Les lieux occupent une place importante dans ce roman initiatique. Le jeune héros Franz vivait avec sa mère dans une cabane de pêcheur sur les rives de l’Attersee (le plus grand lac d’Autriche), avec les montagnes en arrière-plan. Et le voilà propulsé à 17 ans à Vienne, un an avant l’Anschluss. Ce jeune apprenti maladroit, avec des mains de filles, qui parfois s’asseyait sur les algues au fond du lac pour écouter les bruits et observer ce monde aquatique étrange, porte le même regard étonné sur la ville, ses habitants, ses divertissements et la politique. Le roman est empreint de poésie, ce qui est particulièrement précieux et rare quand on prend pour cadre le nazisme triomphant. Ses échanges épistolaires avec sa mère, ses conversations sur l’amour avec Freud, son application à comparer les journaux, sa passion torrentielle pour Anezka, ses rêves affichés à la devanture, sont autant de perles, malgré leur fragilité face à la boue brune du déferlement nazi.