Puisque nous n'aurons plus de nouvelles d'Erlendur, sauf si Indridason revient à nouveau sur ses premières années de service dans la police, il faut accepter de cheminer désormais en compagnie d'autres personnages, notamment Konrad, policier à la retraite mais toujours prêt à agir quand on fait appel à lui. Konrad, qui revient en protagoniste principal après Ce que savait la nuit, n'est plus un inconnu mais reste cependant moins attachant que son prédécesseur chez Indridason bien que son histoire personnelle et familiale, qui a d'ailleurs une grande importance dans Les fantômes de Reykjavik, soit des plus tourmentées. Il est encore difficile à cerner mais son humanité blessée ne fait aucun doute et se trouve confrontée à deux enquêtes, l'une surgie du passé et l'autre immédiate, qui ne vont pas le laisser indemne, pas plus que le lecteur. Comme souvent, l'auteur islandais aime à revenir sur l'histoire de son pays et de sa capitale, la nostalgie se mêlant à une certaine lucidité pour ne pas affirmer de manière péremptoire qu'avant, c'était mieux. Non, cela pouvait être glauque aussi, l'âme humaine n'ayant guère évolué au fil du temps et l'horreur des crimes commis, pas davantage. Avec son savoir-faire habituel, Indridason réussit sans peine à nous intéresser à deux intrigues éloignées qui se rejoignent dans les atrocités que certains adultes pervers commettent à l'égard d'enfants. Au fond, c'est cela la thématique majeure du romancier dans l'ensemble de son œuvre, le viol de l'innocence, aussi bien concernant les êtres que pour une nation toute entière (voir ses livres se déroulant pendant "l'occupation américaine", sorte de péché originel qui a sorti l'Islande de son splendide et heureux isolement). Les fantômes de Reykjavik n'est pas l'ouvrage le plus brillant d'Indridason mais il est suffisamment habile et bien construit pour qu'on lui pardonne quelques ficelles narratives voyantes avec, ce n'est pas désagréable, une petite touche de fantastique, au passage.

Cinephile-doux
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Mes livres de 2020

Créée

le 22 févr. 2020

Critique lue 453 fois

2 j'aime

2 commentaires

Cinephile-doux

Écrit par

Critique lue 453 fois

2
2

D'autres avis sur Les Fantômes de Reykjavik

Les Fantômes de Reykjavik
Cinephile-doux
7

Le viol de l'innocence

Puisque nous n'aurons plus de nouvelles d'Erlendur, sauf si Indridason revient à nouveau sur ses premières années de service dans la police, il faut accepter de cheminer désormais en compagnie...

le 22 févr. 2020

2 j'aime

2

Les Fantômes de Reykjavik
Falkinth
7

Cold Case

Les Fantômes de Reykjavik À la recherche d'un nouveau polar à lire, je parcourrais la bibliothèque de ma mère en quête du précieux sésame. Je tombe alors sur ce livre de Arnaldur Indridason, les...

le 1 nov. 2021

Les Fantômes de Reykjavik
matatoune
9

Un vrai plaiisr de lecture !

Choisi lors de la Masse critique romans policiers du mois de mars sur Babelio, Les fantômes de Reykjavik de Arnaldur Indriðason lu par Martin Spinhayer fut une expérience très enrichissante. Quelques...

le 7 avr. 2021

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 28 mai 2022

79 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

79 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

71 j'aime

13