Mei s'échine dans une fabrique de vêtements au rythme des machines au bruit assourdissant et des cris du contremaître qui s'assure que les délais soient respectés et le travail bien fait. Privations, punitions injustes et manque de liberté sont le quotidien de ces petits mains, prisonnières de leur condition de femmes et des valeurs d'un pays qui peine à se réinventer.
Intime, le texte nous plonge avec justesse dans le quotidien de cette adolescente, ses pensées, ses espérances et ses émotions. Il nous dit la rudesse du travail et la rigidité d'un monde consumériste pour celles et ceux qui sont en bas de la chaîne de production. Lorsque, le temps d'une douce parenthèse, Mei découvre l'amour et laisse s'exprimer désir et plaisir, elle touche du doigt cette liberté tant rêvée. le retour à la réalité n'en est que plus amer.
Dénonçant les conditions de travail dans les manufactures chinoises, Sophie van der Linden se fait la voix de celles qui n'en ont pas en racontant l'âpreté d'un monde éreintant dépourvu d'humanité. Se faisant, elle invite le lecteur à repenser son mode de consommation en s'interrogeant sur l'origine et les modes de productions de ce qu'il achète.
La Fabrique du monde est un récit essentiel qui, en à peine plus de cent pages, bouleverse et pousse à ouvrir les yeux au travers d'un texte aux phrases courtes qui viennent exprimer avec force la douleur, la peur et le besoin de liberté.