A conseiller aux lecteurs éventuellement intéressés par la découverte du divin Schopenhauer, le roman de Irvin Yalom possède cet aspect réjouissant consistant en une déférence à la fois d'ordre professionnel (l'auteur est psychothérapeute, il propose une lecture du philosophe correspondant à ses attributions propres), et assez nuancée pour ne pas sombrer dans l'adulation sectaire.

L'écriture agréable sans être flamboyante de Yalom contrebalance sans peine quelques redondances et facilités d'écriture (par exemple, le fait qu'aucun personnage ne soit réellement antipathique), même si l'on regrettera l'aspect bavard de l'ensemble, une part très majoritaire du récit reposant sur des dialogues heureusement bien sentis ; l'expérience discursive de l'auteur n'est certainement pas pour rien dans cette tendance forcenée au discours direct, qu'une finesse non négligeable parvient à faire passer avec brio, tout en posant des caractères bien distincts chez les différents personnages.

Quant au rapport avec la philosophie du Maître, il est plutôt réussi. Si le récit est calibré de manière très schématique (en gros, la trame suit le déroulement de la vie de Schopenhauer narrée dans les extraits de sa biographie qui jalonnent le roman avec régularité), on peut néanmoins saluer l'effort de cohérence apporté par l'auteur pour fournir une vraie histoire -si peut crédible qu'elle puisse paraître, elle n'est pas qu'un prétexte- sur la base d'une philosophie que tout un chacun ne tendrait pas à "vivre" en disciple.

Voilà tout le talent de Yalom : parvenir, malgré ses maladresses et un point de vue résolument psychologue, à donner vie à la philosophie de Schopenhauer.

Bien sur, le spécialiste regrettera que l'auteur s'arrête sur les aspects les plus célèbres et évidents de la pensée du Maître (Kant et son influence n'étant mentionnés que très succinctement), et en élude certains traits primordiaux (comme la philosophie de l'art), mais cela ne serait que pinaillage en comparaison du plaisir pris à la lecture de ce sympathique roman.
T_wallace
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le 7 sept. 2014

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