Les Lieux infidèles par Aunbrey
Je suis un peu déçue par Les Lieux Infidèles. J'avais déjà lu un roman de cette auteure et j'avais beaucoup aimé sa capacité à obséder le lecteur pour obtenir le fin mot de l'histoire. Ici, on comprend très rapidement qui est le meurtrier. La raison est peut-être moins évidente à deviner donc les explications sont les bienvenues, néanmoins le tueur est facilement reconnaissable. Alors à partir du moment où on sait qui a commis quoi, le temps devient un peu long.
En effet, lorsque la valise de Rosie Daly est retrouvée dans une maison abandonnée de Faithful Place, quartier où l'inspecteur Frank Mackey a grandit, ce dernier ne s'imaginait pas que vingt-deux ans après son départ elle reviendrait le hanter. Mackey se retrouve alors plongé entre le passé et le présent, tentant de découvrir ce qu'il s'est passé.
Faithful Place nous fait découvrir les conditions de vie de la classe ouvrière irlandaise dans les années 1980 où se mêlent violence conjugale, rêve d'escapade, travail d'usine, alcoolisme et rivalité entre voisins. On y rencontre la famille Mackey, au caractère bien trempé. On comprend aisément pourquoi Mackey a voulu fuir cette existence et ne cesse de tous les comparer à des « fous ». Cette famille dysfonctionnelle et les liens entretenus entre les membres de la famille sont au centre du roman. L'auteure met un point d'honneur à approfondir tous ses personnages, à leur donner un passé, une véritable histoire, ils sont tous développés et ce, quelque peu au détriment de l'enquête policière.
L'atmosphère générale du roman est pesante et emplie de lourds secrets. Je crois d'ailleurs que c'est ce qui m'a le plus dérangée durant ma lecture. Les tensions présentes au sein de la famille sont étouffantes. N'importe qui à la place de Mackey aurait pris ses jambes à son coup pour échapper à cet enfer. Les enfants sont « condamnés » à répéter le même schéma que leurs parents. Dès l'instant où l'on rencontre la famille Mackey, on a ce pressentiment qui dit que quelque chose ne va pas. Les discussions sont houleuses et empreintes de hargne. On se sent mal à l'aise. Les silences dissimulent quelque chose de plus profond que vingt-deux ans d'absence. L'ambiance est vraiment suffocante et asphyxie lentement le lecteur. C'est parce que le roman se focalise beaucoup plus sur la psychologie de la famille que j'ai trouvé ce livre moins bon que Comme deux gouttes d'eau. L'univers dans lequel se déroule l'histoire est toujours très détaillé mais il est tellement oppressant qu'il accable et plonge le lecteur chaque page un peu plus dans une noirceur sans fond et fin. C'est très troublant, surtout lorsqu'on souhaite plutôt en apprendre plus sur le meurtre.
De plus, Mackey est un personnage torturé. Torturé par son passé, anxieux des réactions de sa famille, hanté par ses démons du passé mais également ceux du présent. Tout comme les membres de sa famille, il tente de leur cacher une partie de sa vie et va de surprise en surprise à la découverte de ce qu'il s'est passé après son départ. Ce tourment incessant se répercute sur le lecteur et crée une certaine pesanteur sur la lecture.
J'ai réellement eu le sentiment que tout pouvait exploser d'un moment à l'autre. Que, soudainement, un des personnages allait envoyer tout le monde promener et demandait qu'on lui fiche la paix. C'est assez déconcertant et surprenant de se retrouver dans une atmosphère aussi saturée et invivable. Je n'ai eu qu'une envie : fuir. Pourtant, je suis quand même restée scotchée à mon roman parce que je souhaitais connaître les raisons du tueur. Une fois que ces dernières sont énoncées, on comprend aisément ces motivations -sans pour autant les cautionner- et immanquablement, on se dit que c'était à prévoir, qu'on aurait pu le prédire. Ce qui a pour conséquence qu'on ne peut pas « en vouloir » et « détester » le meurtrier. On est plus dans ce système où tout est soit blanc, soit noir. Ici, à Faithful Place, il n'y a que du gris.Et ce gris imprègne le lecteur.
Pour conclure, je dirais juste que ce roman a un côté dérangeant. L'ambiance générale du quartier est irrespirable et lourde. La famille Mackey est tellement complexe et apporte son lot de tristesse et désagrément qu'il est impossible de rester de marbre, au point que ça en devient gênant. On comprend rapidement qui est l'assassin, néanmoins on reste obnubilé jusqu'à la fin pour découvrir jusqu'où l'effroi des circonstances nous mènera.