J'ai lu L'Ombre de l'Autre de Fabio M. Mitchelli.
Là encore Fabio M. Mitchelli met en regard une fiction et le déroulement d'un fait divers réel. Ces personnages fictifs et réels se côtoient par réflexions interposées.
Cette fois c'est l'affaire Francis Heaulme qui donne la réplique à une affaire de meurtres
commis par un copycat respectueux de son idole.
Dans L'Ombre de l'Autre apparaît une famille en souffrance, en l'occurrence la famille Steiner. Et dans cette famille, le très torturé commandant Steiner est bien entendu un des meilleurs dans sa fonction, et ses amis sont aussi abîmés que lui. J'en veux pour preuve Raymond Sergianni (mon personnage favori), le psy expert auprès de la Cour d'Appel de Paris, 60 ans, alcoolique, frappé d'achondroplasie, et un modèle de résilience admirable.
Le couple enquêteur-psy fonctionne très bien et subtilement conduite.
Fabio M. Mitchelli procède pas à pas, comme dans une anamnèse psychologique, racontant encore et encore à différents interlocuteurs (et donc à son lecteur. sa lectrice) son affaire, mais à chaque fois avec une petite nuance, un indice parfois semblant insignifiant (et bien entendu ce n'est pas le cas) de plus.
Dans L'Ombre de l'Autre, se retrouvent les stigmates de l'écriture de Fabio M. Mitchelli : l'angoisse d'un corps ravagé par la maladie, l'angoisse du corps ravagé par l'Histoire et des héros marqués par les événements de vie douloureux, qui les abîment et semblent les affaiblir, et entreraient volontiers dans la liste des "héros les plus maltraités par leur auteur".
Il n'y a rien de lisse dans l'écriture de Mitchelli, seule vient border ces characters, la structuration ciselée du roman en tant que tel par l'inscription temporelle mais aussi spatiale, les lieux des chapitres comme les lieux des rencontres.
L'Ombre de l'Autre marque un tournant dans l'écriture de Fabio M. Mitchelli.
Ce qui importe pour apprécier, me semble-t-il, les romans de Fabio M. Mitchelli, et cela émerge visiblement dans L'Ombre de l'Autre, est de lâcher ce super pouvoir que s'octroient la plupart des lecteurs de polar.
Fabio M. Mitchelli ne me parait pas être du côté d'une écriture à la Agatha Christie, et clairement la filiation avec Truman Capote s'affirme.
Les Qui ? Pourquoi ? Comment ? n'ont pas en soi d'intérêts, en revanche suivre la scène du crime, la pente réflexive des protagonistes, son tissage humain permettent de profiter pleinement de l'écriture. Vouloir jouer au détective fait passer à côté du travail de l'auteur.
Et toujours la playlist et notamment Paul Young.
La suite de la vie de la famille Steiner Le Loup dans la Bergerie.
Bonne lecture !!