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Sur le modèle de ses autres petits guides, les éditions ActuSF ont donné la parole à Patrice Louinet, THE expert de l’auteur américain Robert E. Howard.


Mais oui, vous savez bien ? Le papa de Conan ! Le barbare de l’Âge Hyborien, incarné sur le grand écran par le musculeux Arnold Schwarzenegger. Histoire de remettre les pendules à l’heure, précisons d’emblée que le film de John Milius n’est en rien une adaptation de l’œuvre de Howard. Il apparaît plutôt comme une transposition de l’idéologie virile et martiale, pour ne pas dire fasciste zen, du réalisateur américain, dans un décor devant plus à l’Asie mongole qu’à l’âge Hyborien. Une vision bien éloignée de celle de l’auteur américain. Un fait que rappelle THE expert dans cet ouvrage allant à l’essentiel sans céder à la généralisation abusive.


Par le truchement d’une introduction efficace, d’une courte biographie et de nombreuses suggestions de lecture (vingt titres essentiels, vingt autres à découvrir et dix notices laconiques sur des titres, certes mineurs, mais intéressants d’un point de vue ou d’un autre), Patrice Louinet parcourt ainsi l’œuvre prolifique de Robert E. Howard. Il distille les informations en les replaçant dans leur contexte et traque les contresens et idées reçues, notamment sur l’auteur lui-même. Howard a en effet longtemps pâti dans l’Hexagone d’une mauvaise réputation. Celle d’un auteur raciste et reclus, colosse aux pieds d’argile, vivant sous la coupe d’une mère autoritaire dont la mort aurait provoqué son suicide.


S’il n’était sans doute pas complètement exempt de tout racisme dans son quotidien, l’auteur texan ne l’était pas plus que ses contemporains. A vrai dire, l’opinion du bonhomme a beaucoup évolué, notamment au cours de ses joutes épistolaires avec Howard Phillips Lovecraft. Il y a développé un attachement pour la liberté individuelle, affichant sa méfiance envers toutes les formes de domination organisée et hiérarchisée, fascisme y compris. Dans ses nouvelles, surtout les dernières, et au travers de sa création la plus connues Conan, l’auteur américain s’est régulièrement opposé à toute idée ou tous gouvernement dont le dessein consisterait à broyer les libertés et étrangler la vie intellectuelle. On est bien loin du barbare professant l’écrasement de ses ennemis, tout en appréciant les voir mourir devant lui, sous les lamentations de leurs femmes. À ce propos, Robert E. Howard n’oppose pas strictement la barbarie et la civilisation. S’il n’exonère pas la première de sa violence, une exigence vitale dictée par les circonstances, il n’entretient toutefois aucune illusion quant à la seconde.


Dans son œuvre, Robert E. Howard affectionne les récits pseudo-historiques. La magie et le surnaturel cèdent volontiers la place à la violence crue, à l’érotisme et aux scènes épiques. Plus que les héros ou les souverains, ce sont les perdants, les anonymes qui l’intéressent. Sa bibliographie comporte quelques caractères mémorables relevant de cette veine. Solomon Kane, Bran Mac Morn, Kull, El Borak, l’auteur américain a ainsi crée de nombreux héros récurrents. Mais, la postérité a surtout retenu Conan. Ce dernier a hélas longtemps souffert des tripatouillages de Lyon Sprague de Camp. Le sinistre personnage n’a pas ménagé ses efforts pour réarranger ses aventures à sa convenance, imaginant une sorte de plan de carrière au barbare, dans un idéal conforme au très américain struggle for life. Un contresens dont on commence heureusement à se débarrasser depuis une dizaine d’années.


Robert E. Howard apparaît ainsi comme le créateur de la fantasy moderne, celle que reprendront à leur compte George R.R. Martin, Karl Edward Wagner et bien d’autres, avec plus ou moins de succès et de réussite. Et si l’on retient surtout John R.R. Tolkien lorsque l’on parle de fantasy, n’oublions-pas le Texan dans la généalogie de ses créateurs.


Au final, Le Guide Howard se révèle donc un petit ouvrage bien pratique, salutaire dans sa volonté de remettre à plat quelques préjugés, et bien utile pour (re)découvrir les différents aspects de l’œuvre de Robert E. Howard.


Aparté : on trouve aussi dans ce guide des informations sur les multiples adaptations et occurrences du barbare, à la fois au cinéma, à la télé et chez Marvel Comics. Un recension ne négligeant pas les autres créatures de l’auteur texan. De quoi approfondir sa connaissance et peut-être se laisser aller à quelques projections déviantes.


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leleul
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le 8 mai 2016

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