L'espoir fait vivre dit-on. On a envie de le croire, même si cet espoir fait plus souvent mourir comme en témoignent les nombreuses idéologies et croyances prônant un monde meilleur.
Et si le monde s'achevait demain ? Si l'Histoire redémarrait à zéro ? L'espoir de voir naître un monde meilleur, après la catastrophe, aurait-il voix au chapitre ? On se force à le croire, mais rien n'est moins sûr, si l'on en juge le corpus des romans écrits sur le sujet.
À cette question, Justine Niogret répond par Gueule de truie, roman sans concession oscillant entre espoir et désespoir.

Adonc le monde est mort dans un grand Flache. On n'en saura pas davantage. Pour les survivants commence un long chemin de souffrance, jalonnés de tueries, dans les décombres du monde d'avant.
Gueule de truie n'a connu rien d'autre que cet univers de poussière et de cendres. La poussière des ossements et les cendres de la civilisation, consumée par l'apocalypse. Le bonhomme est une Cavale, autrement dit un tueur au service des Pères de l'Église, dont le nom tient tout entier dans ce masque qui lui recouvre le visage de manière permanente.
Un jour le monde s'est tu parce que Dieu a parlé. Le Verbe a soufflé sur le vacarme des hommes. Il l'a éteint, mais pas totalement. Pour rendre la Terre à la quiétude divine, Gueule de truie doit achever l'œuvre de Dieu. C'est son devoir, sa raison d'exister. Ainsi pourra régner pour l'éternité un silence de sépulcre.

Autant le dire tout de suite, j'ai détesté ce court roman. Jamais un livre ne m'aura à ce point énervé. À chaud, l'envie de caler une armoire normande avec m'est venu à l'esprit plus d'une fois. Pourtant, j'ai résisté, achevant ma lecture en sautant les pages.
Si j'avais écrit ma chronique immédiatement, mes propos auraient pris une tournure désagréable et sans doute injuste. J'ai laissé décanter. La tension est retombée.

Il n'en demeure pas moins que le nouveau roman de Justine Niogret m'a beaucoup agacé. Les tics et répétitions m'ont horripilé, l'auteur optant pour une écriture hachée, tendue, forcée, où les phrases courtes, les impressions visuelles et les états d'âme ressassés de la Cavale, nous sont livrés brut de décoffrage.
Les personnages de Justine Niogret sont souvent en quête. À la recherche d'un nom, d'un sens à leur vie ou, de manière plus prosaïque, du bonheur. Ici, on ne sait pas exactement ce que cherche Gueule de truie. Boule de haine recuite, puits de douleur sans fond (je fais dans le cliché, si je veux) où résonnent les échos d'une violence latente, la Cavale nous emmène dans un voyage sans but réel, avec en guise de décor les visions fantasmées de son intellect malade et les vestiges du passé.
Gueule de truie apparaît comme un néant fait homme. Un vide à combler, armé de ses seuls poings, évoluant sur le fil du nihilisme. Son paysage intérieur ne suscite toutefois guère l'empathie. Il ne provoque pas grand chose à vrai dire...
Je suis resté englué dans les (faux) espoirs du personnage, sa détestation des Gens et de son propre corps. J'ai bu jusqu'à la lie le compte-rendu de ses obsessions. Et, ce qui s'annonçait comme un récit post-apo – aussi inoubliable que La Route de Cormac McCarthy (joli foutage de gueule, même pas de truie, que cette quatrième de couverture) – s'est avéré une longue litanie, répétitive et vaine, digne de la branlette d'un adolescent en crise.

Bref, même si les précédent romans de Justine Niogret m'avaient convaincu de suivre l'auteur, je dois avouer que Gueule de truie a considérablement refroidi mon enthousiasme.
leleul
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le 27 févr. 2013

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