la relève de Poppy Z Brite

Bien que j’aie dévoré d’une traite son 1er roman Dans les veines, je partais sceptique sur ce second roman de Morgane Caussarieu. J’avais l’impression que la 4ème page de couverture en disait trop et que, sous-entendant un roman assez axé sur la psychologie, je me demandais si cette jeune auteur était capable de relever le défi.

Et bien la réponse est oui. Un atout très important de ce roman réside dans l’approche psychologique très réaliste d’un enfant chétif, un laissé pour compte, brutalisé par ses camarades que Morgane Caussarieu décrit extrêmement bien. Et, contrairement à ce que j’avais déduis de ce 4ème de couverture, le roman ne se limite pas à cela. On retrouve également l’univers fantastique, sombre et torturé de Dans les veines qui va permettre au roman d’explorer également l’univers de la Louisiane coloniale, très différent de celui de cette campagne girondine où se situe l’intrigue et apporter ainsi une richesse culturelle agréable à la lecture.

De cette façon, si comme moi, vous peinez à la lecture des premières pages car l’écriture est très crue, très ancrée dans la réalité et que vous avez du mal à vous attacher à ce protagoniste cruel, continuez la lecture jusqu’à cet élément déclencheur, jusqu’à la visite de cette ferme brulée où le petit garçon va trouver un objet qui va changer son quotidien. A partir de ce moment-là, la lecture change, Morgane Caussarieu nous fait voyager entre ces deux moments de l’histoire et de la géographie, aussi vivants l’un que l’autre en transformant sa façon d’écrire pour l’adapter à son narrateur ainsi qu’à son époque.

Le choix de ce protagoniste anti-héros, décalé et rejeté de la société permet à Morgane Caussarieu de donner le point de vue de celui qu’on-n’a-pas-envie-de-comprendre, de celui qui, même s’il est inexcusable, peut avoir des raisons d’agir comme il agit, de par son passé et son quotidien. C’est d’ailleurs ce qui justifie très bien le choix du splatterpunk en tant que style littéraire, style écorché et nihiliste, qui s’exprime avec violence et crudité sur des sujets chocs. Ce genre permet notamment d’aborder ici, au travers de scènes abominables, des sujets de société

existants depuis des siècles et toujours d’actualité aujourd’hui.

De plus, grâce aux références à son premier roman, l'auteur créé ici un univers quasi-réel, rendant d'autant plus tangible cette histoire d'horreur fantastique et permet de tisser un lien d'addiction avec ses lecteurs.

Depuis des années je désespérais de retrouver un coup de cœur littéraire qui comblerait dans mon cœur et mon esprit, le vide laissé par Poppy Z Brite. Je l’avais entre-aperçu en lisant Dans les veines, mais c’est en lisant Je suis ton ombre, moins gratuit, plus poétique et plus riche, que je sais avoir trouvé en Morgane Caussarieu, cette remplaçante.