Impurs est le titre du nouveau livre de David Vann. Un auteur que nous connaissons bien, pour Sukkwan island, et Désolations, deux ouvrages intenses sur la solitude, l’incompréhension et la violence. L’auteur publie fidèlement chez Gallmeister, une maison d’édition qui lui correspond bien, spécialisée en autres choses dans ce que l’on appelle le « nature writing ». Originaire d’Alaska, David Vann a pour habitude de plonger ses personnages dans l’immensité glacée des paysages qui lui sont familiers, dans des îles sauvages ou dans des déserts naturels…
Impurs a de quoi surprendre au premier abord. Déjà il y fait chaud ! Son titre original, Dirt, aurait pu trouver une traduction comme « malsain », et donnerait un bon aperçu du fil de ce récit, bien que le héros, Galen, soit hanté par une quête spirituelle de « pureté » et de vie saine.
Galen est un jeune homme d’une vingtaine d’année, qui vit encore chez sa mère dans une sorte de fusion amour/haine étouffante. Sa mère elle-même vit dans la dépendance de sa propre mère sénile, archétype de la vieille radoteuse acariâtre, résidante d’une maison de retraite, et distribuant des rentes financières aléatoires à ses deux filles, dont la jalousie et la haine réciproque ne fait que s’accroître au fil du favoritisme ambiant dont l’une ou l’autre fait l’objet.
Cette situation déjà crispée trouve son apogée dans un séjour rassemblant la famille dans la maison de campagne. Tous les éléments d’un classique scénario de David Vann sont rassemblés : une maison coupée du monde dans la nature, une famille qui se déteste enfermée ensemble pour assouvir des motivations pécuniaires et retorses.
Seulement là où les choses se gangrènent d’avantage, c’est que Galen est complètement obsédé par sa cousine Jenifer, et que cette dernière n’a de cesse que de manœuvrer et d’enflammer celui qu’elle considère comme un marginal méprisable.
La deuxième partie du roman s’enfonce encore d’avantage dans la dérive et la psychose familiale, ce coup-ci dans un huis-clos entre la mère et le fils, asphyxiant et malsain.
Ce livre laissera une sensation amère et un peu écœurante, que l’auteur maîtrise complètement.
Dans une précédente interview que David Vann nous avait accordée à l’occasion de la sortie de Désolations, l’auteur nous parlait en ces termes de Dirt : « Ce coup-ci il n’y aura pas d’Alaska, pas de père, pas de suicide ni d’île. Mais une mère et son fils dans un paysage brûlant ».
La problématique familiale n’a pas fini de hanter David Vann. Si ses deux premiers livres abordaient la figure paternelle, associée des paysages froids et glacés, c’est à présent la figure maternelle, incarnée dans une chaleur sèche et envahissante qui est ici décortiquée.
C’est un livre intéressant, dur et sans pitié, peut-être moins abordable que ce à quoi nous avions été habitués. La deuxième partie souffre de beaucoup de longueurs, mais les amateurs de cet auteur ne seront pas complètement déçus.