C’est une histoire simple aurait dit Flaubert. Un vieillard veille en compagnie d’un chien aveugle sur un unique plant de maïs dans un village que la sècheresse a vidé de tous ses habitants.
Ce n’est rien de dire qu’il consacre toutes ses forces à cette tâche à la fois dérisoire et herculéenne : que la plante arrive à maturité. Il doit défier le soleil dont il a appris à peser les rayons, affronter les rats et les loups, mais aussi prendre et apprendre d’eux, trouver l’eau et l’engrais, à tout prix. Peu à peu, le vieil homme devient lui-même un des éléments de cette nature qu’il affronte, il tire parti de chaque geste, de chaque graine, de chaque goutte de sueur ou d’urine.
Si on est d’abord un peu sceptique devant la minceur de l’intrigue, on se surprend finalement à s’attacher la quête essentielle de celui qui au seuil de la mort, s’évertue à planter, à planter à son âge… Car ce n’est pas pour lui qu’il le fait, il sait bien qu’il ne survivra pas jusqu’à la saison nouvelle, c’est pour offrir, ou pour obéir à une nécessité intérieure, à une loi du devoir qui vient de loin. Et finalement, c’est pour la beauté du geste, c’est pour rien. Un livre qui renoue avec les choses élémentaires : c’est précieux comme un plant de maïs par grande sècheresse.