Le héros de cette histoire, Cléophas Léandro Pérez Zambullo, est un étudiant madrilène et un coureur de jupons. Une nuit, alors qu’il cherche à se venger d’une maîtresse qui l’a piégé, le jeune homme fait une trouvaille inattendue : un esprit démoniaque enfermé dans une bouteille. Succombant à la tentation, Cléophas brise le récipient duquel s’échappe Asmodée en personne. Ce diable, plein de gratitude, emporte l’étudiant dans les airs afin de lui révéler un spectacle riche en enseignements: postés sur les toits de Madrid, les deux compagnons observent toute la vanité et la perversité de la nature humaine, car les sortilèges d’Asmodée permettent de voir comme en plein jour dans les maisons aussi bien que dans les cœurs des habitants.
Ce roman, publié au début du XVIIIème siècle, nous emporte dans un voyage onirique et tourbillonnant. C’est non seulement un bon panorama de la société vers 1700, mais aussi une réflexion tragi-comique sur les travers de nos semblables. De palais en hôtels particuliers, de navires corsaires en harems, le même spectacle se joue sans cesse pour la plus grande joie du démon. Aucune catégorie sociale n’est épargnée par la satire de l'auteur, pas même ses confrères littérateurs. Comme beaucoup d’écrivains de son époque, Lesage est préoccupé de morale ; mais quelle fantaisie et quel humour comparé aux petits portraits de La Bruyère par exemple. La structure du roman est foisonnante, comportant des récits à tiroir, quelques brèves esquisses, mais aussi des histoires plus longues enchâssées dans les précédentes. L'amour et l'aventure nous tiennent en haleine à chaque page. Finalement, Cléophas et son acolyte boiteux devront se séparer. L’étudiant sera-t-il damné ? Asmodée retournera-t-il dans sa prison de verre ? A vous de jouer, lecteurs