Les Évaporés par jerome60
Kaze a choisi de disparaître après avoir appris son licenciement. Il a laissé une lettre à sa femme avant de « s’évaporer », comme des milliers d’autres le font chaque année au Japon, quittant tout sans donner d’explication. Apprenant la nouvelle, Yukiko, la fille de Kaze, rentre dare-dare des États-Unis où elle vit depuis quinze ans. Dans ses bagages, Richard B., poète et détective privé, américain pur jus qui a été pendant quelques temps son amant. C’est lui qui va mener l’enquête et tenter de retrouver Kaze dans un Japon encore sous le choc après la tragédie de Fukushima.
Le lecteur suit en parallèle le parcours de "l’évaporé", sa rencontre avec le jeune Akainu qui a fui seul le nord du pays après la catastrophe nucléaire et les recherches menées par Richard B. et Yukiko. Mais l’aspect « policier » passe rapidement au second plan. En courts chapitres, Thomas B. Revedry insuffle à son récit un rythme syncopé, alternant les scènes quasi contemplatives et les brusques accélérations de l’intrigue. Le texte est traversé par quelques fulgurances poétiques au lyrisme contenu et à la force d’évocation éblouissante. La description du Japon contemporain et du traumatisme post-Fukushima est très réaliste. Les conséquences sociales de la tragédie sont notamment expliquées, comme les tractations financières menées par des vautours qui profitent de catastrophes de ce genre pour engranger les milliards sur le dos des sinistrés. Une dimension sociale qui donne davantage d’ampleur aux trajectoires des différents protagonistes.
Les évaporés relève à la fois de la quête et de la fuite. Quête d’identité pour Yukiko, du sens de l’existence pour Richard B., fuite vers une possible reconstruction pour Kaze et Aikanu. C’est surtout un texte somptueux, puissant, équilibré, parfaitement articulé. Un roman d’une grande profondeur où un auteur à l’évidence brillant a su maîtriser sa plume pour ne pas tomber dans une démonstration de style se cantonnant au purement esthétique. Une réussite totale.