Ma lecture de Gueule de Truie commençait sous les meilleures auspices : un magnifique couverture, du postapo, une écriture poétique hors du commun.
Le style très poétique crie de tous ses mots que, oui, le postapo ça peut être beau ! Si pour les images il y a une certaine esthétique de la ruine, il en est de même pour les mots. Le cassé, le poussiéreux, le sale, le violent, le sang, tout ça peut être beau. Non je ne suis pas folle et cela ne fait pas de moi quelqu'un qui voudrait avoir ce genre de monde sous le nez tous les jours. Comme on peut fortement apprécier les œuvres de Dali et pourtant ne pas en vouloir dans son salon.
"L'autre le regarde avec des yeux humides de chien qu'on frappe. Gueule de Truie n'est pas un imbécile, il n'est dupe de rien. Il sait que ces gens ne savent même plus parler. Il sait que l'autre ne comprend qu'à peine; le ton, un peu, comme les animaux. Des mots simples, vite avalés et digérés, des ordres, des morceaux d'information. Faim, soif, brutal, dormir, peur. Rien d'autre. Gueule de Truie les hait à un point qui lui brûle le ventre. Comme s'il pissait du napalm."
Gueule de Truie a été élevé par les Pères. Pour tuer. Achever la populace médiocre qui survit péniblement sur cette terre post "Flache". Il a grandi dans cet unique but. Une machine à tuer. Ses seuls sentiments : la colère et le dégoût. Jusqu'à ce qu'il rencontre une jeune fille qui porte une boîte. Elle semble savoir où elle va avec sa boîte. S'ensuit l'histoire de la rencontre entre ces deux-là et leur voyage en enfer.
"Ce que tu tournes dans ta tête. Sans fin, sans fond, sans repos. Le mot, le mot ! Tes questions sans réponses. Ce sont des fantômes. Tu serais sage de ne pas te battre avec eux. Ils ne peuvent que noyer ce que tu es. Tu es déjà lourd. Les profondeurs te seraient fatales, peut-être."
Jusque là tout va bien, j'accrochais bien. Moi aussi je voulais savoir ce qu'il y avait dans cette boîte et ce qu'elle allait en faire. Moi aussi je voulais voir jusqu'où la quête de soi de Gueule de Truie allait aller, jusqu'où la relation naissante de ces deux-là les emmènerait Puis le bouquin sombre dans le mysticisme incompréhensible. Et le reste est vide de sens. Encore un bouquin dans lequel l'espoir n'est pas permis, où les actions des personnages n'ont aucune finalité. Je veux bien que la mode est au pessimisme mais tout de même ... Parfois je me demande si ce n'est pas la solution de facilité. Ce trop de RIEN, ça me vide, littéralement. Et on finit par ne plus rien avoir à dire.
"Le monde est mort et rien d'important n'a été perdu [...]."
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