Ce roman m'a été offert, et au vu de son synopsis, il était la promesse d'une brillante expérience, à la découverte d'un auteur siégeant à l'Académie française et dont l'une des spécialités est l'histoire de l'art italien, un domaine qui m'est également cher.
En effet, aimant passionnément l'Italie et ses 1001 merveilles, je m'attendais en toute légitimité à un beau et grand voyage dans la Florence des Médicis, sauf que... si voyage il y a eu, il ne m'a malheureusement pas dépaysée, et si découverte il y a eue, ce fut celle d'un style que je suis au regret de qualifier de nombriliste et d'approximatif.
Dominique Fernandez n'est hélas pas le premier académicien à faire naître en moi l'impression désagréable que l'auteur "se regarde écrire" comme d'autres s'écoutent parler. Sa maîtrise indéniable de la période (Renaissance italienne), sa réelle érudition sur les thèmes de la peinture florentine et plus généralement de l'art italien, ne suffisent pas à occulter une certaine suffisance, et son insistance à placer non pas l'art mais l'homosexualité au coeur de son roman a rapidement freiné mon enthousiasme.
En toute justice, c'était annoncé d'emblée puisque le titre, "La Société des mystères" ne fait pas référence à une assemblée d'artistes comme j'ai eu la naïveté de le croire en débutant ma lecture, mais à la communauté homosexuelle de l'Italie du XVIème siècle, période où il ne faisait certes pas bon se proclamer émule de Ganymède. Or, même si j'ai trouvé intéressants les développements sur ce thème, je me suis vite lassée en constatant qu'ils étaient en réalité le but ultime de l'auteur. Dominique Fernandez étant lui-même homosexuel, étant également le premier écrivain homosexuel élu par les Immortels (il assume tellement bien son homosexualité qu'il a fait sculpter Ganymède sur son épée), il me donne l'impression de faire de son homosexualité un statut à part entière. Or personnellement, j'ai un problème avec les personnes qui se définissent (ou semblent se définir) d'abord par leur sexualité, quelle qu'elle soit, comme si la sexualité influait sur le talent ou était une sorte de marque de distinction.
Partant de là, j'ai rapidement eu tendance à m'agacer au fil de ma lecture, et j'ai eu maintes occasions de regretter que cette obsession pour le sexe mâle nuise au style à proprement dire, truffé d'expressions qui m'ont semblé incongrues sous la plume d'un narrateur de la première moitié du XVIème siècle, telles que "pots de peintures", "paquets de cellulite" (terme apparu au XIXème siècle), "Il me gonflait de cette rengaine", des seins comparés à "des gants de toilette" (sic), un croquis jeté "à la corbeille" et des "boîtes à chaussures" qui s'empilent chez le cordonnier...
Ceci mis à part, dans les rares intervalles où il n'est question ni de queues ni de double-sens salaces dissimulés dans des tableaux ou des poèmes, et pendant lesquels l'auteur parvient à se détacher de la question des moeurs, on apprend avec plaisir une foule de détails sur la vie des artistes à la Renaissance, sur la politique des cités italiennes, sur la peinture et les arts, sur les artisans et commerçants, bref sur cette Florence que j'aime passionnément.
Je conclus par un conseil : roman à lire avec les reproductions des oeuvres décrites à portée de main, merci Google.