors que "Sukkwan Island" était une course, sèche, rapide, brute, "Désolations" est une bombe à retardement. L'histoire se déroule toujours en Alaska, la tension est toujours aussi palpable dans chaque page, dans chaque chapitre, dans chaque couple. Mais David Vann prend son temps pour atteindre l'explosion, inévitable, on le sait, on le sent. Il y est aussi question de rêves brisés, d'esprits tourmentés, de ressentiments, de détresse. Et d'amour, bien sûr, mais tellement dévastateur.
Je dois avouer que j'ai terminé ce livre en novembre dernier. Il m'aura fallu plus de 6 mois pour avoir l'envie d'écrire une critique. Et aussi le courage de replonger dans ce récit. Trop pessimiste, trop déprimant. Alors que je pourrais relire ses autres livres avec un plaisir un peu sadique, du temps me sera nécessaire pour retourner aux "Désolations" de David Vann, certainement parce qu'elles me rappellent un peu trop celles proches de moi.
Parce que je ne suis et ne serai jamais père ou fils, je ne me suis pas identifiée aux personnages de "Sukkwan Island." Ça n'a pas empêchée ce livre de marquer ma vie de lectrice au fer rouge. Mais "Désolations" traite du couple, et on en connaît tous des couples, on en a tous fait partie d'un au moins une fois dans sa vie. Si toutefois ce n'est pas votre cas, je vous conseille d'essayer. On peut se faire méchamment mal mais c'est une expérience enrichissante et inoubliable.
Comme un roman de Vann.