« Les fils de rien, les princes, les humiliés » est semblable à un dernier souffle, ce moment spécifique où un homme se penche, de manière effrénée, sur sa vie, jonglant entre regrets et remords et portant l’espoir d’un après, d’une rédemption pour ceux qui restent. Falco, un presque quinquagénaire retrace son parcours d’homme, dont le pivot central est cette colère, cette violence exacerbées qui l’ont toujours animées et le feront rejoindre un groupuscule d’extrême droite, lui qui semblait au départ si docile à la vie. Il fait partie d’une frange de la génération 80, qu’il a illustré, malgré lui, tout au long de sa vie, celle du « no futur ». Cette tranche de population oubliée que sont les victimes de la grande crise industrielle d’alors qui poussait déjà en son temps le chômage à des sommets, à la misère, à l’exclusion, et c’est un énorme sentiment de gâchis qui le submerge. Ses années 80 sont loin du bling bling sur lequel on fantasme aujourd’hui. L’univers de Falco est gris, se situe de l’autre côté du périph et contraste avec cette période dont on pense qu’elle ne fut que fric facile et création. L’histoire de Falco est symbolique de la face cachée, honteuse, d’une époque. Stéphane Guibourgé, a bien cerné son personnage et reflète parfaitement avec ce style d’écriture, sec, tranchant, baigné dans l’urgence toutes ses facettes et ses remises en question. Un ensemble de flash back, sans cohérence apparente, qui forment à la fin un bloc, celui d’un homme que la vie a mal taillé. Il ne juge pas, n’interprète pas, l’auteur pose simplement des faits, presque mécaniquement par le biais de belles illustrations littéraires. Au point même que le lecteur, parfois, peut se perdre, ne retenant que cet ensemble de citations ou aphorismes remarquables, déliassant un temps le fil du récit. En ces heures à nouveau difficile pour notre société, ce roman a des allures de mise en garde et place le constat de l’échec sociétal actuel à son juste niveau, dramatique ! Même si les mêmes causes sont les mêmes conséquences diffèrent et s’aggravent, la misère n’est plus en marge, elle est en marche… et démultipliera les Falco jusqu’au point de non retour.
Fritz_Langueur
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le 26 oct. 2014

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