Honnêtement, le début de L'envol du héron laisse un sentiment proche de celui qui doit étreindre un albatros échoué sur le quai d'une gare : désorientation totale. La voix principale est celle d'une femme qui a connu plusieurs amours dans différents lieux et qui, une nuit d'insomnie, raconte toutes ses vies, des bords du Rhin à l'Irlande, pour aboutir à Hambourg. Dans une chronologie fortement chahutée. Parallèlement, un journal intime, celui d'une mère dont le fils a disparu, semble recouper quelques éléments du premier récit. Une confusion que Katharina Hagena entretient une bonne partie du livre avant que la lumière apparaisse peu à peu. S'il y a de nombreux thèmes qui surgissent, l'un d'entre eux s'impose : celui du sommeil. De par la profession de la narratrice mais pas seulement. Cette somnologue dort mal, elle ne sait pas que quelqu'un veille sur ses agissements et sa propre mère est plongée dans un grand sommeil. Il faudrait citer aussi d'autres personnages qui ont tous leur importance dans ce roman qui s'offre souvent des digressions renforçant l'impression de touffeur. De tristesse aussi car l'atmosphère est plutôt sombre dans L'envol du héron. C'est typiquement le genre de livre dont la construction savante peut laisser sur le quai ou au contraire fasciner par son ambiance à la fois douce et toxique.