De 1911 à 1924, La chute des géants narre le destin de cinq familles réparties aux états-unis, au Pays de Galles, en Angleterre, en Russie et Allemagne. Loin de se contenter d'un simple récit de guerre, Ken Follett dresse dans sa fresque un portrait plus global des évolutions et aspirations sociales de l'époque (droit du vote des femmes, fin de l'aristocratie, militantisme politique, etc) bouleversées, contrariées ou accélérées par le cours de l'Histoire revêtant les oripeaux horrifiques de la Grande Guerre.
Fourmillant d'anecdotes sur cette époque sans jamais donner l'impression de nous faire une leçon d'Histoire, on retrouve avec La Chute des géants le talent de Ken Follett à dépeindre une société avec autant de finesse que dans La Marque de Windfield. Si Ken Follett est manifestement plus à l'aise avec la partie britannique, sa peinture de la Russie pré-révolutionnaire ou celle de l'Amérique de Wilson ne manque pas d'intérêt.
Reste ses personnages, au cœur de son récit. Là, pas de surprise, Ken Follett ne renie pas ce qui fait de lui un excellent écrivain de littérature de gare qui peine toujours à s'élever au delà. Des personnages manichéens (il a fait bien pire, je dois l'admettre) aux histoires sentimentales pas franchement folichonnes qui se retrouvent toujours à un moment ou à un autre engoncés dans des scènes érotiques aussi crues qu'incongrues. S'il a su se refréner sur la quantité, on a quand même droit à une scène [SPOILERS] de masturbation à l'opéra londonien [FIN SPOILERS] d'une crédibilité douteuse, et qui surtout ne sert à rien, que ce soit au niveau de l'intrigue ou pour dépeindre le caractère des personnages.
Inutile de cracher dans la soupe cependant, Ken Follett réussit encore une fois à ferrer son lecteur au bout de quelques pages. Les 1000 pages se dévorent à toute berzingue, difficile de décrocher une fois lancé. Je regrette un peu cependant des ellipses temporelles parfois gargantuesques et (esprit franchouillard) l'absence totale de la France dans cette histoire, il y avait des choses à raconter sur la destinée de Géant oublié par Follett et 300 pages supplémentaires ne m'auraient pas déplu.
En espérant que la suite L'Hiver du Monde, débutant en 1933, soit du même acabit.