Au cœur du quartier polonais de Chicago. La Seconde Guerre Mondiale s’achève tout juste, les soldats mobilisés ont regagné la ville, la vie reprend son cours. Et pourtant certains ne reviendront jamais vraiment. C’est le cas de l’homme au bras d’or, dit « Frankie Machine », musicien et trafiquant, qu’une blessure de guerre a rendu dépendant à la morphine. Autour de Frankie gravitent des êtres cabossés, irrésistiblement attirés par sa force de caractère, ses mensonges et sa faiblesse. Il y a sa femme Sophie, ou « Zosh », paralysée par un accident de voiture, alors qu’il conduisait ivre. Ce n’est plus de l’amour, mais une immense culpabilité qui l’attache à elle, à ses reproches, à son désespoir. Il y a Molly-O, sous l’emprise des violences de John le barman, qui veut sauver Frankie de la drogue et de Sophie. Il y a Violet qui attend que son mari, le « Poor Old Husband », meure ; Nifty Louie, le fournisseur de Frankie, qu’il tue accidentellement ; et son protégé Sparrow, spécialiste en vol de chiens. Ces personnages flottent dans un univers pétri de défaites et de renonciations, ils se laissent peu à peu dévorer par la misère de l’après-guerre. Ce monde trouble n’était pas éloigné de celui de Nelson Algren lui-même, addicte au jeu et à l’alcool. Avec une acuité extrême et une poésie percutante, il nous décrit ces vies en marge de la société américaine, qui tentent de s’élever et de s’aider - et, irrémédiablement, s’entraînent les unes après les autres dans leur chute.

Extrait (Sophie):

She knew when the shadows waited to come by the way the luminous crucifix glowed a bit. They moved toward her then for warmth, they had been feeling unwanted all day. Like everyone else in the world for whom things had gone wrong. They knew that here they would come alive, for here they were loved and wanted at last. She alone knew how lost all shadows felt: it made them the dearer to her own unwanted heart.

To the heart weighed down by its own uselessness. What good is any unwanted heart? (…)

For she, like the luminous Christ, had also been betrayed. She too had bled, and bled each day, for another’s sin. Between herself and that tarnished crucifix a bond of blood and pain had grown. She had seen that it glowed out of love of everyone she herself wished to love and could not. How could she love who had never learned how?
Alphonse
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 20 janv. 2015

Critique lue 330 fois

3 j'aime

Alphonse

Écrit par

Critique lue 330 fois

3

D'autres avis sur L'Homme au bras d'or

L'Homme au bras d'or
TmbM
9

Critique de L'Homme au bras d'or par TmbM

Boris Vian avait de nombreuses cordes à son arc. En plus d'être écrivain, musicien, poète ou encore ingénieur, il était également traducteur. Et c'est à lui que l'on doit la version française du...

Par

le 7 oct. 2019

1 j'aime

Du même critique

La Mort de Virgile
Alphonse
10

Critique de La Mort de Virgile par Alphonse

Avec une virtuosité incroyable - moyenne formidable de deux phrases par page, aux visions juxtaposées, aux fantasmes contradictoires - Hermann Broch imagine l'agonie du célèbre poète latin. Le roman...

le 26 juil. 2014

11 j'aime

L'Infinie Comédie
Alphonse
10

Vouer sa vie, plonger

Depuis le mois d’août, Infinite Jest, l’œuvre immense et terrifiante de David Foster Wallace, est enfin disponible en français. Publié en 1996 aux Etats-Unis, ce chef-d’œuvre des XX et XXièmes...

le 19 janv. 2016

10 j'aime

Babbitt
Alphonse
7

"Vivre plus de quarante ans, c'est inconvenant, vulgaire, immoral" *

( * Dostoïevski) George F. Babbitt est un "Solid Citizen", un citoyen très respectable et très respecté. Digne héritier de son beau-père, il a récupéré son agence immobilière dans la riche banlieue...

le 7 sept. 2014

8 j'aime