Prodigieuse partouze de pop culture
Je n’aime vraiment pas le résumé de Frères de sang, celui qu’on trouve sur la quatrième de couv et qui figure aussi ci-dessus. Honnêtement, ce texte est merdique, d’une parce qu’il ne rend pas justice au bouquin, et de deux parce qu’il est complètement à côté de la plaque. On le lit, et on se dit « voilà un truc qui s’annonce comme un polar ultra-classique mâtiné d’une romance au sale goût de rivalité fraternelle. » Seulement voilà, moi j’aime pas les romans policiers, et les histoires de gonzesse, ça me fait chier. D’ailleurs, qi j’ai acheté Frères de sang, c’est uniquement parce qu’il n’y avait plus rien d’autre dans la boutique (même si je ne m’étendrai pas ici sur cette histoire) ; dans le cas contraire, je me serais certainement contenté de le reposer d’un air dégoûté, et ç’eut été bien dommage.
Attention hein, je ne dis pas que cette histoire de meuf qui navigue entre deux frangins n’existe pas, et effectivement le bouquin s’ouvre et se clôt bien sur l’affaire de meurtres sanglants évoquée dans le résumé, mais au bout du compte, ces éléments ne sont que des vagues toiles de fond, qui servent de structure pour soutenir le reste. Parce ce qui compte vraiment ici, ce n’est pas le fil rouge, c’est les marges ; ce n’est pas l’intrigue, ce sont ses acteurs. Frères de sang est avant tout un bouquin de personnages, une galerie bariolée et bien funky dans laquelle se croisent tout un tas de stéréotypes dont les caractérisations et les backgrounds sont les réels moteurs du récit.
Parmi eux, qui on trouve ? D’abord, notre héros, le journaliste badass au grand cœur, aux connexions improbables, au caractère bien trempé et à la solide street cred. A ses côtés, le geek de service qui lui sert de faire-valoir et de couteau suisse, la fliquette revêche à qui on la fait pas, et le vieux black sage et bienveillant, retraité des forces de l’ordre. Mais c’est pas tout, parce que le bestiaire des rôles secondaires se pare aussi (entre autres) d’un catcheur abruti à la testostérone de synthèse, d’un gangster cul-de-jatte haltérophile, d’un entrepreneur millionnaire excentrique et bouffeur de caviar en limousine blindée, d’un ex-junkie en quête de rédemption, d’un garde du corps au nom de requin et de membres de la mafia asiatique.
On a l’impression que Ferrigno a fait le pari qu’en accumulant suffisamment de trucs cools, aussi clichesques, lieux-communistes, capillotractés ou piqués des hannetons soient-ils, il parviendra à pondre un bouquin qui en est la somme (voire, encore mieux, le produit). Ca n’est pas censé marcher. Ca ne marche jamais. Mais pourtant, là, ça marche. Ce qui me pousse à soutenir que le mec possède tout de même une certaine forme de génie, même si j’ai du mal à comprendre comment ça fonctionne. Reste que la lecture de Frères de sang est un kiff monstrueux, un sandwich au pot-pourri de pop culture qui se bouffe comme de la junk-food pince-sans-rire. Dieu que c’est bon.