La fabrique des clichés
Un style agréable et léger dans les descriptions des ambiances, des lieux, des intrigues et des personnages secondaires. En revanche, l'intrigue principale est menée sans aucune subtilité, avec une...
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le 23 janv. 2020
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Un style agréable et léger dans les descriptions des ambiances, des lieux, des intrigues et des personnages secondaires. En revanche, l'intrigue principale est menée sans aucune subtilité, avec une accumulation de clichés, souvent peu vraisemblables, faisant tenir aux personnages principaux les rôles de marionnettes stéréotypées plutôt que des êtres humains en chair et en sang. Ainsi, le général commandant l'école, "le dernier prussien" en est réduit à une statue du commandeur vivante, rôle dont il ne se départira pour ainsi dire jamais, afin de mieux mettre en valeur l'opposition de style entre la vieille Prusse conservatrice du Kaiser et les jeunes fauves du Fuhrer. Seulement, ces stéréotypes ambulants relèvent plus de la fable, du conte, voire de la nouvelle. Un roman de 500 pages devrait prendre le temps de laisser se déployer dans plusieurs directions le caractère de ses personnages principaux, plutôt que de les réduires à une ou deux idées-directrices. Même remarque pour le lieutenant Kraft, le jeune héros, professeur anticonformiste dont le narrateur fait à la fois un détective avisé qui comprend toute l'affaire dès le début (l'enquête ne réservera au final aucune surprise en 500 pages, comme un Columbo mais en plus long), un professeur soucieux de "former des esprits libres" (on se croirait parfois dans Le cercle des poètes disparus), un antinazi fanatique (une fois de plus, sans trop vraiment savoir pourquoi),un grand prince se souciant de combattre les inégalités sociales, un amoureux irréprochable...bref, un étendard de toutes les vertus imaginables. Ses alliés sont aussi unilatéraux que lui, à tel point qu'ont finit par se demander pour quelle raison il y avait des nazis dans l'armée allemande en 1944.
Heureusement, les personnages secondaires paraissent au final plus humains et nuancés, abstraction faite des considérations politiques (puisque leur allégeance n'est jamais questionnée ni expliquée). Je pense notamment au portrait du capitaine Rhatsem, personnage pompeux et autosatisfait, dont le ridicule est finement esquissé, petite touche par petite touche, tout en dévoilant une composition plus complexe. Même chose pour celui de la commandante Frey, présentée initialement comme une marâtre hautaine et prétentieuse, qui gagne en profondeur au fil des intrigues secondaires.
Il est dommage que les personnage principaux ne connaissent pas une telle évolution, ils sont simplement si prévisibles qu'ils en deviennent irritants à suivre.
Finalement, on oubliera assez vite la trame principale et le héros, tout en conservant un souvenir agréable de certaines scènes et de quelques détails secondaires, aux marges de l'ensemble de l'oeuvre.
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le 23 janv. 2020
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